Pass-L. AS : confrontés à une réforme trop complexe, les doyens réclament une seule voie d’accès par université

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Publié le 16/09/2024
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Quatre ans après l'entrée en vigueur de la réforme très contestée de l'accès aux études de santé, la Conférence des doyens entend « simplifier » le système et le rendre « plus lisible ». À la surprise générale, elle préconise que chaque université opte soit pour un accès exclusivement via le Pass, soit via la L.AS.

Crédit photo : BURGER/PHANIE

L'heure est au bilan pour la Conférence des doyens. Quatre ans après l'entrée en vigueur de la réforme de la Paces, qui a introduit deux nouvelles voies d'accès aux études de santé (le Parcours d'accès spécifique en santé – Pass, et la Licence accès santé – L.AS), le moment est venu de procéder à sa « relecture ».

« Cette réforme a fait couler beaucoup d'encre ces dernières années, a d'emblée admis le Pr Benoît Veber, lors d'un point presse de rentrée jeudi 12 septembre. [Ce nouveau système] est perçu très négativement par les étudiants et leurs familles en raison de sa grande complexité et de ses modalités d'admission jugées illisibles. »

Système illisible

Dévoilant les premiers enseignements d’un rapport de la Cour des comptes – qui se penche depuis plusieurs mois sur la réforme du premier cycle des études de médecine –, le doyen des doyens a souligné que le principal problème du système actuel résidait dans la « cohabitation » au sein d’une même université « de plusieurs modalités d'admission ».

La logique d’apprendre le coréen pour devenir médecin n’est pas évidente

Pr Benoît Veber, président de la Conférence des doyens

Pour l’instant, les étudiants de Pass et de L.AS peuvent en effet suivre leur première année au sein d’une même université, ce qui est source, selon l’anesthésiste-réanimateur, « d’incompréhensions fortes » et parfois de « comparaisons » : « Les étudiants issus de la filière L.AS ont une perception négative de leur formation, ce qui entraîne une dévalorisation inutile et inacceptable de leur formation. Le taux de redoublement dans cette filière est d’ailleurs plus élevé que chez les étudiants en Pass », a-t-il appuyé.

Vers un système soit tout L.AS, soit tout Pass

Pour remédier à ces faiblesses, des propositions d'amélioration de la réforme devraient être présentées à l'automne par les doyens, « dès qu'un ministre de l'Enseignement supérieur sera nommé », précisent-ils. Le Pr Veber assure d’ailleurs que « ce dossier sera en haut de la pile du bureau du ministère » et promet, dans le même temps, « plusieurs axes forts » pour réviser la réforme.

Parmi les suggestions d’amélioration, figure la proposition d'adopter un système uniforme : soit exclusivement Pass, soit exclusivement L.AS dans chaque université en première année uniquement. Le Pr Benoît Veber recommande cette approche afin de garantir qu'il n'y ait qu'un seul chemin d'accès aux études de santé par établissement et « pour éviter la compétition entre les étudiants des différentes filières ». En pratique, cela signifie que les universités qui choisiront de conserver leur Pass ne pourront pas offrir de L.AS 1, et inversement. Cependant, les étudiants échouant en Pass auront la possibilité de se réorienter vers L.AS 2 pour tenter une nouvelle fois leur chance, et ce dans la même université.

Restreindre l’offre de L.AS et revoir le système d’inter-classement

Pour les universités qui décideraient de conserver leur filière L.AS, le doyen des doyens recommande de limiter les options disponibles. « Il est très important de maintenir une cohérence entre la discipline majoritaire de la L.AS et la formation en santé. À Paris Cité, il y a par exemple une L.AS coréen. La logique d’apprendre le coréen pour devenir médecin n’est selon moi pas évidente, juge-t-il. Je pense qu’il ne faut pas multiplier à l’infini les L.AS, celles-ci doivent être alignées avec les objectifs professionnels des étudiants », maintient-il. Attention toutefois à ne pas déséquilibrer les effectifs au sein des filières : « Si demain on supprime la Pass d’une faculté, les L.AS de sciences ne pourront évidemment pas absorber tous les étudiants de Pass ! », avertit-il.

En ce qui concerne l’interclassement des L.AS – nécessaire pour départager les étudiants des différentes licences – le Pr Benoît Veber appelle une révision complète du processus. « Pour l’instant, c’est trop complexe et source d’incompréhensions. Nous suggérons que les étudiants ayant validé leur L.AS et souhaitant postuler au concours passerelle soient classés sur la base d'une épreuve unique et commune qui serait l’UE santé ».

Volume d’enseignements identiques à tous

Pour garantir à tous des chances égales de réussite au concours, l’UE santé devra être « étoffée » pour l’ensemble des L.AS. « Le corpus de connaissances et le volume d’enseignement en santé doivent être uniformes pour tous les candidats », affirme le Pr Benoît Veber.

Il constate actuellement une « grande hétérogénéité » au sein des promotions de deuxième année. Finalement rien de surprenant quand « les étudiants de Pass cumulent environ 400 heures de formation en matières biomédicales, tandis que les L.AS n'en comptent pas plus de 100… ».

Les sages de la rue de Cambon, qui s’interroge depuis plusieurs mois sur la réforme de l’accès aux études de santé, devraient rendre public leur rapport dans les prochaines semaines.

En décembre, le Conseil d’État avait accordé six mois au gouvernement pour revoir les modalités d’admission en deuxième année, en raison de l’iniquité des épreuves orales. Le gouvernement a finalement révisé la réforme en uniformisant les oraux à l’échelle nationale et en clarifiant leur pondération. Preuve que, pour l’instant, les fondations de cette réforme sont encore très mouvantes et sont loin de faire l’unanimité…


Source : lequotidiendumedecin.fr