Aux universités d’été de l'ANAP

L’hôpital à l’heure des médecins managers

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Publié le 13/09/2018
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« "J’ai fait des études de médecine pour m’occuper des patients, pas pour devenir un manager !" Ce discours, je ne l’entends presque plus à l’hôpital, se réjouit Gilles Potel, chef du service des urgences du CHU de Nantes. À ceux qui le tiennent encore, je conseille d’aller exercer tout seul. »

Chef de service ou de pôle, président de commission médicale d'établissement… Les fonctions managériales des médecins dans la gouvernance hospitalière ont fait l'objet d'une table ronde, la semaine dernière à Bordeaux, des universités d’été de l’Agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux (ANAP). Les prises de paroles ont montré une évolution des mentalités.

« En 28 ans d’hôpital, j’ai vu se rapprocher des logiques qui s’opposaient, confirme Frédéric Boiron, président de l’Association des directeurs d'hôpital (ADH) et directeur du CHU de Lille. Désormais, les décisions sont partagées, collégiales. Le temps où les médecins considéraient l’argent dans la santé comme sale, et le soin pur, est révolu ».

Et ces praticiens ont acquis de nouvelles compétences : « Ils sont animateurs, gestionnaires, capables de lire un EPRD [état prévisionnel des recettes et des dépenses, NDLR], un statut, un contrat, un business plan, pour mieux dialoguer avec l’institution », explique le Dr Francis Fellinger, cardiologue et conseiller général des établissements de santé à l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS). 

Coaching

La double casquette médecin/manager ne va pas sans souffrance : « Il peut y avoir dichotomie entre valeurs médicales apprises à la fac et la réalité du terrain, souligne encore le Dr Francis Fellinger. On se sent parfois comme le "collabo" de l’administration. D’où la nécessité d’un accompagnement, encore trop sous-estimé. » L'ANAP ou le centre national de gestion (CNG, qui gère les carrières hospitalières)proposent à ce titre des formations aux techniques managériales, mais aussi du coaching, afin de libérer la parole, exprimer et confronter les vécus, prendre du recul.

Les participants ont enfin affirmé la nécessité de renforcer l’appétence des fonctions managériales, en limitant le poids des normes et de la paperasse, en osant l’intéressement ; par exemple, en reversant à un service une partie des économies qu’il a réalisées. « La responsabilité peut aussi se rémunérer, suggère Frédéric Boiron. Ce n’est pas tabou ! » Des suggestions qui nourriront peut-être les réflexions sur l'hôpital d’Agnès Buzyn, présente en ouverture de cette journée.

 

 

 

 

De notre correspondant Patrice Jayat

Source : Le Quotidien du médecin: 9685