LE QUOTIDIEN : D'où vient l'idée des hôtels hospitaliers ?
Pr JEAN-PIERRE BETHOUX : L'Hôtel-Dieu (AP-HP, où j'étais chef de service) et le centre de lutte contre le cancer Gustave Roussy ont été pionniers dans les années quatre-vingt-dix en proposant ce dispositif aux patients venus de loin et dans certaines spécialités (ophtalmologie, hématologie). Dans les années 2000, le développement de la chirurgie ambulatoire (esthétique, gynécologique, thoracique et digestive) a contribué au déploiement de cette prise en charge alternative dans la culture médicale. L'expérimentation des hôtels hospitaliers a été votée dans le budget Sécu 2015. Mais 2019 est la première année d'évaluation. L'enjeu est de les généraliser et de les pérenniser par un article de loi, par décret ou dans le budget Sécu 2021.
Tous les patients peuvent-ils y prétendre ?
On peut envisager un recours à l'hôtel hospitalier dans toutes les disciplines médicales et chirurgicales, sans exception, pour un séjour intégré dans le parcours de soins. Le patient doit être autonome, cognitif, déperfusé et peu algique. Selon moi, un lit hospitalier sur trois peut être transféré en hôtel hospitalier ! C'est une solution pratique pour éviter qu'un patient fatigué par une radiothérapie trois à quatre fois par semaine aille battre la campagne. C'est aussi bien pour son confort que pour la qualité des soins prodigués. On l'éloigne des zones d'infections nosocomiales tout en le gardant à portée en cas de besoins médicaux.
Comment embarquer les médecins ?
Nous sommes face à un changement de paradigme majeur : le soin est désormais dissocié de l'hôtellerie, chose impensable auparavant ! Les hôtels hospitaliers apportent plus de souplesse dans la gestion des lits conventionnels et en aval des urgences, c'est un atout médical indéniable. S'en rendre compte réclame de ne plus raisonner en taux d'occupation des lits conventionnels mais en parcours de soins dépassant les murs de l'hôpital, incluant les hôtels hospitaliers et le domicile. Les jeunes médecins l'ont totalement assimilé. Après la chirurgie et l'anesthésie mini-invasive, voici l'hospitalisation mini-invasive ! Cette évolution ne pourra avoir lieu sans la communauté médicale.
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« Un lit sur trois est transférable en hôtel hospitalier »
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