Pas de molécules ni de techniques innovantes, beaucoup d’analyses en sous-groupe d’études déjà connues, etc. : l’édition 2017 du congrès de l’American heart Assoxciation (AHA, Anaheim Californie, 11-15 novembre) ne restera sans doute pas dans les annales. Exception faite de la présentation des nouvelles recommandations AHA/ACC (American Heart Association/American College of Cardiology) sur l’HTA, qui ont suscité beaucoup d’interrogations et de critiques dans les couloirs.
LA PA normale revue à la baisse
Il faut dire que les auteurs n’y sont pas allés de main morte, puisqu’ils proposent d’abaisser de 10 mmHg les seuils de PAS et de PAD définissant l’HTA. Ainsi, par rapport à la version antérieure, l’hypertension ne débute plus à partir de 140/90 mmHg, mais dès que la PAS est ≥ 130 mmHg ou la PAD ≥ 80 mmHg. La catégorie pré-hypertension a été supprimée ; la PA est considérée normale jusqu’à 120/80, élevée jusqu’à 129/79, puis vient l’hypertension de stade 1 jusqu’à 139/89, puis l'HTA de stade 2.
Ces nouvelles recommandations s’appuient largement sur les conclusions de l’étude Sprint. Dans cet essai publié fin 2015, une attitude plus agressive visant une PAS ≤ 120 mmHg chez des sujets à risque (mais non diabétiques) permettait de gagner 25 % en protection cardiovasculaire (CV), comparativement à l’attitude “classique” visant les 140 mmHg. Suggérant en filigrane que le risque d’évènements CV majeurs existe déjà pour une PAS de 120 mmHg. Mais pour le Dr Karen Johnson (états-Unis), ces résultats pourraient avoir été biaisés par une méthode de prise de mesure imparfaite et hétérogène selon les centres. Et globalement, les résultats de cette étude prêtent encore à discussion.
48 % d’Américains “hypertendus”
Au-delà des querelles de méthodologie, certains cardiologues s’inquiètent de l’inflation thérapeutique que risquent d’entraîner ces nouvelles guidelines, puisqu’avec la modification du seuil d’HTA préconisée, 48 % des adultes américains deviennent hypertendus ! Sur ce point, le Dr Paul Whelton, investigateur de Sprint et premier auteur de ces recommandations, se veut rassurant, estimant que seule une petite part de ces nouveaux hypertendus devraient être amenés à prendre des antihypertenseurs ; les HTA sans facteurs de risque jusqu’à 139/89 devant bénéficier de mesures non pharmacologiques.
Quoiqu’il en soit, le défi dans l’HTA reste celui de l’adhésion au traitement, puisqu’en moyenne, les malades ne sont à la cible que 2,8 mois par an, selon l’étude Titre menée auprès de 170 000 personnes nouvellement diagnostiquées suivies près de cinq ans. Dans ce travail, ceux qui sont à la cible pendant moins d’un mois ou moins de trois mois, ont respectivement un risque de complications CV majeures multiplié par 1,8 et 4,5 par rapport aux personnes qui sont à la cible plus de trois mois. « Ce n’est donc ni la moyenne de la PA ni sa variabilité qui est importante pour réduire les évènements cardiovasculaires, mais bien le temps à la cible », insiste Mar Pujades-Rodriguez (Royaume-Uni).
Autre actualité dans l’HTA : parmi les interventions non médicamenteuses, la chirurgie bariatrique confirme ses bénéfices chez l’obèse hypertendu traité. Dans l’étude Gateway, un an après l’intervention, la moitié des patients avait atteint l’objectif d’une PA à 140/90, sans médicament !
Des antidiabétiques pour prévenir l’insuffisance cardiaque
Concernant les autres facteurs de risque CV, plusieurs communications se sont intéressées aux liens entre diabète, anti-diabétiques et évènements CV. L’impact des analogues du GLP-1 sur les évènements cardiovasculaires est hétérogène, bénéfique pour le liraglutide et le semaglutide, neutre pour le lixisenatide et l’exenatide, comme vient de le montrer l’étude Exscel. Par contre, les cardiologues attendent beaucoup des inhibiteurs du SGLT-2 (dont on ne dispose pas encore en France), en particulier pour leur impact sur l’insuffisance cardiaque (IC). L’étude Empa-Reg Outcome confirme le bénéfice de l’empagliflozine, cette fois chez les artéritiques, avec à trois ans une réduction de la mortalité cardiovasculaire de 38 % et des hospitalisations pour IC de 44 %. Dans la même famille, « la canagliflozine, que ce soit en prévention primaire ou secondaire, réduit de 14 % les évènements cardiovasculaires majeurs, de 38 % la mortalité CV, diminue aussi les hospitalisations pour IC et s’associe à une néphroprotection », se félicite le Dr Kenneth W. Mahaffey (Canada).
En ce qui concerne les hypolipémiants, les nouvelles données sur l’evolocumab mettent en évidence que le rapport bénéfice/risque de cet anti-PCSK9 est majoré chez les patients les plus à risque, comme ceux ayant fait un IDM dans les deux ans et ceux atteints d’AOMI.
Enfin, une étude japonaise apporte de nouveaux arguments en faveur des statines, en montrant chez plus de 13 000 coronariens stables une réduction de la morbimortalité cardiovasculaire de près de 20 % à cinq ans en multipliant par quatre la dose de statine.
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