« Il faut donner aux médecins un intérêt à agir » : la CSMF réclame au gouvernement un nouveau pacte social

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Publié le 19/05/2022
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Crédit photo : S.Toubon

Face à un système de santé qui va de crise en crise, le Dr Franck Devulder, nouveau président de la CSMF, a exhorté ce jeudi le futur ministre de la Santé à mettre autour de la table tous les acteurs (libéraux, hospitaliers, centres de santé, financeurs, etc.) avec l'ambition d'écrire ensemble « un nouveau pacte social ».

La grande concertation sur la santé promise par Emmanuel Macron sera l'occasion pour la Conf' d'avancer des « solutions audacieuses », promet-elle, pour répondre aux attentes « légitimes » des Français en termes d'accès aux soins. « Il faut donner aux médecins un intérêt à agir et les moyens pour se coordonner avec d'autres professionnels de santé », a avancé le gastro-entérologue de Reims.

Quatre niveaux de consultations à protocoliser

Pour rendre possible la prise en charge de nouveaux patients, la centrale polycatégorielle défend plus que jamais la valorisation de l'expertise médicale. Cela passe par la suppression des trop nombreuses lettres clés, modificateurs et majorations « trop complexes » pour passer à quatre niveaux lisibles et réévalués de consultations.

Selon la CSMF, la hiérarchisation des actes cliniques se fera en fonction de quatre critères précis : la complexité de l'acte, l'expertise nécessaire pour le réaliser, la durée et la fréquence. Les tarifs iraient de 25 à 30 euros pour une consultation de base (niveau 1), 60 euros (niveau 2), 75 euros (niveau 3) et 105 euros (niveau 4). « On doit protocoliser ces niveaux par spécialité, précise le Dr Devulder. La consultation de base est celle du suivi, du renouvellement d'ordonnance ou celle qu'on délègue aussi. »

Honoraires majorés et espace de liberté tarifaire en zone sous-dense

La centrale veut ensuite promouvoir l’exercice multisite. Pour inciter les médecins libéraux à exercer à plusieurs km de leur lieu d'exercice principal, en zone déficitaire, la CSMF propose de créer un contrat de cinq ans, en complément des contrats conventionnels existants « trop complexes » et jugés insuffisants. Ce contrat proposé à l'installation, mais aussi aux médecins déjà en exercice, permettrait aux praticiens de bénéficier d'actes majorés de « 30 % » et d'un « espace de liberté tarifaire encadré ». « Cela valorisera la totalité de l'activité du médecin dans un volume qu'il faut préciser », précise le patron de la CSMF. Ce dispositif pourrait s'inspirer de l'option de pratique tarifaire maîtrisée (Optam) qui doit être « solvabilisée par les complémentaires santé ». « C'est vertueux car c'est une politique de droits et devoirs », ajoute le spécialiste.

Côté formation initiale, le Dr Devulder suggère d'intensifier les stages en libéral, particulièrement pour les autres spécialités que la médecine générale. « Nous demandons que tous les internes aient au minimum deux semestres de formation en secteur libéral, l'un en première partie de leur internat, l'autre au stade de docteur junior (en fin d'internat, NDLR) », ajoute-t-il.

Payer les astreintes à leur juste valeur

Dans son nouvel environnement professionnel, la CSMF entend décharger le médecin libéral, « entrepreneur », des tâches non médicales. Et pour déployer les assistants médicaux dans les cabinets, le syndicat souhaite réduire leurs heures de formation pour les personnels déjà aguerris. « Imposer 120 heures de formation à une infirmière expérimentée est un frein à l'embauche », illustre le Dr Devulder. Idem pour les infirmières en pratique avancée (IPA), pour lesquelles le syndicat réclame un élargissement des domaines d'intervention, sous la responsabilité du médecin.

Si la permanence des soins est un « devoir collectif », la CSMF refuse déjà tout retour aux gardes obligatoires, une réforme qui créerait « des gilets jaunes toubibs » et risquerait de déséquilibrer ce qui fonctionne. En revanche, « donnons aux médecins l'intérêt à agir », martèle à nouveau le Dr Devulder. « Un médecin d'astreinte, cela se paye à sa juste valeur, la Mayenne doit servir d'exemple. » Dans ce département, malgré la baisse du nombre de médecins, « le taux de volontaires reste élevé grâce à une organisation et une rémunération très incitative ». 

Remplaçants et « cumulards » à choyer

Dans cette politique de « droits et de devoirs », la CSMF estime que les médecins remplaçants doivent pouvoir accéder aux différents fonds de formation, comme leurs confrères installés. « Cet accès doit se faire de façon proportionnelle, sinon on va dépenser toute l'enveloppe allouée au développement professionnel continu », dit-il. Et face au recul de l'âge d'installation (38 ans), le syndicat propose aux organisations représentatives des jeunes (Isni, Isnar, Reagjir) de réfléchir au « statut » du médecin remplaçant. « On doit leur donner un intérêt à s'installer plus tôt », estime le Dr Devulder.

De l'autre côté de la pyramide des âges, la centrale polycatégorielle propose que les médecins libéraux en cumul emploi retraite (qui sont 12 500) puissent « liquider deux fois leur retraite en bénéficiant la deuxième fois d'une retraite majorée par les cotisations effectuées durant le cumul ».


Source : lequotidiendumedecin.fr