Une situation sanitaire plus que jamais fragile

Publié le 19/01/2010
Article réservé aux abonnés
1276109046F_600x_121175_IMG_27243_1263962977582.jpg

1276109046F_600x_121175_IMG_27243_1263962977582.jpg
Crédit photo : AFP

« PORT-AU-PRINCE ressemble à ce que Tokyo devait probablement être après la deuxième guerre mondiale. Tout est aplati. C’est comme si une bombe atomique avait explosé », décrit l’ambassadeur des États-Unis en Haïti, Kenneth Merten. Mais les secours s’organisent, même si les équipes dépêchées sur place se heurtent encore à de nombreuses difficultés. Les avions des Médecins sans frontières ont finalement pu se poser. L’association se plaignait samedi qu’un avion-cargo transportant un hôpital chirurgical gonflable n’ait pas été autorisé à atterrir à Port-au-Prince, malgré les autorisations données par les Nations unies et le Département de la Défense des États-Unis. Le matériel a finalement pu être convoyé par camion à partir de Saint-Domingue, ce qui a eu pour conséquence de prolonger les délais d’acheminement.

« Trois blocs opératoires fonctionnent aujourd’hui, dont deux sur l’hôpital de la Trinité, un centre de traumatologie où nous travaillions déjà, précisait lundi au « Quotidien » le Dr Brigitte Vasset, du département des opérations médicales, et dont un des centres s’est effondré. Les équipes de MSF ont été mises à rude épreuve. L’association compte plusieurs décès parmi les 800 personnels nationaux qui ont subi le tremblement, de terre, dont un chirurgien orthopédiste, une infirmière anesthésiste et une hygiéniste. « Et nous sommes encore sans nouvelles d’une partie du personnel et des malades », poursuit le Dr Vasset . Ces décès viennent s’ajouter aux 70 000 victimes recensées par le gouvernement haïtien et aux 13 000 cadavres collectés par l’ONU (MINUSTAH).

Eau et électricité.

Les nouvelles équipes, une fois au complet, devraient intervenir non-stop 24 heures sur 24 par groupes de six chirurgiens et six anesthésistes. Le bon fonctionnement de ces structures dépendra de l’approvisionnement en eau et en électricité. « Avant le séisme, l’approvisionnement en eau à Port-au-Prince était déjà précaire, essentiellement fourni par des camions citerne. Nous avons pu en récupérer mais nous ne savons pas combien de temps cela va durer », souligne le Dr Vasset.

Aux côtés de MSF, plusieurs structures sont déjà opérationnelles ou vont l’être, des hôpitaux montés par des équipes israéliennes, russes, portugaises, colombiennes ou américaines (porte-avions américain). Des milliers de blessés attendent une intervention. « Il s’agit essentiellement de fractures ouvertes et d’amputations, précise le médecin de MSF. Nous avions prévu surtout de la traumatologie mais nous devons satisfaire aussi les besoins en chirurgie ordinaire, comme les césariennes par exemple ». L’association Care estime d’ailleurs à environ 37 000, le nombre de femmes enceintes directement touchées et nécessitant en urgence de l’eau potable, de la nourriture et des soins médicaux.

Rougeole et tétanos.

La situation sanitaire se fragilise. « Il y a à la fois le problème des blessés mais aussi celui des personnes déplacées qui ressemble à ce que l’on peut voir à la suite d’un conflit », témoigne de Dr Vasset, à MSF depuis plus de vingt ans. Comme dans les cas de regroupements de personnes, diarrhées et infections respiratoires sont à redouter. « La situation sanitaire à Haïti était déjà précaire. On sait que la couverture vaccinale était faible, notamment la rougeole. On sait aussi qu’il y a eu l’an dernier une épidémie de diphtérie. Il faut se préparer et être très attentifs aux premiers cas à potentiel épidémique, de façon à réagir rapidement », ajoute-t-elle. Autre crainte suscitée par l’insuffisance de la couverture vaccinale, celle du tétanos : « Des cas de tétanos de l’adulte mais aussi de tétanos néonatal étaient déjà observés. Il faudrait que tous les blessés bénéficient d’immunoglobulines et d’une vaccination antitétanique », rappelle-t-elle. Pour cela, la chaîne du froid, en particulier, devra être assurée.

 Dr LYDIA ARCHIMÈDE

Source : Le Quotidien du Médecin: 8690