Pollution, alimentation, changements climatiques… D’ici à 2050, près de la moitié de la population française pourrait être concernée par une allergie respiratoire ou alimentaire. Comment améliorer le diagnostic de cette maladie chronique ? Quels sont aujourd’hui les traitements les plus efficaces ? Pour évoquer ces sujets, nous accueillerons au cours d’un Live chat le Dr Julien Cottet (*), allergologue et vice-président de la Société française d’allergologie.
Quels sont les liens entre environnement et allergies ? Comment diagnostiquer les allergies ? Quels conseils donner aux patients pour limiter leur exposition ? Comment les aider à mieux gérer leur maladie ? Qu’est-ce que l'immunothérapie sublinguale ? Quels traitements sont disponibles ? Dans quels cas adresser un patient à un allergologue ?...
Dr JULIEN COTTET
vice-président de la Société française d'allergologie
répondra à vos questions
JEUDI 22 JUIN À 12H00
(*) Le Dr Julien Cottet est spécialiste en allergologie, vice-président de la Société française d’allergologie, vice-président du Conseil national professionnel d’allergologie, vice-président du Groupe de travail immunothérapie. Il est également PDG et cofondateur de Drago, une application destinée aux patients en cours de désensibilisation allergique.
Bienvenue sur lequotidiendumedecin.fr.
Nous accueillons aujourd’hui le Dr Julien Cottet, allergologue et vice-président de la Société française d’allergologie. Pendant une heure, il répondra à vos questions sur la prise en charge des allergies respiratoire ou alimentaire.
Merci d’avoir accepté notre invitation à ce Live chat.
Concernant les pollens, sommes-nous plus exposés en ville par rapport à la campagne ? A part les antihistaminiques, existe-t-il d'autres traitements plus efficaces ?
Il faut distinguer les symptômes ORL, de ceux pulmonaires : la rhinite et la conjonctivite peuvent en effet être prises en charge par des anti-histaminiques per os et surtout le traitement local (spray nasal, collyres). Dans un cas sur deux, la rhinite évolue vers l'asthme (toux, essoufflement) et là les anti-histaminiques n'ont aucun effet. Il faut absolument introduire un traitement inhalé.
Le seul traitement curatif existant, recommandé par l'OMS, pris en charge par la Sécurité sociale et les complémentaires est la désensibilisation. Elle permet le contrôle des symptômes, la réduction de risque d'apparition de l'asthme et une diminution de consommation d'anti-histaminiques. C'est pourquoi il faut la commencer le plus tôt possible.
Comment un malade peut-il arriver en consultation et dire "Je suis allergique" ? Cela m’énerve au plus au point car il faut qu’il décrive ses symptômes et/ou réponde à notre interrogatoire pour que l’on puisse éliminer plein d’autres diagnostics...
Merci.
Oui, vous avez raison de mener votre interrogatoire correctement, mais ce genre de situation sera de plus en plus fréquent au vu de l'explosion de la prévalence.
Je vous conseille de regarder la classification de la SFORL. Une rhinite non allergique peut être intrinsèque (vasomotrice, RGO, hypothyroïdie, grossesse...) ou extrinsèque (liée à un médicament, irritative, professionnelle...). Elle peut être auto-immune.
La rhinite allergique, quant à elle, est vraiment en lien avec l'exposition avec l'allergène. C'est l'interrogatoire policier qui permet de poser le diagnostic en le confrontant aux test cutanés. Attention, on peut parler de rhinite allergique chez l'enfant ; mais à l'âge adulte, la rhinite est quasi systématiquement intriquée (allergique + non allergique).
Ce qui complique la prise en charge, et fait que la désensibilisation fonctionne moins bien chez l'adulte. Une coopération ORL/allergologue est préconisée. Qu'elle soit allergique ou non, dans un cas sur deux elle évolue vers l'asthme : c'est l'élément primordial à retenir. Il faut donc toujours traiter les rhinites efficacement et ne pas sous-estimer la gravité de l'évolution.
Dans quels cas faut-il adresser à un allergologue chez l'enfant et l'adulte ?
Protégeons nos patients avec des traitements de fond.
Enfant né dans une fratrie avec antécédents d'allergie chez deux frères : un allergique aux pollen de graminées, de fleur, à la pomme et au kiwi (we've got a bingo !) et un autre seulement au bouleau.
A-t-il un risque accru d'allergie ? Quelle surveillance ? Des conseils à donner aux parents ?
C'est l'atopie qui se transmet et non l'allergie elle-même. Cet enfant a donc un bagage génétique à fabriquer des IgE mais on ne peut pas savoir si il fera tout comme des allergies plutôt ORL ou s'il fera de l'allergie alimentaire grave ou de l'asthme ou de la dermatite atopique. Il faut dire aux parents d'être vigilants et de consulter un allergologue au moindre doute. S'il est atteint d'une dermatite atopique, il faut le traiter très efficacement pour ne pas que les allergènes traversent la barrière cutanée. Pour finir, aucun régime alimentaire préventif. Au contraire, plus on diversifie tôt les aliments à risque, plus on force la tolérance.
Sur le plan respiratoire, il existe de désensibilisation en comprimés sublinguaux (acariens, pollens de graminées, pollen de bouleau) : preuve AMM et recommandés par le Gina (Global Initiative for Asthma). Il existe également des désensibilisations en liquide (Apsi) livrées chez le patient. Elle n'ont pas fait l'objet d'un parcours AMM mais nous avons des preuves d'efficacité et de tolérance en randomisé double aveugle contre placebo et des données de vie réelle sur des cohortes rétrospectives. Il n'y a pas d'étude comparative entre le deux formes. Nous choisissons en fonction du profil du patient et de l'allergène à désensibiliser, les Apsi (allergènes préparés spécialement pour un individu) offrant une gamme plus large (chat, chien, pollen d'urticacées, nombreux pollens d'arbres, moisissures).
Sur le plan alimentaire, on ne parle pas de désensibilisation mais d'accoutumance. Pour les aliments à haut risque de réaction sévère (légumineuses, fruits à coque) nous faisons des ré-introductions à l'hôpital poursuivies en ambulatoire : l'objectif n'est pas la guérison mais l'amélioration de la qualité de vie en permettant au patient d'ingérer des petites doses.
Enfin, sur le plan médicamenteux, dans les cas nécessitant absolument la reprise du médicament (chimiothérapie, bêtabloquants, aspirine...), certains centres pratiquent des inductions de tolérance.
Quel antihistaminique choisir en première intention svp ?
Pour l'anti-H1, il est recommandé de débuter par un anti-H1 de 2e génération, en raison de son profil de tolérance. Aucun anti-histaminique n'est supérieur à un autre en termes d'efficacité. En revanche, les patients ont tous une sensibilité envers une sous-classe d'antihistaminique, ce qui explique pourquoi ils réagissent à certains et pas à d'autres : il ne faut donc pas hésiter à changer de sous-classe pour trouver celui qui correspond le mieux au patient.
La première sous-classe est les pipérazines : cétirizine et lévocéti.
Deuxième sous-classe : pipéridine, c'est-à-dire loratadine, ébastine, desloratadine, rupatadine.
Troisième sous-classe : bilastine.
En cas d'inefficacité ou de problème de tolérance : changez de sous-classe !
Merci Dr Cottet d’avoir participé à ce Live chat avec les lecteurs du « Quotidien ».
À vous le mot de la fin.
N'hésitez pas à consulter le site de la Semaine mondiale de l'allergie qui se déroule cette semaine : vos y trouverez des vidéos, des podcasts, des reportages où vous pourrez apprendre plein de choses.
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