Charge de travail, lieu de souffrance, déni

L'hôpital, terreau fertile des risques psychosociaux

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Publié le 26/06/2017
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Crédit photo : SEBASTIEN TOUBON

« Les employeurs de la fonction publique pensent toujours qu'on est mieux chez eux que dans le privé. C'est du déni de situation. »

François Cochet a mis les pieds dans le plat, la semaine dernière, à l'occasion d'une conférence sur les risques psychosociaux (RPS) dans le secteur public, lors du salon Préventica à Paris. Le président de la fédération des intervenants en risques psychosociaux (FIRPS, 500 consultants en prévention) a analysé les raisons pour lesquelles le secteur public (5,6 millions de salariés dont 1,1 à l'hôpital) est un terreau fertile pour la souffrance au travail, le stress, la violence, le burn-out ou même le suicide.

L'image d'Épinal de l'agent heureux de ses missions et d'un secteur protecteur et apaisé freine la mise en place de politiques de prévention. Les personnels eux-mêmes, comme les pompiers ou les infirmières, ne sont pas suffisamment préparés à la violence, convaincus que leur métier est auréolé d'une excellente image dans l'opinion.

La quête incessante d'économies conjuguée à la pression sur les résultats laissent des traces. « Le mythe de la sécurité de l'emploi se confronte à l'insécurité économique et la précarité des contractuels, analyse François Cochet. Certains employeurs tentent d'appliquer les recettes de management toutes prêtes du privé pour améliorer la situation, trop vite, sans préparation des équipes. Cela pose de nouveaux problèmes. » La charge de travail et les contraintes réglementaires ajoutent au malaise. 

Sabotage 

François Cochet estime également que la prise en compte des « exigences émotionnelles » à l'hôpital (mais aussi en prison ou dans les commissariats) c'est-à-dire « faire bonne figure dans un lieu de souffrance », constitue « un très gros sujet » de prévention des risques psychosociaux. 

Autre point noir : « le sujet tabou des saboteurs qu'on ne peut pas virer » et qui mènent la vie dure aux personnels. En tant que directeur des activités de santé au travail du cabinet de conseil Secafi, François Cochet a rencontré plusieurs médecins hospitaliers de cette engeance. « Ils sont certes exposés aux risques psychosociaux mais aussi "exposants", en partie par manque de sensibilisation au problème, explique-t-il. Par exemple, Ils ne se rendent pas compte que le non-respect des horaires handicape des services entiers ». Le statut des praticiens les place à part dans l'hôpital. « Les médecins se retrouvent parfois dans l'incompréhension, voire dans le refus d'intégrer des logiques d'organisation du travail propre à la fonction publique. » Au risque de s'isoler, d'en souffrir ou de reporter leur aigreur sur autrui. 

 

 

 

 

A.B.-I.

Source : Le Quotidien du médecin: 9592