Mr M, 62 ans, consulte pour une dysurie et une pollakiurie s'accentuant depuis 6 mois. Il n'est pas suivi régulièrement et amène avec lui son dernier dosage de PSA total, datant de 5 ans et égal à 3,8 ng/ml. Au TR, la prostate est modérément augmentée de volume, sans induration. Un nouveau dosage de PSA montre une valeur à 15,4 ng/ml. Il n'existe aucun antécédent familial de cancer de la prostate.
QUE PENSER DE LA VALEUR DU PSA ET DE SON ÉVOLUTION EN 5 ANS ?
-› "La première remarque concerne la valeur antérieure du PSA 5 ans, commente le Pr Rischmann, puisque ce taux de 3,8 ng/ml aurait dû être considéré comme anormal chez un homme de 57 ans". Aujourd'hui, bien que la valeur seuil de PSA total retenue pour l'indication de biopsies prostatiques soit généralement égale à 4 ng/ml, il convient de l'abaisser à 3 ng/ml chez les hommes jeunes (ou à risque), comme le mentionnent les dernières recommandations de l'AFU (1). "A tout le moins, il aurait fallu redoser le PSA un an plus tard chez ce patient".
-› La notion de vélocité du PSA total est également à prendre en compte, et une augmentation de 0,75 ng/ml/an constitue un élément d'alerte.
FAUT-IL DOSER LE PSA LIBRE ? FAIRE UN ECBU ?
Le rapport PSA libre sur PSA total est corrélé au risque de cancer de la prostate lorsque le PSA total est supérieur à 4 ng/ml (1) et une valeur inférieure à 15 % est suspecte. Mais le dosage du PSA libre n'est pas recommandé en 1ère intention. "Par ailleurs, le seul résultat du PSA total - 15,4 ng/ml – impose d'aller directement à la biopsie chez ce patient dont l'espérance de vie dépasse largement 10 ans, et dont on peut penser que le risque de cancer de la prostate dépasse 50 %. En l'absence de cancer et d'infection, on considère que 10 grammes de prostate produisent 1 ng/ml ; le taux de PSA peut donc s'élever à 10 ng/ml pour une prostate de 100 g, mais ce cas de figure est rare. Par ailleurs, un ECBU est indiqué chez ce patient pollakiurique et dysurique, l'infection urinaire et/ou prostatique pouvant être une cause d'élévation du PSA total".
Une série de biopsies – 10 à 12 prélèvements sont nécessaires en l'absence d'anomalie au TR, soit 5 à 6 par lobe - est réalisée. Après examen anatomopathologique, le score de Gleason s'élève à 8.
QUEL EST LE NIVEAU DE RISQUE DE CE PATIENT ?
Selon la classification de Gleason, il existe 5 grades de différenciation des adénocarcinomes de prostate. Le score de Gleason, coté de 2 à 10, est la somme des deux grades le plus fréquemment représentés dans la tumeur analysée (2). Les données de l'examen clinique (TR et stade TNM), la valeur du PSA et le score de Gleason constituent 3 facteurs pronostiques importants, et la classification de d'Amico distingue pour les tumeurs localisées 3 niveaux de risque de rechute biologique à 10 ans : faible, intermédiaire et élevé (tableau 1). Pour Mr M, le stade clinique correspond au grade T1c (tumeur découverte sur une biopsie prostatique en raison d'une élévation du PSA) (voir la classification TNM 2002 en annexe de la réf 2), le score de Gleason est à 8 et le taux de PSA à 15,4 ng/ml. Ce cancer se classe donc parmi les tumeurs à risque élevé de rechute biologique à 10 ans après traitement (en raison du score de Gleason à 8), c'est-à-dire à risque élevé de progression, d'évolution métastatique et de décès.
-› "La valeur exacte des différents niveaux de risque est difficile à préciser, car elle dépend du traitement appliqué, notamment pour les tumeurs à haut risque qui peuvent bénéficier de protocoles thérapeutiques différents. Par exemple, pour une tumeur à faible risque, on obtient 90 % de chances de guérison après traitement radical ; 80 à 85 % pour une tumeur à haut risque ayant bénéficié d'un traitement multimodal (traitement radical + modalités thérapeutiques complémentaires) ; et 50 % pour une tumeur à haut risque n'ayant pas bénéficié d'un traitement complémentaire".
QUELS AUTRES FACTEURS PRONOSTIQUES PRENDRE EN COMPTE ?
-› Sur le plan histopathologique, outre le score de Gleason, on tient compte du nombre de carottes envahies (haut risque si › 50 % de biopsies positives), du pourcentage de cancer sur les biopsies (haut risque si › 30 %), et de l'envahissement éventuel de la capsule. On note également le statut ganglionnaire.
-› De nombreux facteurs alimentaires et environnementaux ont été étudiés (alcool, cadmium, régime riche en graisses animales…), mais aucun n'est utilisé en pratique clinique.
-› L'obésité est associée à un taux de récidive biologique plus élevé après prostatectomie totale ou radiothérapie (1). "Mais il s'agit plutôt d'un facteur connexe, faisant intervenir une éventuelle hypoandrogénie (hypotestostéronémie) en rapport avec le syndrome métabolique souvent associé à l'obésité".
-› "En ce qui concerne l'hérédité, on parle de cancer héréditaire lorsqu'il existe deux antécédents familiaux (5 % des cas). Ces cancers n'ont pas un profil biologique différent des autres, mais le risque tient à l'âge de survenue".
Mise au point
Troubles psychiatriques : quand évoquer une maladie neurodégénérative ?
Étude et pratique
Complications de FA, l’insuffisance cardiaque plus fréquente que l’AVC
Cas clinique
L’ictus amnésique idiopathique
Recommandations
Antibiothérapies dans les infections pédiatriques courantes (2/2)