Le nouveau président du Syndicat national des ophtalmologistes de France (Snof) débute son tout premier mandat de trois ans à la tête du syndicat. Ce spécialiste en chirurgie libéral installé à Lille salue les combats menés par son prédécesseur, le Dr Thierry Bour, notamment la chasse aux centres de santé frauduleux. Il entend encore réduire davantage les délais d’attente en ophtalmologie pour les patients dans les territoires isolés et appelle de ses vœux à une revalorisation de l’expertise des médecins spécialistes. Pour le Quotidien, il présente ces chantiers dans le détail.
LE QUOTIDIEN : Votre prédécesseur avait annoncé un objectif de « zéro délai » d’attente pour les patients, reprenez-vous la formule à votre compte ?
DR VINCENT DEDES : Comme vous l’indiquez, le zéro délai d’attente, c’est une formule. Mais l’idée que les gens qui ont besoin d’un avis rapide puissent avoir un rendez-vous dans les 24 heures à 48 heures est bien sûr toujours d’actualité. Aujourd’hui, on estime que si le délai médian était de l’ordre de 15 à 20 jours, nous aurions un accès extrêmement fluide à l’ophtalmologie. Nous n’en sommes pas loin sur les rendez-vous en ligne, avec 19 jours d’attente. Dans les grandes métropoles, les délais sont d’un à deux jours. Mais il reste quelques territoires, dont les Sables d’Olonne souvent cités, qui sont des zones un peu difficiles. Heureusement, elles sont en train de se restreindre grâce au développement des sites multiples avec la présence constante d’un médecin. Je pense que, dans trois à cinq ans, on n’aura quasiment plus de zones tendues.
Comment avez-vous fait pour réduire ces délais aussi rapidement ?
En premier, c’est l’utilisation du travail aidé qui a transformé la profession. Actuellement, 80 % des ophtalmologistes travaillent en équipe pluriprofessionnelle avec des orthoptistes et une délégation de tâches pour certains actes, des infirmières, des opticiens, des assistants médicaux et une équipe administrative. Ce qui aussi a grandement aidé, c’est le développement du matériel. Un gros investissement a été fait par les ophtalmologistes. On a maintenant du matériel efficace et pertinent, plus rapide que précédemment et qui nous permet d’augmenter le nombre de patients qui peuvent être vus.
Enfin, les cabinets se sont organisés. De plus en plus de nos médecins travaillent en groupe. Cela nous a permis de nous structurer et de développer ce qu’on appelle des sites secondaires ou des sites multiples. Mais nous sommes très attachés à ce qu’il y ait toujours une présence réelle du médecin. On voit apparaître des faux cabinets ou des cabinets secondaires où le médecin n’y est jamais ou qu’exceptionnellement. Cela nous pose un vrai souci.
Travaillez-vous toujours de concert avec la Cnam dans la chasse aux centres de santé frauduleux ?
Tout à fait. Le Snof a été lanceur d’alerte. Il faut rendre justice à mon prédécesseur Thierry Bour pour le travail qu’il a fait. On discute avec la Caisse depuis 2018 mais n’avons commencé à être écouté que deux ans après. Mais si on compare avec les centres dentaires, cela est allé finalement assez vite. Aujourd’hui d’autres procédures en cours arrivent et la Caisse a pris le sujet des centres frauduleux à bras-le-corps. Ce qui nous inquiète, si on prend l’exemple des centres déconventionnés, c’est qu’on voit qu’ils essaient de rouvrir sous d’autres noms.
Quels dossiers comptez-vous mettre en avant durant votre mandat ?
Il faut absolument pousser au développement de sites d’ophtalmologie à proximité des patients. Cela passera par des aides pour ces cabinets secondaires, parce que l’investissement pour les cabinets d’ophtalmologie est lourd. Parallèlement, nous interrogeons nos adhérents pour savoir comment ils définissent un cabinet d’ophtalmologie. Je souhaite par ailleurs un meilleur cadrage de l’utilisation de l’Intelligence artificielle et l’usage de la télémédecine. Sur le volet de la téléconsultation, on voit malheureusement dans beaucoup de magasins d’optique, que les ophtalmologistes sont à 500 km, voire 1 000 km du magasin, donc il n’y a aucune possibilité d’assurer la continuité des soins. La territorialité n’y est pas. Dernier volet, il nous faut trouver une solution pour développer le travail aidé pour tous nos collègues. Je pense ici surtout à ceux en secteur 1. Cela pourrait se faire sur le même modèle que celui que la Cnam a mis en place pour l’embauche des assistants médicaux.
Qu’attendez-vous des actuelles négociations conventionnelles ?
Nous sommes attachés à la différenciation entre la consultation de médecine générale qui aussi mérite d’être revalorisée. Mais la demande portée par l’ensemble des médecins spécialistes est une revalorisation de l’expertise du médecin spécialiste.
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