Le cancer du sein est le premier cancer chez la femme avec 49 814 nouveaux cas et 11 201 décès en 2005. L’actuel plan cancer (Plan Cancer II, 2009-2013) a souhaité améliorer la prise en charge de l'après-cancer et renforcer le rôle pivot du médecin traitant. La dernière séance de chimiothérapie ou radiothérapie marque habituellement le début de la « vie après le cancer du sein », une nouvelle vie qui a du mal à redevenir « normale » tant le traumatisme de l'expérience du cancer a marqué ces patientes. Le travail de thèse du Dr Julie Vaure, présenté au dernier congrès de Médecine Générale (juin 2012, Nice), propose d'explorer le vécu de ces femmes et la place du médecin traitant dans leur prise en charge.
MÉTHODE
Il s'agit d'une étude qualitative exploratrice par entretiens individuels semi-dirigés auprès de patientes de la région Auvergne. Ces patientes ont été recrutées dans une association de malades et la patientèle de 9 médecins généralistes de la région. Parmi les critères d'inclusion, on retrouve les notions de premier épisode de cancer du sein et de traitements institutionnels terminés depuis plus d'un mois et moins de cinq ans, une hormonothérapie éventuelle. Le guide d'entretien a été élaboré à partir d'une revue de la littérature sur ce sujet, de l'avis d'une anthropologue de la santé et de notes prises au cours d'entretiens informels avec les patientes lors de consultations. Des modifications ont été apportées au fil des entretiens. Les entretiens ont été intégralement retranscrits puis analysés de façon thématique indépendamment par deux chercheurs. L'analyse a été soumise aux participantes pour validation.
21 femmes soignées pour cancer du sein ont été interrogées de juillet à octobre 2011. La saturation des données a été obtenue au bout de 16 entretiens.
RÉSULTATS
– Notion de « rupture biographique » retrouvée au fil de ces entretiens avec un retentissement social (désocialisation, sentiment de dévalorisation) et retentissement physique (altération physique, perte d'autonomie, atteinte à la féminité).
– Impact sur la sexualité avec des partenaires plutôt attentifs et compréhensifs mais absence de dialogue avec leur médecin sur ce sujet.
– Sentiment d'abandon et de vide à la fin des traitements avec un entourage qui les soutient mais sans forcément les comprendre car ces femmes sont alors considérées comme guéries.
– Sentiment d'incertitude avec peur de la rechute au moindre symptôme.
– Importance du mot guérison qui est rarement prononcé par les médecins.
– Difficultés dans le retour au travail.
– Préoccupations esthétiques rarement évoquées avec les médecins.
– Priorités de vie devenues différentes : davantage d'altruisme, concrétisation plus rapide des projets.
– Le médecin généraliste est perçu comme disponible mais le suivi du cancer ne semble pas être dans son domaine de compétence.
CONCLUSION
En dépit d'une unité géographique limitée (région Auvergne), cette étude met bien en relief les problématiques physiques liés aux traitements du cancer du sein (aspect mutilant, impact sur la sexualité, préoccupations esthétiques, atteinte à la féminité, altération physique...). Elle souligne aussi à travers cela les symboliques multiples du sein pour la femme elle-même et son entourage. Enfin, elle met en évidence des carences dans la prise en charge psychosociale de ces femmes après leur traitement. Le médecin généraliste est idéalement placé pour assurer ce suivi d'après cancer par sa place dans le système de soins, son approche holistique, sa qualité d'écoute... Cependant l'étude a montré que le médecin généraliste a peu de légitimité aux yeux des patientes pour le suivi du cancer. Les expériences de suivi partagé constituent une solution d'avenir. Elles permettent la création d'un lien entre le médecin généraliste et le centre spécialisé et ainsi redonner confiance aux patientes.
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