« À partir de vendredi 13 octobre, la médecine libérale va s’arrêter. Indiscutablement, ce sera un vendredi noir pour la médecine libérale », a prévenu, solennel, le Dr Philippe Cuq ce mardi, à l’occasion d’une conférence de presse marquant le front uni de la profession dans la colère. Le chirurgien vasculaire, coprésident du syndicat Le Bloc, était en effet désigné pour l’occasion porte-parole de l’intersyndicale des syndicats de praticiens libéraux et étudiants.
À ses côtés, donc, douze leaders de ce collectif libéral, souriants mais silencieux, représentant la CSMF, Avenir Spé-Le Bloc, MG-France, la FMF, le SML, l’UFML-S mais aussi le collectif Médecins pour demain et les jeunes de l’Anemf (étudiants), l’Isni et l’Isnar (internes), Jeunes Médecins et Reagjir. Une unité qualifiée d'« historique ».
Haro sur la loi Valletoux
Deux revendications ont été martelées. La réouverture « urgente » des négociations avec l’Assurance-maladie, avec des moyens dignes de ce nom, et la réécriture de la proposition de loi (PPL) sur l’accès aux soins portée par le député (Horizons) Frédéric Valletoux, prévue au Sénat fin octobre. En l’état, ce texte « à la rédaction contraignante » est « une loi de suradministration », tempête le chirurgien, avec l’assentiment muet de ses douze collègues syndicaux.
Les règles du jeu de l’intervention publique des syndicats avaient ainsi été balisées. La présentation des enjeux et raisons de la grève « reconductible » étaient réservées au seul porte-parole désigné. Sans doute la meilleure (et seule ?) façon de préserver l’unité syndicale – les revendications des centrales pouvant différer.
La consultation de base à 50 euros par exemple n'a pas été évoquée comme dénominateur commun. Si ce tarif reste un prérequis pour le SML, l’UFML et la FMF (et la revendication phare du collectif Médecins pour demain), MG-France évoque plutôt un minimum de 30 euros pour cette consultation de référence.
Un système qui s'effondre sans la médecine libérale
Le mouvement de fin de semaine pourrait perturber bien au-delà de la médecine générale. « Toutes les activités de consultation et d’actes techniques sont déprogrammées. Les urgences seront transférées à l’hôpital public et les gardes arrêtées », déroule le chirurgien toulousain, précisant que « les urgences vitales » seront prises en charge. L'objectif assumé des grévistes est de montrer que le système de santé français risque de s'effondrer sans la médecine libérale. Une façon de faire pression sur l'Assurance-maladie et le gouvernement avant des arbitrages décisifs.
« Et si les ARS veulent réquisitionner tous les médecins libéraux… », ironise le Dr Cuq. Selon ses estimations, la force de frappe de l’intersyndicale représente environ « 10 % » des quelque 110 000 praticiens libéraux en exercice. Mais, sur le terrain, la mobilisation serait « largement supérieure » au nombre de syndiqués.
Bras de fer
Aucune manifestation nationale n’est prévue à ce stade pour accompagner cette cessation d'activité. « Le fait qu’il y ait une crise sanitaire sera plus efficace que les manifestations. Personne n’est pris au dépourvu. La responsabilité est politique », lance le Dr Cuq . L'intersyndicale souligne que ce mouvement n’est pas fait « pour gagner de l’argent » mais pour garantir « la sécurité des patients et leur accès aux soins », ce qui n'est souvent plus le cas dans les conditions actuelles de paupérisation de la médecine libérale.
Le bras de fer est assumé. « Combien de temps le gouvernement peut-il tenir sans médecins libéraux ? », relève le porte-parole du jour. La question se pose aussi pour les libéraux et les établissements privés, peu habitués à s'engager dans un arrêt d'activité au long cours.
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