Retraites : après les critiques du Conseil d'État, les médecins libéraux maintiennent la pression

Par
Publié le 27/01/2020
Article réservé aux abonnés

Crédit photo : S. Toubon

La ministre de la Santé Agnès Buzyn aurait « préféré un autre avis du Conseil d'État » sur la réforme des retraites et espère que le gouvernement pourra « convaincre » le Conseil constitutionnel qu'il s'agit bien d'un système « universel et équitable », a-t-elle dit dimanche au Grand Jury de RTL/Le Figaro/LCI.

Saisie le 3 janvier, la plus haute juridiction administrative française a vertement critiqué vendredi le choix de recourir à 29 ordonnances, ce qui « fait perdre la visibilité d'ensemble » et a pointé des projections financières « lacunaires ». 

Au fur et à mesure

« Je comprends la frustration du Conseil d'État de ne pas avoir l'entièreté des mesures. Pour autant, c'est un choix assumé du gouvernement que d'écrire au fur et à mesure que les concertations aboutissent », a déclaré la ministre. Pour Agnès Buzyn, le futur système sera bien universel car « nous sommes tous traités à la même enseigne dans la même caisse » mais aussi équitable car « il prend en compte certaines différences dans les métiers ». 

Dans son avis, le Conseil d'État souligne au contraire que l'objectif selon lequel « chaque euro cotisé ouvre les mêmes droits pour tous » reflète imparfaitement la complexité et la diversité des règles de cotisation ou d'ouverture de droits définies par le projet de loi. La juridiction remet aussi en question la formulation de « régime universel de retraite », soulignant qu'il s'agit plutôt d'un « système universel par points » à l'intérieur duquel coexistent plusieurs régimes (salariés , fonctionnaires, marins, etc.). 

Le SML veut doper l'ASV

C'est dans ce contexte d'instabilité juridique du projet de loi que les syndicats de praticiens libéraux maintiennent la pression sur le gouvernement.

Alors que le secrétaire d'État chargé des retraites s'emploie, ce lundi dans nos colonnes, à rassurer la profession médicale sur plusieurs sujets (avenir de la CARMF, création d'un étage complémentaire de retraite, fléchage des réserves, etc.), le SML réclame une « majoration de l'abondement de l'assurance-maladie » sur le régime ASV pour tous les praticiens libéraux conventionnés « sans exception, en secteur I et secteur II ». Pour la centrale du Dr Philippe Vermesch, cette prise en charge accrue des cotisations sociales par la Sécu permettrait de donner un « coup de pouce à l'attractivité de la profession ». 

De son côté, MG France prend acte que le projet de loi intègre plusieurs éléments attendus (maintien des avantages de l'ASV, conservation de plusieurs missions de la CARMF et des réserves…) mais affiche son inquiétude sur les « taux et assiettes de cotisations », les « niveaux de pension » ou la gouvernance. Le syndicat demande à tous les généralistes « de se tenir prêts à agir si les questions soulevées ne recevaient pas de réponses positives ».

Vers un étage supérieur

La CSMF entend pour sa part « rétablir certains faits » face à la « mauvaise foi ». « Non, vous n’allez pas cotiser plus ! », souligne la centrale de Jean-Paul Ortiz qui rappelle que le taux de cotisation moyen des médecins va baisser à 28,12 % (jusqu’à 40 000 euros de revenus) puis à 12,94 % (entre 40 000 et 120 000 euros). Le risque identifié porte clairement sur la baisse de pension. D'où l’idée exprimée d'un régime complémentaire obligatoire par répartition provisionné, en maintenant le niveau actuel de cotisations à l’identique. « L’objectif est de maintenir notre niveau actuel de cotisations pour maintenir notre niveau actuel de prestations », résume la CSMF. Dans nos colonnes, le secrétaire d'État aux retraites a répondu ce lundi qu'il était « ouvert » sur la création d'un étage complémentaire supérieur. 

Enfin, plusieurs syndicats de libéraux réunis sous la bannière du collectif SOS Retraites (dont la FMF et l'UFML) ont intensifié leur mobilisation sur les réseaux sociaux dans la perspective du mouvement de grève le 3 février. Plusieurs dizaines de vidéos de soignants de terrain, reprenant le mot d'ordre #devissetaplaque dénoncent l'étatisation du système de retraite. Une manifestation nationale est prévue à Paris.

Cyrille Dupuis (avec AFP)

Source : lequotidiendumedecin.fr