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Les généralistes jugent l'année 2013

Publié le 20/12/2013
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Les généralistes sont hésitants sur les changements qui ont pris corps en 2013. Notre enquête GMG montre en particulier une profession toujours partagée sur les vices et les vertus de la généralisation du tiers payant. Pour le reste, quelques semaines après son lancement, les généralistes ne croient pas que le nouveau CAS bouleversera l’accès aux soins. Et la meilleure nouvelle de l’année ne fait pas l’unanimité : pour les uns, c’est le premier versement de ROSP en avril, pour les autres les revalos de juillet, pour d’autres encore le lancement de la Stratégie Nationale de Santé…

Crédit photo : GODONG / BSIP

C’est un repoussoir… ou un espoir ! L’annonce en septembre de la généralisation du tiers payant a incontestablement retenu l’attention d’un bon nombre de généralistes en 2013, qu’on s’en réjouisse ou qu’on s’en défie. Notre enquête montre en effet que les généralistes redoutent pour eux-mêmes ce chantier, mais sont nombreux à convenir aussi que ce sera sans doute un plus pour leurs patients.

Crainte d’une usine à gaz ou d’une perte d’indépendance ? Il se confirme d’abord que ce chantier, cher à Marisol Touraine, fait un peu peur. Quand on leur demande quel motif principal d’inquiétude est venu les perturber ces douze derniers mois, c’est l’ouverture du chantier du tiers payant qui vient en tête, citée par un praticien sur deux.

Cette appréhension nouvelle semble actuellement tracasser bien davantage qu’une évolution, il est vrai plus ancienne : la pénurie croissante des professionnels libéraux dans les zones déficitaires, redoutée tout de même en priorité par près de 28% des généralistes. Pour le reste, on ne peut pas dire que les autres zones d’ombre sur l’exercice de la médecine générale empêchent grand monde de dormir. Tout juste relèvera-t-on qu’un généraliste sur dix demeure frappé par les mises en cause judiciaires de confrères, assez médiatisées en 2013, sur la PDS notamment. Moins étonnant?: quand on aborde le chapitre tarifaire, difficile pour l’immense majorité (95%) des généralistes de se sentir concernés par les déboires de quelques confrères secteur 2 avec la Sécu. Enfin, signe des temps sans doute : l’essor du salariat en ville, qui est une des tendances de fond de l’année qui s’achève, ne semble plus scandaliser la plupart des praticiens : seuls 4,5% cauchemardent encore quand on évoque devant eux le boum de la médecine salariée…

CAS et gratuité de l’IVG ne sont pas perçus comme des bouleversements

L’année 2013 est aussi à analyser du point de vue de l’accès aux soins, tant le gouvernement a pris d’initiatives en tout sens pour tenter de régler cette épine dans le pied du modèle social français. Surprise ! Quand on leur demande ce qui va le plus changer le quotidien de leurs patients, c’est encore le tiers payant qui est cité en premier (38%), suivi d’assez près par la généralisation de la complémentaire santé pour les salariés (31%) qui va se mettre en place. En regard de ces deux réformes, le troisième chantier engagé par le gouvernement et la Sécu n’impressionne guère : seul un généraliste sur dix place le nouveau contrat d’accès aux soins en tête des initiatives à même d’influer sur leur patientèle. Pas terrible pour un CAS qui a priori faisait pourtant figure d’innovation conventionnelle 2013 ! Quand à la gratuité de l’IVG, mesure emblématique de la campagne Hollande, elle ne recueille qu’un petit succès d’estime (8%).

Finalement, c’est sur leurs motifs de satisfaction personnels que les généralistes sont les plus partagés. Quand on les interroge sur la mesure qui les a le plus réjouis cette année, trois réponses tombent avec à peu près la même proportion de suffrages. A l’applaudimètre, les revalorisations du 1er juillet se taillent évidemment un beau succès : près de 28% des citations. Mais un même pourcentage « vote » pour la place centrale attribuée au généraliste dans la Stratégie Nationale de Santé de Marisol Touraine. Quand bien même on ignore encore comment au juste celle-ci va se décliner. Enfin, le premier versement de la ROSP (Rémunération sur objectifs de santé publique) est retenu par un peu plus de 21% de la profession. Signe sans doute que, lentement mais surement, le paiement à la performance est en train de se faire sa place au soleil. A côté l’annonce de prochaines négociations pour rémunérer la coordination des soins ou la remise en cause des contrats généralistes-Ehpad n’est pas plébiscitée par une grande part des généralistes. Il faut dire que sur ces deux dossiers, le flou persiste encore…

Enfin un calendrier vaccinal plus simple !

Notre enquête a également sondé la profession sur les évènements de santé publique. Ne cherchez

pas ! En bonne logique, les généralistes mettent en avant l’élément qui a le plus directement impacté leur pratique : le choc de simplification opéré par le nouveau calendrier vaccinal paru à la mi-avril. Il est placé en tête des nouveautés qui comptent par 37% des professionnels sondés, à la mesure du changement important qu’il induit dans les rendez-vous vaccinaux : moins de doses chez le nourrisson, rappel à âge fixe chez l’adulte, ce calendrier vaccinal 2013 va bien au-delà du simple toilettage de printemps habituel.

L’affaire des pilules C3G-C4G qui a beaucoup agité les pouvoirs publics français au 1er trimestre (se soldant par un déremboursement anticipé de ces contraceptifs) semble aussi avoir vivement impressionné dans les cabinets médicaux. Un gros tiers en fait l’événement majeur de santé publique de ces derniers mois. Il est vrai que les trois premiers mois de l’année ont focalisé sur les plaintes de patientes, sur la polémique sur le rapport bénéfice-risque de ces contraceptifs, pour finir par un désaccord patent entre l’Agence française et l’Agence européenne, tant sur les C3G/C4G que sur Diane® 35.

À coté, le boom de la e-cigarette – dont on a pourtant beaucoup parlé – ne recueille qu’un score anecdotique, 16% des praticiens en faisant un des faits majeurs de 2013. De même que le feu vert donné aux autotests HIV. Et c’est pour ne rien dire du record de durée battue par la grippe de l’hiver dernier, qui ne semble pas avoir impressionné grand monde…

Le clonage humain, première médicale

Les avis sont plus tranchés quand on regarde du côté des premières médicales. Incontestablement, c’est l’expérience réussie de clonage humain à partir de cellules de peau aux Etats-Unis qui impressionne le plus. Près d’un médecin sur deux s’y réfère en premier, soit que cette première en matière de cellules embryonnaires effraie, soit que nos lecteurs se passionnent pour les possibilités thérapeutiques ouvertes… La prouesse, réalisée par des chercheurs de l’Oregon, a consisté à utiliser le noyau des cellules de la peau d’un bébé de 18 mois pour le transférer dans des ovules humains provenant de donneurs. La technique aurait pu faire cesser la polémique autour de l’utilisation des cellules souches embryonnaires. En réalité, elle a surtout affolé les adversaires du clonage humain !

Une autre nouvelle venue d’outre-Atlantique retient aussi l’attention : l’annonce en mars 2013 de la guérison fonctionnelle d’un enfant malade du Sida a bluffé un quart des généralistes. C’est encore les Américains qui surprennent le monde médical en présentant le cas d’un enfant séropositif traité dès la naissance, perdu de vue 18 mois plus tard et retrouvé des années après, sans charge virale détectable, hormis quelques traces que seules des analyses génétiques très poussées pouvaient détecter. Dans ce contexte, les autres informations médicales de l’année n’ont été retenues en premier que par une minorité de nos lecteurs. Certaines rencontrent néanmoins un intérêt certain : 15% pour l’AMM européenne obtenue par le nalméfène dans le sevrage alcoolique et presque 10% pour la première de larynx artificiel réalisée à Strasbourg sur un

malade atteint de cancer.


La Rédaction

Source : lequotidiendumedecin.fr