Le patient cancéreux peut souffrir de douleurs persistantes, mais aussi de pics douloureux nommés accès douloureux paroxystiques (ADP) se superposant aux douleurs de fond.
L’ADP se définit comme une exacerbation passagère d'une douleur chronique par ailleurs contrôlée par un traitement de fond. Caractérisé par son apparition brutale, sa brièveté et sa forte intensité, il altère la qualité de vie (3). La prescription dans ce cadre d’un traitement antalgique de de fond doit anticiper ces accès douloureux, un morphinique d’action rapide ce qui implique de connaître les caractéristiques de ces accès ainsi que le délai et la durée d’action des différents opioïdes.
EVALUER L’ACCÈS DOULOUREUX PAROXYSTIQUE
Les morphiniques d’action rapide par voie orale sont indiqués en interdose pour des pics douloureux ou avant un geste particulièrement douloureux alors que le patient est sous traitement par morphiniques action prolongé. Leur biodisponibilité variant suivant le patient aussi l’effet de la morphine et des autres morphiniques est individuel.
Quelques règles sont à observer avant de prescrire :
- différencier un patient ayant une douleur de fond bien contrôlée de ceux dont la douleur de fond ne l’est pas ; dans ce dernier cas, il faut réadapter le traitement de fond. Ainsi, plus de quatre ADP par jour justifient une augmentation du traitement de fond ou une rotation des opioïdes ;
- rechercher spécifiquement la cause des ADP (facteurs déclenchant ou facilitants, soins, mobilisation, inflammation,…). Les étiologies et les mécanismes sont multiples et l’origine des ADP peut être multifactorielle. Dans la mesure du possible, on traite l’étiologie en prêtant attention aux douleurs induites par les traitements (mucites, douleurs neuropathiques à traiter par des antiépileptiques, …) ;
- évaluer l’intensité et la durée de l’ADP, ainsi si celui-ci ne dépasse pas un quart d’heure, on évitera un morphinique agissant en 15 à 20 minutes. « Mais attention, chez un même patient, les ADP peuvent revêtir une grande diversité de nature, d’intensité et de durée. » prévient Alain Serrie.
LES DIFFÉRENTS MÉDICAMENTS
-› Les sulfates de morphine
- Oramorph ® : en unidose de 10, 30, 100 mg/5 ml en récipient unidose ou à 20 mg/1ml en flacon compte goutte (8 gouttes = 0,5 ml = 10 mg), pouvant être ingérées directement ou mêlées à un liquide ou semi solide (yaourts. La solution en gouttes a l’avantage de pouvoir adapter très précisément la posologie au patient (âgé, enfant)
- Actiskenan ® : 5,10, 20 et 30 mg en gélules
- Sevredol ® : 10 et 20 mg en comprimés sécables
Leur action antalgique débute en 30 minutes environ, la pleine action antalgique s’exercant entre 45 minutes et une heure. La durée de l’antalgie est de 4 heures
Les interdoses doivent se situer entre 1/10 et 1/6ème de la dose totale de morphiniques retard (2). « Pour simplifier, conseille le Dr Serrie, avec un patch de fentanyl de 25 mg, on prévoit des interdoses de 10 mg de sulfate de morphine, de 20 mg pour un patch de 50, de 30 pour celui de 75 et de 40 pour celui de 100 ».
Les sulfates de morphine peuvent aussi être utilisés en dehors de la douleur cancéreuse, une heure avant des gestes douloureux par exemple.
-› L’oxycodone à libération immédiate
Oxynorm® (gélule à 10 et 20 mg) et Oxynormoro® (cp dispersible 5, 10 et 20 mg) ont moins d’effets secondaires (cognitifs surtout) que la morphine (10 mg d’oxycodone = 20 mg morphine orale)
Leur délai d’action est de 15 à 30 minutes, la durée d’environ 4 heures.
-› Le fentanyl
- Actiq ® (cp avec applicateur buccal à 200, 400, 600, 800, 1200, 1600 mcg) est une sorte de « sucette » de fentanyl à faire rouler contre la face interne de la joue. Le patient stoppe la succion quand il est soulagé (ce peut être fatiguant pour un patient âgé). On commence par le dosage le plus faible 200 mcg en frottant 15 minutes puis en attendant 15 minutes. Si le patient souffre encore il prend un deuxième bâtonnet, si lors du pic suivant un deuxième bâtonnet est encore nécessaire, on passe à un bâtonnet à 400 puis si cela est nécessaire et en suivant le même principe, à un bâtonnet à 600 mcg.
- Abstral ® en comprimés sublinguaux est disponible en six dosages : 100, 200, 300, 400, 600 et 800 mcg. Le pic plasmatique est atteint au bout de 5 minutes et la durée d’action est de 30 minutes (5).
- Effentora ® (comprimés gingival à 100, 200, 400, 600 et 800 mcg) représente une nouvelle forme galénique permettant une administration de fentanyl par voie gingivale. Ce « fentanyl oravescent » est un comprimé effervescent ayant une dissolution rapide et diffusant le principe actif par voie orotransmuqueuse
Plusieurs formes galéniques de fentanyl d’action rapide devraient prochainement être commercialisés (spray nasal (Instanyl ®, Nasalfent ®), inhalateur (Taifun ®)).
DES PRESCRIPTIONS À RÉÉVALUER
L’effet de ces molécules est très rapide et le soulagement est obtenu avec une tolérance qui serait meilleure que celle de la morphine classique (2). Réservés aux patients cancéreux sous traitement morphinique de fond, ils sont particulièrement indiqués pour les douleurs de survenue brutales et brèves. Ce sont des produits onéreux.Tous ces traitements doivent être régulièrement réévalués pour apprécier leur efficacité, leur tolérance et vérifier si la nature des ADP ne s’est pas modifiée.
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