La bataille des chiffres entre le Syndicat national des médecins remplaçants hospitaliers (SNMRH) et le ministère gagne en intensité. Selon l'organisation, 365 services seraient fermés ou en « fonctionnement dégradé », trois semaines après la mise en application de la loi Rist qui encadre strictement la rémunération de l’intérim médical.
365 SERVICES FERMÉS ou en FONCTIONNEMENT DÉGRADÉ suite à l’application de la loi #rist il y a 3 semaines.
— SNMRH (@cdmrehp) April 24, 2023
Notre liste des services en crise mise à jour le 23 Avril : 300 services de plus en 7 jours!@FrcsBraun y a t’il un pilote dans l’avion?
La liste complète en com? pic.twitter.com/9utsrQLFG2
Huit jours après avoir annoncé que 70 services étaient fermés ou en difficulté - des chiffres démentis par le ministère - le SNMRH estime que 300 services supplémentaires seraient « en crise », qu’il s’agisse de centre ou services « fermés et/ou ayant été fermés totalement ou partiellement » ou de services « perturbés avec une réduction significative d’activités ». Si la plupart des établissements concernés sont des centres hospitaliers, des CHU feraient désormais aussi partie de la liste des services : AP-HP, AP-HM, CHU de Grenoble, Rennes, Brest, Saint-Étienne, Martinique…
Contacté par « Le Quotidien » en fin de semaine dernière, le Dr Thierry Godeau, patron de la conférence des présidents de commission médicale d’établissement (CME) de CH estimait de son côté qu’il y avait « entre 20 à 30 services en très grande difficulté, voire fermés ». Ce qui n'empêche pas, en outre, « de nombreux services de fermer ponctuellement durant quelques jours ». Selon lui, la situation est « moins grave qu’on ne le craignait, mais il est possible que les difficultés perdurent et de façon perlée ».
Certaines régions semblent plus concernées que d’autres, à l’image de la Bretagne où tous les départements sont touchés, selon le SNMRH : les Côtes-d'Armor (CH de Guingamp, Loudéac, Saint-Brieuc, Lannion, Morestel…), le Finistère (CHRU de Brest, CH de Carhaix, Morlaix, Douarnenez, Landerneau…), l’Ille-et-Vilaine (CHU de Rennes, CH de Redon, Simone Veil…) et le Morbihan (CH Centre Bretagne, Bretagne-Atlantique, Charcot…). Comme à Noyal-Pontivy, où les urgences sont fermées la nuit du 18 avril au 1er mai.
Pays de la Loire, Rhône-Alpes et Normandie
La situation est également particulièrement tendue dans les Pays-de-la-Loire (Sarthe, Vendée, Mayenne, Loire-Atlantique…), en Rhône-Alpes (Loire, Allier, Drôme, Rhône, Cantal…) ou en Normandie (Seine-Maritime, Eure, Manche…). Font partie des établissements cités par le SNMRH : le CHU de Grenoble, où les syndicats ont fait un signalement auprès du procureur de la République pour mise en danger de la santé d’autrui.
Dans la Loire, 1 200 personnes se sont rassemblées ce samedi devant l'hôpital de Feurs pour protester contre la fermeture des urgences et du Smur depuis début avril. Dans cet établissement, « la moitié des 10 médecins des urgences sont des intérimaires qui n'acceptent pas le plafonnement de leur rémunération imposé par la loi Rist entrée en vigueur le 3 avril », rapporte « Le Figaro ».
Selon le SNMRH, l’Île-de-France ne serait pas épargné, qu’il s’agisse de la Seine-Saint-Denis (CH Avicenne, CHI Robert Ballanger…), du Val-de-Marne (Henri-Mondor (AP-HP), CH de Fresnes…) ou des Hauts-de-Seine (hôpital Foch). À Aulnay-sous-Bois (CHI Robert Ballanger…), les urgences ont fonctionné en mode dégradé ce week-end en raison d'un manque de médecins. Des délestages sont également prévus toutes les nuits jusqu’au 2 mai.
« Le ministère ment »
Contacté par « Le Quotidien », le Dr Christophe Prudhomme, rappelle qu’il s’agit de « l’hôpital de référence de Roissy, l’un des plus gros services d’urgences d’Île-de-France ». Interrogé sur les dernières remontées du syndicat, le porte-parole de l'Association des médecins urgentistes de France (Amuf) estime que « les chiffres du SNMRH sont sûrement assez proches de la réalité ». Cela signifie selon lui que « c’est le ministère qui ment ».
Selon l’urgentiste du Samu 93, le gouvernement profite de la mise en application de la loi Rist pour fermer des services et des hôpitaux : « la volonté cachée du gouvernement, c’est de fermer 150 hôpitaux situés dans les villes moyennes ». Si François Braun a mis en œuvre « brutalement » la réforme de l’intérim médical, c’est parce qu’il souhaite « transformer rapidement 150 établissements en hôpitaux de proximité » dans le cadre de « Ma Santé 2022 », estime le Dr Christophe Prudhomme.
Le porte-parole de l’Amuf croit savoir que « des consignes sont données aux directeurs d’hôpitaux pour fermer des services définitivement, comme c’est le cas à l’hôpital Feurs ». Dans cet établissement, l’entrée en vigueur de la loi Rist aurait été « le prétexte choisi par le directeur pour annoncer la fermeture définitive des urgences », considère le Dr Prudhomme, persuadé que les fermetures de services actuelles sont le « signe annonciateur d’un effondrement brutal de notre système de santé ».
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