CHS (centres hospitaliers spécialisés), services de psychiatrie de CH (centres hospitaliers), UHSI (unités hospitalières sécurisées interrégionales), UMD (unités pour malades difficiles), UMJ (unités médico-judiciaires) ou encore IPPP(infirmerie psychiatrique de la préfecture de police de Paris) : dans la plupart des 21 établissements visités l’an dernier par le contrôleur général des lieux de privation de liberté, Jean-Michel Delarue, c’est le même constat : « Un grand nombre de patients passaient la majeure partie de leur journée dans la salle de vie, passifs devant la télévision, sans même faire le choix d’un programme. »
Le planning des activités proposées aux patients n’est qu’exceptionnellement affiché dans les unités de soins. Aucun registre mentionnant l’exercice de telles activités n’est tenu. Certes, quelques unités font des efforts d’animation, mais elles restent restreintes à des jeux de cartes, à des jeux de société, ou à la pratique du baby-foot. Exceptionnellement, un établissement (le CHS de Clermont-Ferrand) propose un atelier de peinture animé par une art-thérapeute et une chorale. Un centre social (CHS d’Étampes) organise des activités de musicothérapie, jardinage, modelage, créations artistiques et atelier cuisine. Si trois établissements sur quatre disposent en outre d’une cafétéria, son accès n’est généralement pas autorisé aux patients hospitalisés sous contrainte. Deux CHS ont bien une bibliothèque, mais une minorité de patients seulement ont le droit de s’y rendre.
Globalement, la seule activité commune reste donc la salle de télévision. On ne s’étonnera pas dans ces conditions que « les patients aient à maintes reprises exprimé aux contrôleurs qu’ils s’ennuient ».« Le manque d’activité génère ce sentiment, analyse le rapport, qu’il ne faut certes pas confondre avec la tendance au repli qui fait partie intégrante de l’état pathologique. Ce dernier ne doit pas davantage masquer la réalité du sentiment engendré par l’inoccupation. »
Pour M. Delarue, l’absence de salles dédiées et de matériel nécessaire ne saurait expliquer cette situation. Car les locaux et leurs équipements existent, assure-t-il, qui demeurent sous-utilisés. En fait, c’est le « manque de personnel spécialisé » qui semble en cause, alors que « les responsables administratifs et médicaux n’en font pas une priorité. Les personnels soignants signalent pour leur part le manque de temps qu’ils peuvent consacrer aux activités du fait de leurs autres taches ». Ils se plaignent de ne pas avoir reçu de formation spécifique et se déclarent favorables au recrutement d’ergothérapeutes, ou d’animateurs.
Les médecins seraient également en cause : « Ils ne considéraient les activités que comme des occupations servant à gérer la vie quotidienne des unités et ne les valoriseraient guère dans leur projet thérapeutique. Or, insiste le rapport, l’ergothérapie, les activités occupationnelles ou thérapeutiques doivent faire partie intégrante du projet de soins d’un patient hospitalisé, y compris sous contrainte. »
Entraves.
Au fil de leurs visites, les contrôleurs ont aussi listé diverses pratiques à leurs yeux problématiques chez les détenus hospitalisés. En application de l’interdiction de fumer, des patchs antitabac sont proposés aux patients, mais « cette situation génère des tensions, d’autant que, contrairement aux personnes hospitalisées libres, les patients détenus n’ont accès à aucun espace extérieur ». Les procédures d’extractions continuent d’être dénoncées : « Des patients indiquent que le recours aux entraves est systématique et que les surveillants peuvent être présents dans le bloc opératoire lors de l’intervention, y compris lorsque le patient détenu est porteur d’entrave et sous anesthésie générale. »
Enfin, la suspension de peine pour raison médicale reste limitée, avec des délais d’expertise souvent très long (plus d’un mois), y compris dans le cas des patients en fin de vie. Lors de sa visite à l’UHSI rattachée à l’hôpital Nord de Marseille, les contrôleurs ont constaté la présence d’un patient mourant. Le rapport relève que cette unité a connu 21 décès en deux ans.
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