« LES SYNDICATS de l’AP-HP ne sont pas connus pour être très souples.Quand j’ai appris que Mireille y partait, je me suis dit : il va y avoir du sport! », s’amuse cet ancien membre du conseil d’administration de la SNCF.
Rude en affaire, Mireille Faugère ? Les qualificatifs ne manquent pas à son sujet. Les syndicalistes des chemins de fer la décrivent tour à tour comme efficace, travailleuse, exigeante, compétente, brillante. Pour le côté flatteur. Mais « Mireille », comme on l’appelle dans son ancienne maison, passe aussi pour quelqu’un de raide, autoritaire, inflexible. Une femme de caractère aux idées arrêtées. Fille de cheminot, diplômée d’HEC, Mireille Faugère a débuté sa carrière en 1979 comme chef de gare, avant de gravir les marches une à une jusqu’à devenir le bras droit du PDG de la SNCF. Fine politique lorsqu’il s’agit de négocier un accord, mais sans accointance politique reconnue – elle aurait eu, dans sa prime jeunesse, sa carte au Parti socialiste –, Mireille Faugère était en quête d’un nouveau poste depuis le début de l’année. Ce sera donc l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP).
« Elle serait tombée chez IBM, ça ne m’aurait pas surpris. Mais là !, s’étonne un ancien responsable syndical de la SNCF. L’AP-HP est un des fleurons du service public. Ce n’est pas une valeur que porte Mireille. » Cet homme garde le souvenir de relations tendues : « Quand on a négocié les conditions de travail sur les centres d’appels de la SNCF, on s’est bagarré pour obtenir deux secondes supplémentaires de pause entre deux appels. Mireille était regardante à la seconde près! » Mireille Faugère s’est également attiré l’inimitié de ses équipes lorsqu’elle a transféré le siège de la SNCF à la Défense – un dossier sensible qu’elle retrouve sur le haut de la pile à l’AP-HP. « Elle n’était pas aimée comme chef directe, mais était appréciée des syndicats qui ont vu en elle un adversaire de qualité », résume un ancien administrateur de la SNCF.
Arnaud Morvan, secrétaire général de la CFDT cheminots, regrette déjà « Mireille ». « Avec elle, c’est oui ou non. On ne tourne pas autour du pot. Elle a sa feuille de route et elle la tient, elle n’est pas facile, mais elle sait écouter ». Arnaud Morvan en a fait l’expérience lorsqu’il s’est agi de faire évoluer le système de distribution de la SNCF, un dossier bouclé en cinq ans au lieu des deux ans prévus initialement. Ou lorsqu’il a fallu supprimer des postes de vente : « Mireille, qui avait commencé par proposer 3 000 suppressions, a su revoir sa copie après avoir constaté que ses statistiques n’étaient pas bonnes. On a évité la coupe sombre. »
Partie de plaisir.
Mireille Faugère quitte son sérail pour le premier CHU de France. Six milliards d’euros de budget annuel, 72 000 salariés en ébullition et 16 000 médecins tout aussi remontés, prêts, pour un millier d’entre eux, à démissionner de leur chefferie de service pour protester contre les suppressions de postes à venir. Le grand écart ? « Elle saura s’adapter », estime Bernard Aubin, secrétaire général de la CFTC cheminots. « Je suis persuadée qu’elle connaît son dossier par cœur et qu’elle a déjà pris plein de contacts, commente Marie-Pierre Acare, qui a été la secrétaire particulière de Mireille Faugère durant quatorze années. Cela ne va pas être une partie de plaisir, mais je lui fais confiance. C’est une femme solide et déterminée ».
D’aucuns voient en Mireille Faugère une nouvelle Rose-Marie Van Lerberghe, patronne de l’AP-HP de 2002 à 2006. Les médecins parisiens, d’abord refroidis par ce transfert en provenance de Danone, s’étaient acclimatés à ce profil atypique. Aujourd’hui, l’heure est à la prise de contact. A l’instar du Pr Pierre Coriat, le président de la CME de l’AP-HP, qui, dans un courrier posté mercredi matin, propose à Mireille Faugère « une nouvelle donne intégrant une refonte de l’identité hospitalière, et une place affirmée de la CME et de son président, dans les décisions et dans la conduite et le suivi du projet médical ».
Mireille Faugère connaît les terrains minés. Saura-t-elle déjouer les chausses-trappes qui ne manqueront pas de se dresser sur sa route ? « Elle a du talent mais elle n’a pas le réseau. C’est un problème à l’AP-HP. Ça me rappelle Anne-Marie Idrac, arrivée à la SNCF avec une seule conseillère. Elle a eu sa planche savonnée, et personne pour la désavonner. Les syndicats de l’AP-HP ne vont pas la rater », pressent cette syndicaliste de la SNCF. Impatiente de voir comment « Mireille » va s’en tirer.
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