Horaires, statut : en Italie, le gouvernement s'attelle à la réorganisation de la médecine générale

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Publié le 22/09/2023
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Crédit photo : DR

Pas assez disponibles, pas assez à l’écoute. Pour renforcer le premier recours et garantir la continuité des soins, le ministre de la Santé, le Pr Orazio Schillaci, entend réformer (et bousculer) les conditions d'exercice et de travail des généralistes en Italie.

Selon le gouvernement, les assurés se plaignent de plus en plus de ne pas pouvoir bénéficier de la continuité des soins dans les centres de santé de proximité. Ils dénoncent en particulier le temps de travail des médecins de famille, jugé trop restreint. Des critiques évidemment récusées par la profession. « Je finis souvent de travailler vers 22 h, bien au-delà des heures assignées par mon contrat de travail, pour m’occuper de la partie administrative, des ordonnances, du transfert des documents à l’Assurance-maladie et de la gestion de mon cabinet », se défend le Dr Alessandro Sabatini, qui exerce à Rome. 

7 000 euros environ 

Dans le système italien, les généralistes salariés des centres sont encadrés par l’Assurance-maladie, sur la base d’une convention collective. Leur temps de travail varie en fonction de la patientèle (nombre de patients dont le médecin est déclaré en tant que médecin traitant et qui ne peut pas dépasser les 1 500 assurés). Un généraliste qui suit 1 500 patients doit travailler au minimum trois heures par jour et cinq jours par semaine.

Les visites à domicile ne sont plus obligatoires (sauf si l'état de gravité du patient l'exige). Le salaire (à la capitation) varie en fonction du nombre de patients. « Nous touchons 3 à 4,50 euros par mois par patient. Je suis 1 550 patients comme une grande partie de mes confrères pour un salaire brut de 7 000 € par mois » confie le Dr Sabatini. Sur ces bases, les généralistes doivent assumer la location de leur cabinet, les charges (électricité, gaz, téléphone, impôts, assurance privée, assistante, matériel médical, etc.).

Statut, horaires

Un système imparfait que le ministre de la Santé, le Pr Orazio Schillaci, spécialiste de médecine nucléaire, a décidé de réformer. Le projet implique en particulier un changement radical au niveau du statut et des horaires des médecins de famille.  

La convention telle qu'elle existe aujourd'hui avec la Sécu serait abolie et les généralistes des centres directement recrutés par le service public. Ce système entrerait progressivement en vigueur, l’idée étant de laisser la possibilité aux généralistes en exercice de basculer dans ce nouveau système de fonctionnariat ou de rester dans l’ancien. Le projet prévoit une semaine de travail de 38 heures comme pour les médecins hospitaliers, explique le Dr Macri, gynécologue urgentiste. Un temps de travail réparti en deux temps : au minimum 18 heures auprès des centres de santé, le reste dans leur cabinet.

Mais pour le Dr Emanuele Stramignoni, néphrologue turinois, membre de l’association nationale des médecins et des chirurgiens cadres (Anaao-Assomed), ce système d'horaires imposés minimum ne pourra pas fonctionner. « Comment un généraliste qui suit 1 500 patients pourra-t-il répartir son temps de travail entre les centres de santé et son cabinet ? », questionne-t-il. De surcroît, la sortie du système conventionnel vers un exercice plus contraint pourrait accélérer les départs programmés en retraite des généralistes, qui ne seront pas tous remplacés. « Les généralistes sont des médecins privés conventionnés qui peuvent exercer leur profession comme ils l’entendent notamment au niveau des horaires comme dans la plupart des autres pays européens, résume le Dr Stramignoni. Cette réforme est une utopie »

De notre correspondante, Ariel F. Dumont

Source : lequotidiendumedecin.fr