La réforme des retraites, dont les grandes lignes ont été dévoilées il y a quelques jours dans un rapport remis au Premier ministre par le Haut commissaire Jean-Paul Delevoye, continue d'inquiéter les médecins libéraux.
Depuis plusieurs mois, les médecins redoutent de figurer parmi les grands perdants de la mise en place d'un régime universel de retraite. Malgré leurs tentatives, les pouvoirs publics ne sont pas parvenus, ces dernières semaines, à rassurer le corps médical.
Après 18 mois de concertation, le rapport Delevoye entérine la disparition prochaine des 42 régimes actuels de retraite (dont celui des médecins géré par la Carmf) pour la création en 2025 d'un régime unique par points. Finis les trimestres cotisés, Emmanuel Macron a posé un grand principe à cette refonte : « Un euro cotisé devra donner les mêmes droits à tous ».
Le rapport Delevoye doit servir de base au projet de loi du gouvernement dont l'examen au Parlement est attendu dans le courant de l'année 2020 (le flou demeure sur le calendrier exact). Cette réforme à hauts risques fera l'objet d'une concertation avec les partenaires sociaux à la rentrée.
Selon les pistes mises sur la table, il est prévu que dans le futur système tout le monde cotisera de la même manière jusque environ 120 000 euros de revenu brut annuel (3 fois le plafond annuel de la Sécurité sociale). Si l'âge légal de départ serait maintenu à 62 ans, l'âge d'équilibre pour une retraite à taux plein serait de 64 ans pour les Français nés en 1963. Ceux qui partiraient avant cet âge se verraient appliquer une décote de 5 % par an quand ceux qui prolongeraient leur activité bénéficieraient d'un rendement majoré de 5 % par an, sur le même principe que la retraite à la carte déja en vigueur chez les médecins.
La crainte d'une baisse des pensions
Les médecins libéraux redoutent particulièrement cette réforme et souhaiteraient pouvoir continuer à bénéficier d'un système de retraite complémentaire spécifique. La Confédération des syndicats médicaux français (CSMF) estime notamment que le choix de 3 PASS est bien trop élevé et souhaiterait que ce plafond soit ramené à un PASS (environ 40 000 euros) pour continuer à bénéficier d'un régime de retraite complémentaire spécifique par répartition en complément du socle universel.
A l'instar du Syndicat des médecins concernés par la retraite (SN-MCR), la profession redoute une baisse « mécanique » des pensions, avec la mise en place de nouveaux taux de cotisation (28,12 % jusqu'à 40 000 euros puis 12,94 % au-delà). « La baisse extrêmement significative du niveau des pensions des médecins, consécutive à la réforme, est de nature à susciter de fortes inquiétudes », corrobore la Caisse autonome de retraite des médecins de France (Carmf), qui souhaite également le maitien d'un régime complémentaire pour « protéger les médecins retraités ».
Quid des réserves et de l'ASV ?
Une autre source d'inquiétude porte sur l'avenir des réserves constituées par les médecins – qui s'élèvent aujourd'hui à 7 milliards d'euros. D'aucuns redoutent que celles-ci ne tombent dans un pot commun et échappent à la profession. « Les réserves constituées par les médecins doivent revenir aux médecins », affirme le syndicat du Dr Jean-Paul Ortiz. La Carmf réaffirme également le « caractère inaliénable » de la propriété des réserves du corps médical.
L'avenir de l'actuel régime ASV, qui constitue 35 % de la retraite des médecins en secteur I, est aussi un motif de préoccupation. « On nous assure que le montant de la participation des caisses restera du domaine conventionnel, mais que deviendra ce régime ASV dans le futur régime universel », interroge le SN-MCR.
Devant les nombreux points laissés en suspens, la Carmf espère que des « aménagements sont possibles ». « Il faudra obtenir des modifications pour une acceptabilité d'une telle réforme », clame le SN-MCR, tandis que la CSMF demande au gouvernement de « respecter la spécificité de la profession de médecin libéral avant de prendre des décisions définitives ».
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