Réunis ce week-end à Arcachon pour leur 29e Université, les cadres de la CSMF n'ont pas caché leur colère et leur volonté d'en découdre. À quelques jours d'une grève libérale reconductible, qui embarque les six syndicats représentatifs mais aussi les internes, à partir du 13 octobre, beaucoup d'entre eux se disaient prêts à s'engager dans un mouvement « dur », échaudés par l'« aumône » de la hausse de la consultation du règlement arbitral (+1,50 euro) et toujours inquiets des réformes en cours (loi Valletoux, PLFSS).
Le relatif mea culpa d'Aurélien Rousseau dans son discours d'ouverture du congrès n’a pas calmé les esprits. « On nous a déjà demandé d'être des formateurs des internes, des coordinateurs d'équipes et maintenant on nous demande en plus d'être des managers d'assistants médicaux, d'IPA, sans donner de moyens pour le faire ! C'est impossible, la coupe est pleine », a lancé, très remonté, un cadre breton sous les applaudissements de ses confrères.
Urgences saturées ?
Un contexte lourd qui fait aussi enrager le Dr Luc Duquesnel, président des Généralistes-CSMF, particulièrement déterminé. « Il faut qu'on arrive à créer le chaos pour relancer les négociations, a carrément lancé le généraliste mayennais, dans un langage peu coutumier au sein de la Conf'. Quand on ferme les cabinets libéraux, les patients n'ont qu'une solution, c'est d'aller aux urgences… qui ne seront pas capables de les accepter. Mais le gouvernement n'entend que cela. »
Le généraliste a déjà supprimé tous ses rendez-vous du 13 au 20 octobre, suivi par ses trois confrères du pôle médical de Mayenne. Il rassemble via WhatsApp un « collectif de généralistes libéraux » de son territoire, y compris ceux engagés dans la désobéissance tarifaire. Ce mardi 10 octobre, il devait réunir le conseil d'administration de l'association de la permanence des soins (Adops) afin de programmer aussi la grève des gardes. « Si on arrête tout, il va falloir que l'ARS réquisitionne, avance-t-il. Normalement, les gendarmes amènent les lettres de réquisitions aux confrères qui sont dans les cabinets. Pour ceux qui ne le sont pas, ils vont devoir courir derrière eux… »
Dans l'Indre, sous l'impulsion de la Dr Sylvaine Le Liboux, secrétaire générale des Généralistes-CSMF, les omnipraticiens sont invités à arrêter leur activité dès le 13 octobre. La syndicaliste s'est organisée pour ne prendre aucun patient pendant une semaine. « J'ai renvoyé mes deux secrétaires à la maison et le mouvement est reconductible », dit-elle. Dans son territoire rural, la grève des gardes est aussi lancée. « Des généralistes dans trois secteurs de garde sur cinq ont déjà averti le conseil départemental de l'Ordre qu'ils feront grève samedi et dimanche », ajoute-t-il.
Faire remonter la colère
Côté spécialistes, le Dr Bruno Perrouty, président de la branche spé de la CSMF, ne mâche pas ses mots. « J'ai invité tous les spécialistes à bloquer leurs agendas en ligne et les prises de rendez-vous jusqu'à ce que nous soyons entendus. C'est le seul moyen de remonter notre colère », confie le neurologue libéral de Carpentras, même s'il est « compliqué d'arrêter l'activité en masse et de façon continue ». Selon le syndicaliste, la déprogrammation d'opérations dans certaines cliniques aura bien lieu.
Le Dr Éric Blondet, président de l'URPS ML Bourgogne Franche-Comté, soutient le mouvement sans appeler explicitement les médecins à faire grève. « Je serais en porte à faux avec les missions de l'Union, dit-il. En revanche, nous communiquerons sur les raisons de la colère. Il est urgent de donner des moyens au système de santé, public comme privé ». À titre personnel, le neurochirurgien libéral de Mâcon (Avenir Spé - Le Bloc) ne souhaite pas « pénaliser » les patients. « J'ai des délais de consultations qui dépassent le mois. Je ne souhaite pas cette désorganisation. »
Présent à l'Université de la CSMF, le Dr Jean-Christophe Masseron, patron de SOS médecins, apporte son soutien aux libéraux mais sans appel à la « mobilisation active » de ses adhérents. « Mais je sais que beaucoup de médecins prendront part à cette journée de grève avec pour conséquence une fermeture probable d'associations », prévient-il. Une AG de la Fédération doit se tenir jeudi 12 octobre pour adopter une position définitive.
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