Au départ, les syndicats de médecins libéraux étaient plutôt réticents sur le déploiement de la pratique avancée infirmière (IPA) en ville depuis 2019. Et sur le terrain, les généralistes interrogés par l'institut BVA estimaient, en début d'année, que les IPA devaient encore faire leurs preuves. Les patients, en revanche, semblent plutôt satisfaits, selon le second volet de la même enquête réalisée pour le compte de l'Assurance-maladie, présentée mi-juin aux syndicats en commission paritaire nationale (CPN).
L'objectif de ce nouveau métier, exercé par 149 infirmières en libéral à la fin décembre 2021, est d'améliorer l'accès aux soins ainsi que la qualité des parcours des patients en réduisant la charge de travail des médecins sur des pathologies ciblées. Pour appréhender le point de vue des patients, BVA a réalisé une étude qualitative auprès de huit patients dont six ont été orientés par leurs généralistes vers les IPA pour le suivi de leur diabète et deux autres atteints d'un cancer de la prostate opérable adressés par l'urologue pour la préparation de l'opération.
Des qualités rassurantes
Selon cette enquête, l'intervention de l'IPA a été bien appréciée des patients orientés par leur généraliste. En effet, le délai de prise de rendez-vous avec l'infirmière est raccourci par rapport à celui avec le généraliste : entre 2 et 5 jours contre 15 jours voire trois semaines pour le médecin en zone déficitaire. La possibilité d'être reçu plus rapidement est selon la Cnam un « facteur rassurant pour le patient ».
Par ailleurs, les patients interrogés apprécient « le fait d'être écoutés », de « se voir consacrer du temps pour être davantage conseillés sur les pathologies chroniques ». Concernant les patients adressés par leur spécialiste, la prise en charge par l'IPA est aussi saluée, car perçue comme « un soutien psychologique indispensable notamment pour garder un bon moral ». Globalement, ces professionnels de santé sont considérés comme « accessibles » car leur statut est moins intimidant que celui des médecins et que leurs personnalités ont été perçues comme sympathiques et bienveillantes. Ils sont aussi jugés « compétents » par leurs capacités de détecter des problèmes grâce au suivi plus rapproché. Des qualités qui font de l'IPA « une personne de confiance », résume la Cnam.
Médecin, acteur central du modèle
S'agissant de l'ensemble du dispositif, les patients le jugent « pertinent ». Ils voient aussi l'arrivée de ces nouveaux professionnels comme une solution pour redonner du temps médical à leur généraliste. Quant aux patients de spécialistes, ils estiment que ces « super-infirmiers » remplissent leur mission qui est aussi de « rassurer » les malades. Un patient parle même de « l’opportunité pour le médecin de se recentrer sur son cœur d’activité (diagnostic, chirurgie) ».
Toutefois, l'étude révèle que la connaissance des missions des IPA est « parcellaire ». Et même si « les consultations réalisées par ces professionnels sont perçues comme assez similaires à celles du médecin généraliste », « l'acteur central du modèle » reste le praticien pour les patients.
Faut-il faire évoluer l'activité des IPA ? La réponse est non pour les patients des médecins généralistes. Ils considèrent que ces paramédicaux sont bien « positionnés en l'état actuel » en prenant en charge des pathologies chroniques (diabète, hypertension…) et des problèmes quotidiens (interventions simples comme des petites blessures par exemple). Ils estiment aussi que leur champ de compétences est déjà assez vaste. Aussi, leur rajouter des missions supplémentaires enlèverait leur atout principal qui est « le temps » consacré aux patients.
Quoi qu'il en soit, les personnes sondées ne manquent pas d'arguments pour encourager les médecins à entrer dans le dispositif : charge de travail réduite grâce à l'IPA, possibilité de prendre de nouveaux patients, délai de rendez-vous plus rapide et lien avec le spécialiste.
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