Avec ses nouvelles recommandations sur le diabète de type 2 parues mercredi dernier, la HAS innove doublement. Sur la forme d’abord, en proposant pour la première fois un arbre décisionnel informatisé basé sur les recommandations. Grâce à cette application baptisée RecosDoc-diabète, le praticien peut retrouver en quelques clics, pour un patient donné, l’objectif glycémique idéal ainsi que la stratégie thérapeutique préconisée. Sont pris en compte notamment l’âge du patient, ses comorbidités, ses éventuelles contre indications à tel ou tel traitement mais aussi - et, c’est inédit - l’écart par rapport à la valeur cible de HbA1c. « Il y aura forcément des situations cliniques spécifiques pour lesquelles l’arbre ne répondra pas » prévient le Pr Hector Falcoff , généraliste enseignant à Paris et co-président du groupe de travail la HAS . Mais dans la plupart des cas, l’initiative devrait aider les médecins à se repérer dans les nouvelles stratégies thérapeutiques prônées par les recos.
Car sur le fond, le travail de la HAS revisite non seulement les objectifs glycémiques mais aussi les stratégies médicamenteuses à mettre en oeuvre. Avec globalement un certain retour aux fondamentaux.
Des objectifs glycémiques moins ambitieux
Concernant les objectifs glycémiques, l’époque du contrôle intensif pour tous semble bel et bien révolue. En 2006, dans ses précédentes recos, la HAS proposait pourtant une valeur cible d’HbA1c unique à 6,5 %. Mais l’étude ACCORD et la méta-analyse de la Cochrane sont passées par là et désormais le mot d’ordre est à l’individualisation. Avec globalement, un retour à des valeurs cibles moins ambitieuses qu’il y a 7 ans : « Pour la plupart des patients diabétiques de type 2, une cible d’HbA1c inférieure ou égale à 7 % est recommandée » estime la HAS qui ne retient plus la barre des 6.5 % que pour « les femmes enceintes ou envisageant une grossesse » et « les diabétiques nouvellement diagnostiqués, dont l’espérance de vie est › 15 ans et sans antécédent cardio-vasculaire ».
À l’inverse une certaine souplesse (Hb A1c < ou égale à 8 % voire 9 % dans de rares cas) est préconisée pour les personnes âgées fragiles ou malades, les sujets en insuffisance rénale sévère ou terminale (stades 4 et 5) et ceux ayant des antécédents de complications macrovasculaires considérées comme évoluée.
Un point de vue très proche de ce que préconisaient déjà l’ADA et l’EASD au printemps dernier.
Le come-back des sulfamides
La copie de la HAS tranche en revanche d’avantage concernant les stratégies thérapeutiques préconisées. L’agence fait en effet la part belle aux médicaments classiques (metformine sulfamide et insuline) en réservant les autres classes thérapeutiques - y compris les plus récentes - à des situations spécifiques. « Du fait d’une efficacité moindre, d’un manque de recul sur leur sécurité à moyen et long terme et/ou d’un coût supérieur, les autres traitements doivent être réservés aux situations dans lesquelles les traitements recommandés en première intention ne peuvent pas être prescrits » estime la HAS.
Si les mesures hygiéno-diététiques ne permettent pas d’atteindre l’objectif glycémique, il est recommandé « de prescrire la metformine seule en première intention ». Ensuite, si cela ne suffit pas, « une bithérapie puis éventuellement une trithérapie pourront être envisagées sur la base d’une association de metformine et de sulfamide », tandis que « l’insuline est le traitement de choix lorsque les traitements oraux et non insuliniques ne permettent pas d’atteindre l’objectif glycémique ».
Exit donc le libre choix des traitements de seconde intention en fonction du profil du patient comme le préconisaient l’ADA et l’EASD, pour un passage quasi obligé par la case sulfamide, sauf cas particulier.
Un retour aux fondamentaux qui pourrait bien faire grincer quelques dents. Selon le Pr Valensi (hôpital Jean Verdier, Bondy), si les arguments invoqués par la HAS sont imparables, il faut bien garder à l’esprit que les sulfamides ne sont pas des médicaments anodins, qu’ils présentent des risques d’hypoglycémies, peuvent faire prendre du poids et que leur maniement reste relativement difficile, nécessitant une titration. « Ce serait donc vraiment dommage de les prescrire uniquement par contrainte tout en sachant très bien que l’on passera ensuite à un autre traitement ».
Et, dans les faits, force est de reconnaître que les prescriptions de sulfamides n’ont plus complètement le vent en poupe. Une étude réalisée en médecine générale en 2010 montre ainsi une croissance très forte de prescriptions d’inhibiteurs de la DPP-4, en monothérapie), en bithérapie, en association à la metformine et en trithérapie. Avec en parallèle une réduction des bithérapies metformine + sulfamides...
Des recos résolument cliniques
Quoi qu’il en soit, les nouvelles guidelines de la HAS ont en tout cas l’avantage de proposer pour la première fois une démarche thérapeutique hiérarchisée en fonction des situations cliniques. Avec notamment, un arbre décisionnel interactif et informatisé* qui intègre le profil du patient, ses éventuelles contre indication à tel ou tel médicament mais aussi- et c’est inédit- l’écart par rapport à l’objectif d’HbA1c.
«C’est en cela que ces recommandations sont un véritable guide pratique pour les praticiens et notamment pour les généralistes » se félicite le Dr Cédric Grouchka, de la HAS.
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