Pour les patients de plus de 75 ans hospitalisés après un passage aux urgences, une nuit passée sur un brancard aux urgences augmente de près de 40 % le risque de mortalité hospitalière, qui passe ainsi de 11,1 % à 15,7 %.
Annoncés en juin lors du congrès annuel Urgences 2023, les résultats (identiques) de l’étude « No Bed Night » ont été publiés dans la revue JAMA Internal Medicine, le 6 novembre. Pour la première fois, « la preuve scientifique d’une surmortalité chez ces patients est apportée », indique le communiqué de presse.
Coordonnées par le Pr Yonathan Freund (AP-HP) et la Dr Mélanie Roussel (UFR santé de Rouen, Université de Rouen Normandie), les équipes de l’AP-HP, de l’Inserm et de Sorbonne Université ont étudié la mortalité des patients âgés ayant passé une nuit aux urgences sur un brancard en attendant une place d’hospitalisation. L’étude s’est déroulée du 12 au 14 décembre 2022, dans 97 services d’accueil des urgences en France, incluant un total de 1 598 patients de plus de 75 ans hospitalisés après passage aux urgences.
« Si tous les patients de cette étude avaient pu être admis avant la nuit dans une chambre d’hospitalisation, 3% des décès auraient pu être évités », illustre l'étude.
L'échantillon utilisé est « représentatif des services d’urgences en France, ce qui fait la force de ces résultats », explique au Quotidien la Dr Roussel. Les études précédentes étaient « rétrospectives, avec des biais, et pas d’aussi grande ampleur ». Si celles-ci « sous-tendaient un plus grand nombre d’effets indésirables et une plus grande mortalité pour cette population [les personnes âgées, NDLR], elles ne s’intéressaient pas toutes à la population gériatrique », précise l’urgentiste du CHU de Rouen.
Priorité aux personnes âgées
Les personnes âgées représentent pourtant « un quart des consultations dans les services d’urgences. Pour elles, le fait de rester dans un service d’urgences est extrêmement délétère », observe la Dr Roussel. Un effet confirmé par le risque d’apparition de complications durant l’hospitalisation (infections nosocomiales, chutes, saignements, …), précise l’étude.
Cette surmortalité chez les personnes âgées signifie que l’on doit « être extrêmement vigilant avec ces patients-là qui doivent être prioritaires sur les lits d’hospitalisation », alerte-t-elle encore. L’étude considère d’ailleurs que l’objectif de « zéro lits brancards » aux urgences, en particulier pour les patients de plus de 75 ans, « doit être considéré comme un objectif de santé publique ».
Interrogée sur le sujet, l’urgentiste du CHU de Rouen admet qu’il n’y a « pas de solution magique, car c’est un problème multifactoriel ». Qu’il s’agisse de « la médecine de ville qui est parfois défaillante » ou de « l’aval qui dysfonctionne » : fermeture de services, lits non disponibles, etc.
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