« Être 100 % médecin ! » : la « retape » du conseil départemental de Saône-et-Loire pour salarier des généralistes crispe les libéraux

Par
Publié le 14/09/2023

Crédit photo : DR

C’est un courrier d'un genre un peu spécial que le Dr David Ciabrini, médecin généraliste à Lyon, a trouvé lundi dans sa boîte aux lettres. Dans l’enveloppe, une missive du président du conseil départemental de Saône et Loire, André Accary, accompagnant un dépliant de huit pages vantant les mérites de l’exercice salarié en centre de santé. « Être 100 % médecin ? C’est possible au centre départemental de santé », claironne la couverture du document.

Débaucher des libéraux

« Ce que je déplore quand je regarde cette plaquette, c’est la mise en concurrence de l’exercice conventionnel et de l’exercice salarié, s'agace le généraliste lyonnais, qui a publié les pages de ce fascicule sur X (ex-Twitter). En présentant ce dernier comme plus attractif, le risque est réel de débaucher des médecins libéraux dans un contexte de pénurie médicale. Cela me désole, même si je comprends que le président de Saône-et-Loire cherche des solutions à une situation d’accès aux soins qui est assez désastreuse pour la population. » L'initiative a d'ailleurs suscité quelques critiques. 

Déchargés de la paperasse 

« C’est une campagne nationale que nous avons lancée en septembre et si des médecins libéraux ont été heurtés, j’en suis désolé, se défend André Accary auprès du Quotidien. J’ai trop de considération pour la profession pour sous-entendre que les libéraux ne sont pas des médecins à 100 %. L’idée, avec notre centre départemental de santé, c’est que les praticiens qui viendraient nous rejoindre seraient, entre autres choses, déchargés des tâches administratives ! Mais je rappelle que ce ne sont pas deux systèmes que nous mettons en concurrence. Le conseil départemental de Saône-et-Loire aide aussi financièrement l’installation des libéraux ».

L'initiative de salariat à grande échelle portée par le département remonte à 2018. Et elle donne des résultats. En trois ans, le nombre de généralistes recrutés dans ces centres territoriaux de santé a d'abord bondi de quatre à 36. Et 63 médecins auraient été récrutés en 2023 par le département, vante la plaquette. « En tant que président du département, je ne peux pas laisser ma population abandonnée », recadre André Accary, dont l'initiative a inspiré d'autres élus.

Un argument entendu par le Dr Ciabrini mais qui ne le fait pas varier de position. « Je suis très attaché à l’exercice libéral et je n’ai aucune envie de travailler dans ce type de structures, écarte le généraliste lyonnais. Ma crainte, c’est que dans un moment de désespoir, vu le contexte conventionnel, des confrères y renoncent au bénéfice de ces centres-là. Et encore, dans ce cas de figure, les centres de santé sont portés par un organisme public, mais ce pourrait tout à fait être quelque chose que pourraient développer de grands groupes de financeurs privés ».


Source : lequotidiendumedecin.fr