Quand contraception rime avec introspection

Publié le 04/11/2016
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Crédit photo : GARO/PHANIE

 Si la crise sanitaire sur les pilules de 3e et 4e génération (P3G et P4G) et son traitement médiatique ont pu inquiéter le grand public, les médecins généralistes (MG) semblent l’avoir vécu de façon plutôt sereine et constructive. Tel est l’enseignement d’une étude conduite par François Carbonnel et al. et publiée récemment dans la revue Médecine*.

L’objectif de ce travail était d’explorer le vécu de cette crise par les médecins généralistes, la place qu’ils ont occupé dans sa gestion, l’impact sur leurs pratiques et les moyens mis en oeuvre pour répondre au malaise des patientes.

Les auteurs ont réalisé une étude qualitative utilisant des entretiens semi-directifs. Onze praticiens (6 femmes, 5 hommes) installés dans l’Hérault ont été interrogés.

Ces entretiens mettent en évidence un impact réel de la crise des pilules sur l’exercice des médecins. Avec notamment l’émergence d’une « attitude réflexive sur leur pratiques professionnelles ». Comme si la mise en avant des effets secondaires des contraceptifs de 3 et 4 générations avait permis aux praticiens de repenser la contraception comme un acte médical pas toujours anodin, avec une plus forte attention aux antécédents médicaux et aux indications des différents types de contraception.  « Cela nous a peut être restimulés sur le fait de bien faire attention aux interrogatoires » indique ainsi l’un des généralistes consultés.

Concernant le retentissement sur les prescriptions, les auteurs identifient deux catégories de médecins. Avec d’un côté ceux qui avaient déjà calqué leur pratiques sur les recommandations et qui n’ont donc pas eu besoin de modifier considérablement leurs habitudes. Et de l’autre, ceux qui ont du adapter leurs ordonnances en prescrivant moins de P3G et P4G, avec un report fréquent sur d’autres méthodes contraceptives comme le stérilet.

 Autre impact plutôt positif : la crise a permis aux  généralistes de réinvestir le champ de la gynécologie, avec davantage de temps d’échanges spécifique autour de la contraception. Le fait d’aborder la question de la contraception permettait aussi de faire le point de façon plus large sur le suivi gynécologique  des patientes. « Les patientes ont découvert à cette occasion que le généraliste pouvait faire de la gynécologie » résume un des praticiens inclus dans l’étude.

Plus globalement, concernant le comportement de leurs patientes, les MG interrogés rapportent des attitudes très variables allant de la sérénité à l’inquiétude en passant par la confusion.

 De leur côté, tous déclarent en revanche avoir vécu de façon plutôt sereine cette période,  confortés pour certains dans leur « frilosité » vis à vis des P3G et des P4G. Ils regrettent cependant « une réponse inadaptée des autorités sanitaires », dénonçant une certaine précipitation dans les décisions et des mesures parfois contradictoires.

 


*F Carbonnel et al. Vécu et adaptation des médecins généralistes face à la crise sanitaire sur les pilules de 3e et 4e génération.  Médecine Sept. 2016 Vol. 12

Bénédicte Gatin

Source : lequotidiendumedecin.fr