Victimologie

VIOLENCES SEXUELLES : REDIGER UN CERTIFICAT MEDICAL

Publié le 07/05/2010
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La rédaction d’un certificat médical dans les suites d’une agression sexuelle n’est pas chose aisée. Quelques règles sont à respecter. En voici les principaux éléments.

Après un entretien et un examen médical bien conduits (voir Le Généraliste n°2524 du 23 avril 2010) , vient ensuite la rédaction du certificat médical. Qu’il soit effectué ou non sur réquisition, il doit être précis et circonstancié. Il permet de rendre compte d’un constat médical de blessures physiques et psychologiques, de leur gravité et des conséquences médicales et juridiques (1, 2).

CERTIFICAT MEDICAL SANS REQUISITION

Dans ce cas, le certificat médical est rédigé pour la victime lors d’une consultation spontanée. Il est nécessaire si la personne agressée veut porter plainte. Sachant qu’elle aura 10 ans pour le faire en cas de délit (le minimum pour une agression sexuelle), 20 ans en cas de délit aggravé et de crime. Si la victime est mineure, ces délais sont augmentés puisqu’ils ne débutent qu’à partir de la majorité.

Le certificat mentionne l’identité du médecin signataire et de la victime qui « dit se nommer ». Le praticien y note la date et l’heure de l’examen. Il doit retranscrire les faits dénoncés par la victime et ses doléances avec ses mots à elle. Il est nécessaire d’être prudent sur les mots employés. Il convient d’utiliser le conditionnel et les guillemets pour retranscrire les dires.

Les observations de l’entretien et de l’examen médical doivent figurer à la suite.

-› Les résultats de l’examen clinique sont décrits de manière détaillée. Ils relatent les éléments positifs (lésions traumatiques récentes ou anciennes) et les éléments négatifs (absence de) relatifs aux allégations de la victime. Il est possible d’illustrer par des schémas ou des photographies.

Les prélèvements effectués doivent ensuite être inscrits. La connaissance de leurs résultats ou au contraire leur absence sera mentionnée également.

-› La conclusion indique la compatibilité des données de l’entretien et de l’examen clinique avec l’agression rapportée. Il ne doit pas conclure à l’absence d’agression sexuelle en cas d’absence de lésion.

-› Au bas de ce certificat, une éventuelle incapacité totale de travail (ITT) sera indiquée, ainsi que la prévision d’une incapacité permanente partielle (IPP).

Le certificat médical daté et signé doit être remis à la victime (lire encadré : certificat médical sans réquisition pour un adulte (3)).

-› Si la victime est un enfant, le respect du secret professionnel peut conduire le cas échéant à ne pas communiquer aux parents, ni par écrite, ni par oral, les données de l’examen gynécologique (lire encadré : Certificat médical sans réquisition pour un enfant (3)).

CERTIFICAT MEDICAL SUR REQUISITION

Dans ce cas, le certificat médical est rédigé pour l’officier de police judiciaire (OPJ) suite à la plainte d’une victime. Cet officier présente au médecin un ordre de mission judiciaire qui est souvent relativement détaillé. Il comporte plusieurs demandes :

- Relater l’entretien et l’examen médical,

- Décrire la nature des faits (indiquer s’il y a eu pénétration, s’il existe des lésions, s’il s’agit d’une femme si elle est en période de règles,…),

- Enumérer et si possible dater les éventuelles lésions,

- Procéder à de multiples prélèvements et les indiquer,

- Donner son avis sur l’état psychologique de la victime,

- Eventuellement, indiquer les prescriptions réalisées,

- Etablir un certificat médical détaillé en réponse aux différents points de la mission.

-› Le certificat médical en lui-même est identique à celui rédigé sans réquisition. A la différence près que doivent y figurer les éléments relatifs à la réquisition et les réponses précises à toutes les questions mentionnées par le juge sur l’ordre de mission.

Le certificat doit être remis à l’autorité requérante (OPJ). Il est considéré comme une pièce de procédure.

(lire encadrés : certificat médical sans réquisition pour un adulte et certificat médical sur réquisition pour un enfant (3)).

A RETENIR

-› Un médecin ne doit jamais refuser de voir une personne, homme, femme ou enfant,

victime de violences sexuelles. Cependant, dès le début, le médecin doit évaluer sa capacité à prendre en charge la victime et à établir le certificat médical.

S’il s’en sent incapable soit par ses faibles compétences dans le domaine soit par son manque de matériel (tubes pour prélèvements, contraception d’urgence…), il doit, après contact téléphonique, transférer en urgence la personne vers un pôle régional d’accueil des victimes de violences sexuelles, un service de gynécologie-obstétrique ou une unité médico-judiciaire. Dans ce cas, le médecin doit compléter (si la victime est déjà connue) ou ouvrir un dossier médical contenant tous les éléments potentiellement recueillis, le nom de l’OPJ en cas de réquisition et le nom du service et du correspondant auxquels la personne a été adressée.

-› Le certificat médical établi suite à l’examen d’une victime de violence sexuelle doit

être descriptif. Le médecin doit savoir rester objectif et se garder de toute appréciation personnelle. La qualification des faits est de nature juridique : elle dépend du magistrat.

-› Le rôle du médecin ne se limite pas à la rédaction du certificat. Il est avant tout un thérapeute qui doit assurer le suivi des patients. Sachant que les conséquences d’une agression sexuelles peuvent se révéler à plus ou moins long terme.

Dr Caroline Pombourcq (rédactrice, fmc@legeneraliste.fr), sous la responsabilité scientifique du Dr Frédérique Guillet-May (gynécologue-obstétrique, coordinatrice du pôle régional d’accueil des victimes d’agressions sexuelles, maternité régionale 10 rue d

Source : lequotidiendumedecin.fr