Paludisme, vaccins, etc.

Quoi de neuf dans les nouvelles recommandations sanitaires aux voyageurs ?

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Publié le 02/06/2022
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Disparition de la chimioprophylaxie par chloroquine, préconisations pour limiter les retards diagnostiques… Les principales nouveautés des recommandations sanitaires aux voyageurs 2022, publiées lei 2 juin, concernent surtout le paludisme.

Crédit photo : SINCLAIR STAMMERS/SPL/PHANIE

Comme tous les ans à la même période, le Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP) publie ce 2 juin ses recommandations sanitaires aux voyageurs.

Le come-back du paludisme

Cette année, le chapitre sur le paludisme concentre la majeure partie des nouveautés alors qu’en post-Covid, le nombre de cas est reparti à la hausse. En 2021, « nous constatons en effet une augmentation considérable du nombre de cas et de décès notifiés dans le monde, indique le Pr Sophie Matheron (Paris), coordinatrice de ces nouvelles guidelines, la pression créée par la pandémie de Covid-19 sur les systèmes de santé ayant fortement impacté les activités de lutte contre le paludisme ». Malgré cela, « la tendance à l’élimination du paludisme à l’échelle de la planète se poursuit car des pays et régions ont continué à progresser depuis 2010 vers l’élimination de la maladie ; la Chine et le Salvador en ont d’ailleurs été déclarés exempts en 2021 », nuance l’infectiologue.

En France, l’augmentation du nombre de cas est très marquée (+117 % entre 2020 et 2021), liée à la reprise des voyages internationaux. Les pays à l’origine des contaminations sont toujours situés en grande majorité en Afrique subsaharienne (99,3 %). Plasmodium falciparum est impliqué dans près de 89 % des cas. En légère diminution par rapport à l’année 2020 mais comparable à 2019, la proportion de formes graves reste élevée en 2021 (16,2 %).

Dans ce contexte, « il apparaît essentiel de renforcer la prévention chez le voyageur se rendant en zone endémique vis-à-vis du paludisme mais aussi de limiter au maximum les retards au diagnostic, insiste Sophie Matheron, car cela reste l’un des principaux facteurs de risque de forme grave et de décès ».

D’où l’importance « d’évoquer systématiquement un paludisme en cas de fièvre survenant dans les deux mois suivant le retour de zone endémique, quels que soient les symptômes associés », précisent les recos, qui invitent aussi à « rechercher un paludisme au retour de zone d’endémie éventuellement parallèlement à une recherche d’infection SARS-CoV-2 et même en cas de Covid-19 confirmé ». Les experts préconisent également de « suggérer aux biologistes d’évoquer un accès palustre en cas de thrombopénie d’étiologie inconnue au retour de zone d’endémie ».

Concernant la chimioprophylaxie du paludisme, « l’analyse de la balance bénéfice-risque de la chloroquine a conduit à ne plus recommander son utilisation, indique le Pr Matheron, ce d’autant que la commercialisation de la forme sirop est interrompue depuis juillet 2021, et que celle des comprimés le sera fin 2022 ». De plus, faute de données d’efficacité et d’innocuité fiables, les experts renouvellent leur alerte vis-à-vis de l’utilisation croissante de la plante entière Artemisia vendue sous la forme de tisanes ou de gélules dans la prévention ou le traitement du paludisme.

Enfin, en termes de protection personnelle contre les piqûres d’arthropodes, l’actualité en 2022 est l’abandon de l’imprégnation des vêtements par la perméthrine pour la population générale, compte tenu de l’absence de preuve de son efficacité et du risque de toxicité.

L’épidémiologie de plusieurs pathologies infectieuses bouleversée par le Covid

« Que ce soit pour le paludisme, mais aussi la fièvre jaune ou la tuberculose,
le Covid-19 a modifié les épidémiologies, fait remarquer le Dr Elisabeth Nicand (Villenave-d’Ornon), co-coordinatrice des recommandations, avec un coup d’arrêt pour la prévention primaire (désinsectisation, surveillance, campagnes de vaccination, diagnostics). »

Pour la fièvre jaune, le nombre de cas a ainsi augmenté dans des régions où il était limité jusque-là, comme en Afrique où le nombre de pays ayant signalé des flambées n’a jamais été aussi élevé depuis 2009, selon l’OMS. De nombreuses nouvelles zones à risque d’exposition apparaissent, pour lesquelles la vaccination est recommandée en raison d’un risque de transmission. A contrario, « il n’y a plus de risque de transmission, ni d’obligation de vaccination, pour l’île de l’Ascension (Royaume-Uni), le Laos, la Libye, les Philippines et le Territoire britannique de l’océan Indien », indique le BEH.

À noter, par ailleurs, que la Papouasie-Nouvelle-Guinée rejoint la liste des pays à risque de transmission d’encéphalite japonaise. Enfin, l’Arabie saoudite, la Fédération de Russie, l’Ukraine et la Croatie font désormais partie des zones géographiques à forte incidence tuberculeuse.

La PrEP intégrée aux recos

Autre nouveauté : dans le chapitre sur les risques liés au comportement sexuel, la prophylaxie antirétrovirale pré-exposition (PrEP) fait son apparition avec une réflexion sur l’intérêt de la prescrire chez certains voyageurs, en plus de l’usage du préservatif. « La PrEP trouve son indication en cas de prise de risque d’acquisition du VIH », rappelle le BEH. En situation de voyage, « les rapports non protégés avec des partenaires multiples ou dans un pays de forte endémie avec des personnes autochtones peuvent constituer une indication à̀ proposer la PrEP intermittente ou continue pendant la durée du séjour ».

Enfin, ont également été actualisées les recommandations concernant : la prévention du jet-lag, celle de la maladie thromboembolique et du mal des transports, ainsi que celle du mal aigu des montagnes


Source : lequotidiendumedecin.fr