C'est une réforme macronienne qui pourrait changer un peu les règles de la gouvernance sanitaire. L'exécutif entend donner davantage de liberté d'action et d'autonomie aux territoires, avec certaines décisions « à la carte » en matière de santé. Un décret a été publié en ce sens sur le droit de dérogation aux normes pour les directeurs généraux d'agence régionale de santé (ARS), « pour un motif d'intérêt général ». Le texte autorise chaque patron d'ARS à prendre des arbitrages dérogeant à la réglementation en vigueur (mais pas à la loi) sous certaines conditions et si des circonstances locales le justifient.
Installation d'IRM, maintien de service
Lors de sa récente visite chahutée du CH de Rodez, Élisabeth Borne a expliqué que le gouvernement souhaitait effectivement donner plus de marges de manœuvre aux ARS pour adapter les règles à la réalité de chaque zone géographique. Il pourra s'agir par exemple « d’installer plus de scanners ou d’IRM dans un territoire même si ce n’est pas les règles nationales car le territoire en a besoin » ou encore de « maintenir un service de chirurgie ambulatoire (...) parce que cela répond aux besoins du territoire », a illustré la cheffe du gouvernement.
De fait, le décret qui instaure ce « droit de dérogation » du directeur général d'ARS définit un champ d'intervention large allant de la veille sanitaire à l'évaluation des formations des professionnels de santé, en passant par les autorisations en matière de création et d'activités des établissements de santé ou encore la « mise en œuvre d'un service unique d'aide à l'installation des professionnels de santé ».
Seul impératif, ces dérogations devront être justifiées par « un motif d'intérêt général et l'existence de circonstances locales » et avoir pour effet « d'alléger les démarches administratives, de réduire les délais de procédure ou de favoriser l'accès aux aides publiques et notamment aux financements accordés par l'ARS ». Un bilan national sera réalisé au moins une fois par an.
Labelliser plus vite les hôpitaux de proximité
Le ministère de la Santé a rappelé le contexte et les enjeux de cette réforme. Sur le modèle du droit de dérogation déjà accordé aux préfets depuis 2020, des expérimentations ont été conduites depuis cinq ans sur la possibilité de conférer aux DG des ARS ce droit identique (sur un nombre limité de sujets). « Ces expérimentations ayant donné satisfaction, le gouvernement a décidé de généraliser le droit de dérogation pour les ARS, sur un périmètre large de leurs compétences », explique Ségur. Ce droit sera activé « au cas par cas, en réponse à un besoin particulier » pour débloquer une situation, accélérer une procédure ou encore simplifier une démarche.
Par exemple, les patrons des ARS pourront simplifier d'autorité les cahiers des charges imposés dans certaines procédures comme la labellisation des hôpitaux de proximité, l'organisation de la permanence des soins (PDS) ou l’appel à projets dans le secteur médico-social. Ils pourront aussi accélérer la mise en œuvre de solutions locales identifiées dans le cadre du CNR santé. De plus, « une dérogation accordée en réponse à une circonstance particulière devra ainsi être accordée à d’autres situations présentant des circonstances similaires », ajoute le ministère. L'objectif affiché est d'identifier les « rigidités », les « sources de complexité » et les « normes mal adaptées » afin de donner des marges de manœuvre aux acteurs opérationnels de terrain. Du grain à moudre pour les ARS…
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