Même si une grande partie des viols et agressions sexuelles reste méconnue en raison de l’absence de plainte ou de consultation médicale, on sait qu’il s’agit d’un phénomène de grande ampleur (1) qui peut atteindre les 2 sexes. Tout médecin généraliste peut être confronté un jour à ce type de situation, sur réquisition ou simplement lors d’une consultation spontanée de la victime.
L’ACCUEIL DE LA VICTIME
Si les faits datent de moins de 4 jours, il s’agit d’une urgence médicale et médico-légale. Si les faits sont très récents, la victime ne doit pas effectuer de toilette avant l’examen et doit conserver ses vêtements.
Les agressions sexuelles sont des expériences traumatisantes vécues dans la terreur. La victime doit faire preuve de courage pour oser déposer plainte ou demander des soins (2). Elle doit être reçue rapidement, avec empathie, dans un cadre respectant son intimité (2). Le médecin peut la recevoir seule ou, avec son consentement ou à sa demande, en présence d’une tierce personne.
-› Le médecin doit évaluer le plus vite possible si pour des raisons techniques (absence de matériel adéquat ou manque de compétence) ou médicales (état clinique inquiétant) la personne doit être transférée vers un centre spécialisé (2). Les pôles régionaux d’accueil des victimes d’agressions sexuelles ont été créés dès 1997 au sein de chaque région de France dans le but d’une prise en charge multidisciplinaire en lien avec les forces de l’ordre et les associations de victimes.
-› La personne agressée doit être avertie de ses droits. Il faut lui conseiller de déposer plainte auprès de la brigade de gendarmerie, du commissariat de police ou du procureur de la République, si cette démarche n’a pas déjà été réalisée. Si elle refuse mais est majeure, selon l’article 226-14 du code pénal, le médecin peut porter à la connaissance du procureur les sévices subis mais seulement avec son accord écrit. S’agissant de personnes mineures de 15 ans ou de personnes vulnérables, le médecin doit effectuer un signalement aux autorités judiciaires, médicales ou administratives, même sans l’accord de l’intéressé (code pénal, art.222-14- levée du secret professionnel et code de déontologie). Le recours à la justice constitue en lui-même un élément de reconstruction de la victime.
L’EXAMEN MÉDICAL
Acte potentiellement traumatisant, il ne sera réalisé qu’avec l’accord de la victime. Le praticien doit faire preuve de douceur et de patience.
L’entretien médical préalable permet de déterminer les circonstances et les caractéristiques de l’agression. Il est utile de demander à voir et même recueillir les vêtements, puis de les confier éventuellement à la police en vue d’une expertise. Les antécédents médicaux de la personne doivent être connus, tout comme les éventuels traitements, contraception, conduites addictives… Les doléances de la victime doivent être entendues (douleurs abdominales, brûlures urinaires, hémorragies génitales, rectorragies, troubles de la défécation…)
Lors de l’examen médical proprement dit, la présence d’un témoin du même sexe que la victime est souhaitable et souvent rassurant (1). Le médecin doit procéder à un examen général à la recherche de traces de violence physique (plaies, cicatrices, hématomes, érythème…) et de leur éventuellement retentissement. Les examens gynécologique (lésions vulvaires, déchirure hyménale, œdème du pénis, plaies du scrotum…), anal (fissure, béance…) et buccal (lésions dentaires, muqueuses ou du frein) viennent ensuite. Il est impératif de ne pas omettre l’évaluation de l’état psychologique (anxiété, sursauts, obnubilation, anesthésie affective, agressivité,…).
LES PRÉLÈVEMENTS
Ils sont effectués dans le même temps que l’examen médical. Les prélèvements biologiques dépendent des caractéristiques et de l’ancienneté de l’agression. Ils doivent être numérotés, étiquetés (nom de la victime, siège, date et heure) et répertoriés dans le certificat médical initial et le dossier médical (2). Il s’agit de :
- la recherche de spermatozoïdes au niveau vaginal, anal ou buccal, en vue de prouver la réalité d’un rapport sexuel,
- la détection d’infections sexuellement transmissibles, VHB, AC anti HBS, VHC, syphilis, gonococcie, chlamydia, HIV) par écouvillonnage ou prélèvement sanguin,
- la mise en évidence de toxiques sanguins dans le sang, les urines ou les cheveux,
- d’autres prélèvements de spermatozoïdes sur écouvillons peuvent être réalisés afin d’établir les empreintes génétiques de l’agresseur, et confiés à l’autorité judiciaire
- un test de grossesse chez la femme en âge de procréer.
Les lésions peuvent aussi être photographiées avec l’accord de la victime.
LES PRESCRIPTIONS
= Prévention des maladies sexuellement transmissibles :
- Trithérapie afin de limiter le risque de séroconversion (si la consultation a lieu dans les 4 jours après l’agression), et mise en place d’une consultation avec un infectiologue référent VIH,
- azithromycine 250 mg, 4cp en une seule prise.
= Contraception d’urgence (Norlevo® 1cp dans les 72 heures suivant l’agression ou Ellaone® jusqu’à 5 jours).
= La proposition d’une consultation avec un psychiatre ou un psychologue, de préférence spécialisé dans le domaine.
= En cas de non vaccination, une sérovaccination par immunoglobulines anti-HBs et une injection d’une dose de vaccin (sur un autre site).
= Si besoin, anxiolytique et/ou antalgique et le traitement des plaies éventuelles.
= La victime doit bénéficier d’un suivi médical, psychologique et biologique régulier et d’une mise en relation avec une association d’aide aux victimes.
Mise au point
Troubles psychiatriques : quand évoquer une maladie neurodégénérative ?
Étude et pratique
Complications de FA, l’insuffisance cardiaque plus fréquente que l’AVC
Cas clinique
L’ictus amnésique idiopathique
Recommandations
Antibiothérapies dans les infections pédiatriques courantes (2/2)