Escort boy, fraude… malgré une radiation en France, un médecin refait surface au Portugal

Mais où était donc passé le Dr Vitor Joao de Lima Martins ? Ce généraliste exerçant dans un centre de santé à Équeurdreville (Manche), près de Cherbourg-en-Cotentin, avait mystérieusement disparu au mois de juillet dernier, laissant en plan ses patients.

Fin novembre, « La presse de la Manche » faisait une drôle de découverte : le médecin avait refait surface… au Portugal, son pays d’origine. Il y exerce de nouveau dans un centre de santé et reçoit en consultation des patients depuis le 8 novembre. Un article de la presse locale mentionne d’ailleurs ce retour. Une photo montre le Dr de Lima Martins, tout sourire, aux côtés de ses nouveaux collègues.

Que s’est-il passé entre-temps ? Pourquoi ce départ brutal pour la péninsule ibérique ? Le généraliste de 61 ans avait visiblement cumulé les ennuis en France, jusqu’à être radié du tableau de l’Ordre des médecins par la chambre disciplinaire de première instance de Normandie le 26 août dernier.

Relations sexuelles tarifées

Les faits reprochés au généraliste sont extrêmement graves. Selon la décision que « Le Quotidien » s’est procurée, il est accusé d’avoir proposé de l’argent à un jeune patient de 23 ans en échange de relations sexuelles. Informée de cette affaire, l’ARS de Normandie avait déjà suspendu d’exercice le médecin le 23 juin dernier pour une durée de 5 mois.

Les faits remontent au printemps dernier. Le Dr de Lima Martins avait pris en charge le jeune homme, en état de stress et d’angoisse, alors qu’il exerçait à temps partiel à l’établissement psychiatrique de la Fondation du Bon Sauveur de la Glacerie. « Après une série d’échange, le médecin l’a reçu dans son cabinet le 29 avril 2021 à 20 h 30 pour lui proposer de devenir son “escort boy” en ayant des relations sexuelles avec contrepartie financière », écrit la chambre disciplinaire dans son compte rendu.

Le médecin niera les faits devant l'ARS mais les soupçons qui pèsent sur lui conduiront l’Ordre à le sanctionner. La chambre relève ainsi que le médecin avait pratiqué un toucher rectal sur son patient hospitalisé, sans le mentionner dans son dossier, un acte jugé « médicalement injustifié » dans le cas du jeune patient.

Soupçons de fraudes, compérage, abandon de patientèle…

Ce ne sont pas les seuls griefs qui lui sont reprochés. En 2021, il avait fait l’objet de deux procédures disciplinaires « pour non-continuation des soins et compérage ». Le médecin ne s’est jamais présenté devant l’Ordre pour s’expliquer. « Ce comportement a lourdement pesé dans la décision de le radier », confie au « Quotidien » le Dr Anne Besnier, secrétaire général du CDOM de Normandie.

Selon nos informations, le médecin ferait par ailleurs l’objet d’une enquête de la CPAM pour des pratiques frauduleuses. « La Presse de la Manche » a reçu le témoignage troublant de plusieurs patients. « Je payais les consultations en liquide, comme il me le demandait, et il percevait également le remboursement de la Sécurité sociale », confie au journal local une patiente du généraliste, âgée de 89 ans.

Le Dr de Lima Martins avait déjà fait parler de lui en février 2016. Alors qu’il exerçait à Saint-Michel-en-l'Herm (Vendée) dans une maison pluridisciplinaire, il avait brusquement déserté son cabinet pour venir s’installer dans la Manche, sans en informer ni ses patients ni le Conseil départemental.

L'Ordre portugais silencieux

Comment un médecin aussi peu scrupuleux à l’égard de ses obligations déontologiques peut-il de nouveau exercer au Portugal, malgré sa radiation du tableau de l’Ordre en France ? « Nous avons été stupéfaits d’apprendre qu’il exerçait de nouveau dans son pays d’origine », s’étonne le Dr Anne Besnier.

La décision de la chambre disciplinaire concernant le Dr de Lima Martins a pourtant été communiquée à l’instance ordinale du Portugal (Ordem dos medicos), affirme-t-elle. Un nouveau signalement a été fait auprès du Conseil national de l’Ordre des médecins afin qu’il alerte son homologue portugais. Sans aucun effet à ce jour. Contactée par « Le Quotidien », l’instance ibérique n’a fourni aucune explication à ce jour.