En mai dernier, l’OMS déclarait la dépression maladie n°1 des adolescents et encourageait les pays à s’engager sur ce problème de santé. En France, c’est désormais chose faite. La Haute Autorité de Santé publie ce jour des recommandations pour aider les médecins de premiers recours, à poser le diagnostic et à proposer une prise en charge adaptée à chaque situation. On estime en effet que près de 8% des adolescents entre 12 et 18 ans souffriraient d’une dépression. Or à cet âge, la dépression passe souvent inaperçue parce que l’adolescent éprouve des difficultés à exprimer ses ressentis, manifeste sa souffrance différemment et, plus simplement, sa dépression peut être confondue avec les sentiments de déprime de la crise d’adolescence. En effet, des symptômes dépressifs modérés et transitoires sont normalement présents chez 30 % à 45 % des ados mais la souffrance peut aussi être l’expression d’un épisode dépressif caractérisé (EDC) – encore appelé « épisode dépressif majeur ».
Poser à cet âge un diagnostic de dépression représente un enjeu de taille. Parce que quel que soit l’âge soit l’âge, face à un EDC, 28% de la population n’a pas recourt au soin. Selon l’étude Depression Research in European Society menée en 1995 dans 6 pays européens, plus de 2 personnes déprimées sur 5 n’ont pas consulté, et parmi celles souffrant d’un EDC, plus d’un tiers n’a pas eu recours aux soins. Ensuite, dépressifs ou non, les adolescents apparaissent comme la classe d’âge ayant le moins recours aux soins, notamment lors de difficultés psychiques. Et l’adolescent, de l’avis des pédospychiatres, verbalise rarement directement ses plaintes et emprunte plutôt la voie indirecte de comportements (ou conduites) agi(e)s .
Cette recommandation de la HAS reprend donc les signes cliniques caractéristiques de la dépression, insiste sur la nécessité d’une approche collaborative centrée sur l’adolescent. L’EDC se caractérisant dans cette tranche d’âge par des symptômes dépressifs (troubles de l’humeur, du cours de la pensée, troubles physiques et instinctuels, cognitions négatives et idéations suicidaires) s’inscrivant dans la durée et entraînant une souffrance cliniquement significative et un retentissement sur le quotidien de l’adolescent. Les symptômes doivent durer au moins 15 jours et être au minimum au nombre de cinq, comprenant un des deux symptômes cardinaux : humeur dépressive (ou irritable) ou perte d’intérêt (ou de plaisir).
La prise en charge que recommande la HAS, repose sur la psychothérapie en première intention, réalisée par un professionnel formé et habitué aux adolescents. En cas de résistance ou d’aggravation des symptômes, après 4 à 8 semaines, il est recommandé de mettre en place une psychothérapie spécifique. Sans amélioration au bout de 4 à 8 semaines, la prise en charge médicamenteuse pourra être envisagée en association avec une psychothérapie. Ce type de prise en charge peut également être envisagée si le travail relationnel est impossible avec le thérapeute.
Enfin, l’hospitalisation est réservée à certaines situations graves, lorsque le risque de passage à l’acte suicidaire est imminent ou si le contexte familial est défavorable. En dehors de l’urgence, c’est un psychiatre (ou mieux un pédopsychiatre) qui doit évaluer cette possibilité.
A court et moyen terme, l’objectif de la prise en charge de la dépression est de gérer la crise suicidaire et de protéger l’adolescent. A long terme, il s’agit d’aider l’adolescent à dépasser ses vulnérabilités et à retrouver une estime de soi.
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