Objet de critiques récurrentes de la profession, la rémunération sur objectifs de santé publique (Rosp) sera-t-elle profondément réformée ? Cette « prime » inspirée du paiement à la performance britannique est au menu du focus « prévention » des négociations conventionnelles, programmé ce mercredi 10 janvier.
La Cnam mise sur ces échanges pour avancer sur la refonte de ce dispositif déjà engagé en février 2023, mais qui n’a pas abouti, faute d’accord. Il y a moins d’un an, il était question de remplacer la Rosp par le « forfait sur la prévention primaire et secondaire » qui, outre les généralistes médecins traitants, était destiné aux pédiatres, pneumologues, cardiologues, gastroentérologues, endocrinologues et diabétologues. Mais dans le document de travail mis en ligne par la Cnam ce mardi et sur lequel les médecins vont devoir plancher mercredi, ce forfait n’est plus du tout mentionné. En revanche, la caisse mentionne quelques pistes de travail évoquées en 2023 qui pourraient orienter les discussions à venir.
Avant toute chose, la Cnam rappelle les grands principes de la Rosp, le bilan de 2022 (5 113 euros par médecin généraliste, hausse de 1,1 % en moyenne par rapport à 2021) et les limites du dispositif : indicateurs « trop nombreux », « qui n’évoluent pas assez dans le temps », un mode de calcul difficile à appréhender, etc.
La caisse mentionne les propositions (avortées) d’évolutions mises sur la table en 2023. L’un des objectifs était alors de réduire le nombre d’indicateurs de 29 à 15. La Cnam suggérait d’en supprimer certains (vaccination du ROR, dépistage des troubles visuels et auditifs, dépistage de la maladie rénale chronique pour le patient diabétique…) et d’en rajouter d’autres (dont la prévention en santé mentale, le recours aux antidépresseurs, la lutte contre l'antibiorésistance ou l’iatrogénie médicamenteuse).
Transmission d’une liste des patients
Pour aider les médecins à bien suivre leurs patients, la Cnam avait pris l’initiative de leur proposer l’année dernière la liste des assurés non dépistés pour le cancer selon les critères de la Haute autorité de santé (HAS). S’appuyant sur un sondage BVA*, la caisse met à nouveau en avant cette idée.
De fait, 50 % des sondés ayant reçu et utilisé cette liste l’année dernière évoque des « retours positifs de leurs patients », insiste la caisse. Seulement 10 % ont mentionné des opinions négatives. Ceux qui n’ont pas utilisé cette liste estiment que ce n’était pas nécessaire, le travail de prévention étant déjà effectué dans leur cabinet sans cet outil pour 63 % d’entre eux.
Pour cette nouvelle séance de négociations, la Cnam pose en préambule la question suivante : faut-il élargir cette liste à d’autres indicateurs à suivre au niveau du patient?
Autre interrogation pour commencer les échanges : les médecins ont-ils besoin d’un tableau de bord de suivi individuel pour valider les indicateurs correspondant aux objectifs de santé publique (dépistage, vaccination, prise en charge des maladies chroniques) ?
Dernier questionnement : faut-il changer le mode de calcul de la Rosp en la fondant non plus sur la patientèle mais sur certains indicateurs, afin d’apporter « une meilleure visibilité de sa construction » ?
Pas de changement de braquet
Alors que la majorité des syndicats dont la FMF, MG France ou le SML ont plaidé en faveur de la suppression pure et simple de la Rosp, la Cnam ne semble pas vouloir changer de braquet. Là encore, la caisse avance en s’aidant d’un ancien sondage BVA**. Pour deux tiers des médecins interrogés, la Rosp améliore globalement la qualité des pratiques et comporte des avantages économiques, souffle-t-elle à l’oreille des libéraux.
Sans attendre l’ouverture de la discussion, la FMF a vivement réagi à la lecture des propositions de la Cnam.
* effectué auprès de 242 médecins généralistes du 15 mai au 19 juin
** effectué auprès de 200 praticiens en mai-juin 2022
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