Le bras de fer aura été de courte durée. Réunie mardi soir, l'intersyndicale regroupant les six organisations représentatives des médecins libéraux (CSMF, MG France, FMF, SML, Avenir Spé-Le Bloc et UFML-S), les étudiants et internes (Anemf, Isnar-IMG, Isni, Jeunes Médecins et Reagjir) et l'association Médecins pour demain a suspendu son mouvement de grève lancé le 13 octobre.
Cette décision a été prise de façon « unanime », assure le Dr Philippe Cuq, chirurgien vasculaire, porte-parole de l'intersyndicale. Les syndicats ont pris acte positivement de la publication de la lettre de cadrage adressée par Aurélien Rousseau à Thomas Fatôme pour relancer les négociations conventionnelles avec la profession, dans un nouvel état d'esprit.
Garder des forces
Ce courrier est « fait dans un esprit de soutien à la médecine libérale », justifie le chirurgien toulousain, rappelant que l'intersyndicale reste « vigilante » et la capacité de mobilisation « intacte ». « Nous devons garder un peu de force et d'énergie pour la suite des événements », confie-t-il, alors que la journée de grève du vendredi 13 a mobilisé, de façon très variable, 60 % environ de praticiens libéraux, selon les pointages de l'intersyndicale (non confirmés par l'Assurance-maladie).
Mais la prudence est de mise à la veille de l'ouverture du nouveau round. Selon le Dr Franck Devulder, président de la CSMF, « si la lettre de cadrage va dans le bon sens, on ne connaît absolument pas les moyens mis sur la table ». L'enveloppe réservée aux soins de ville, en hausse de 3,5 % pour 2024 selon le budget de la Sécu en cours d'examen, ne rassure toujours pas la profession. Certes, « il n'appartient pas à un ministre de dire dans sa lettre de cadrage que la consultation sera à 30 euros, ajoute le gastroentérologue de Reims. Mais si on se rend compte qu'il n'y a rien à négocier alors le mouvement social reprendra de façon plus dure ».
Progressivité, la nouvelle menace
Dans sa lettre de cadrage, sans donner explicitement le feu vert au tarif de 30 euros, Aurélien Rousseau entérine le principe d'une nouvelle augmentation, précisant toutefois que certaines « évolutions tarifaires pourront être progressives », sur toute la durée de la convention, soit cinq ans. Une façon de préparer les esprits que tout ne sera pas possible, tout de suite, dans un contexte financier contraint.
Pour le secrétaire général adjoint de MG France, le Dr Jean-Christophe Nogrette, « cette progressivité (tarifaire) ne peut pas concerner l'acte de base. Il faut une revalorisation de l'acte de base à 30 euros pour tout le monde et immédiatement ». Et de s'inquiéter déjà sur les marges de manœuvre de la Cnam. « On sait que ces négociations vont être très serrées car l'enveloppe est contrainte par l'Ondam. Il faut de l'argent pour les généralistes en grande difficulté mais aussi pour les spécialistes. Ça va être une bataille pied à pied. »
PPL Valletoux, pas d'interférences !
Un autre point de vigilance concerne les initiatives parlementaires. Concernant la proposition de loi Valletoux sur l'accès aux soins, véritable pomme de discorde, mais aussi d'autres textes législatifs, le ministre de la Santé a pris l'engagement que ces discussions n'affecteraient pas la procédure conventionnelle, qui doit rester « claire, respectueuse et apaisée ». Mais, objecte le Dr Philippe Cuq, « la menace reste importante car on ne connaît pas les amendements et les discussions qui vont se dérouler au Parlement ».
C'est aussi le sens du communiqué publié ce mercredi par l'Ordre des médecins, qui fixe ses lignes rouges, alors que la PPL de Frédéric Valletoux doit être examinée au Sénat à compter du 24 octobre. Aurélien Rousseau assure s'être « rapproché » du député Horizons, ex-patron de la FHF, pour que « les articles critiqués soient travaillés à une meilleure rédaction ». « L’article qui avait fait le plus réagir – celui sur l'adhésion automatique aux CPTS – est aujourd’hui mieux compris, assure-t-il dans un entretien au Quotidien. Je fais le parallèle avec les listes électorales, on est inscrit d’office mais on n’est pas obligé de voter. »
Préliminaires
Dès réception de la lettre de cadrage, Thomas Fatôme, directeur général de la Cnam, a confirmé son souhait d’engager rapidement les négociations. Des rendez-vous « en bilatérale » seront proposées à chaque syndicat, dès la semaine du 23 octobre, pour « échanger en amont sur les grands axes de cette lettre de cadrage et initier les conditions propices au dialogue », fait savoir la caisse ce mercredi au Quotidien.
Ces premiers échanges permettront de préparer les orientations votées par le conseil de l’Uncam, étape préalable à l’ouverture officielle des négociations, ajoute la Sécu. La date de présentation des orientations en conseil de l'Uncam « n’a pas encore été stabilisée ».
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