Après des mois d’échanges entre la Cnam et les représentants des syndicats médicaux et une fin de négociation haletante, un accord a finalement été obtenu avec comme chacun le sait pour les généralistes l’augmentation de la valeur du G à 30 euros, de nouvelles consultations dites longues, et un forfait médecin traitant modifié. Quant aux spécialistes ils ont obtenu une revalorisation de l’APC, consultation d’avis de second recours, qui passe à 60 euros, mais les conditions de cotation ne changent pas : uniquement en cas d’adressage par le médecin traitant. Les conditions d’adressage interspécialité sont en hypothétique devenir, sujet conflictuel avec un syndicat de médecins généralistes. En l’absence de revalorisation de la CSC, spécificité cardiologique actuellement prédominante dans notre spécialité, la proportion de cotation de l’APC devrait progresser.
Rendez-vous pour les négociations de la CCAM
Pour les spécialistes la revalorisation de la classification commune des actes médicaux (CCAM), cotation des actes qui sera à nouveau mise en chantier en 2025 s’annonce difficile, mais la condition pour faire partie de la négociation, capitale pour notre spécialité très technique, est de rester dans la convention. Quelques actes, mais très peu vont d’ores et déjà être revalorisés dans six mois grâce à la majoration du coefficient de charge. La plupart ne bougeront pas.
D’autre part l’entrée des « Équipes de soins spécialisés » dans le droit commun est une avancée, avec un financement significatif, encore faut-il disposer d’une équipe suffisamment étoffée, et se soumettre à un formalisme administratif. Enfin l’assiette de l’Optam : secteur conventionnel avec dépassement autorisé, n’est quasiment pas élargie dans les régions où le dépassement est minime habituellement. Dernier élément : un nouveau forfait Rosp à mettre uniquement au crédit de nos représentants.
Cette revalorisation n’est pas capable de compenser l’inflation des charges des années passées et encore moins de celles à venir
Au total nous aurons à peu près 2,5 % d’augmentation de notre chiffre d’affaires pour au minimum trois ans ce qui est peu ! Cette revalorisation n’est pas capable de compenser l’inflation des charges dans nos cabinets des années passées, et encore moins des années à venir.
L’absence de revalorisation qui ne favorisera que la multiplication des examens techniques, ne sera pas à même d’encourager les investissements. La charge des tâches administratives va s’alourdir. Nous aurons encore moins d’attractivité pour l’installation des jeunes cardiologues en libéral. On le voit la variable de négociation était limitée. Nos représentants syndicaux n’en ont eu que plus de mérite à arracher quelques concessions de dernière minute. Mais peut-on appeler cela négocier lorsque les variations sont à la marge ? Et il aurait fallu plus d’union syndicale pour proposer et maintenir fermement une position claire sur certains sujets.
Le président de la caisse nationale a beau jeu dans les médias, de dire qu’il faudrait refondre le système, que celui-ci est à bout de souffle, alors que c’est lui-même qui en a été le maître. Il devrait plutôt affirmer qu’il était contraint par sa tutelle et qu’il s’agit de faire passer une pilule plutôt amère.
En revanche on ne demande rien aux mutuelles qui ont pourtant déjà provisionné les augmentations dans leurs cotisations. Ce sont pourtant ces assureurs qui pourraient compenser un certain espace de liberté tarifaire encadrée.
Mais après tout ce grand « raout » il faut continuer à travailler comme tous les jours sur le terrain, et constater que les mêmes problèmes demeurent. Le défi de la démographie médicale des spécialistes est alarmant, avec des disparités territoriales flagrantes notamment chez les cardiologues libéraux, le départ des anciennes générations et les nouvelles organisations de consultation des générations suivantes. Il est étonnant que les pouvoirs publics n’en tiennent pas compte pour les spécialistes et ne s’emparent pas du sujet.
Au bout de la chaîne c’est le patient qui souffre, celui qui ne va pas consulter car il n’y a pas de cardiologue disponible avant des mois. C’est notre emploi du temps qui est sans arrêt bousculé par des demandes pressantes, que nous acceptons tous en plus de notre surcharge de travail. Je crains que par cette convention sans imagination, qui ne nous est certes pas défavorable dans le contexte économique actuel, nous ayons acté l’entrée dans un système de soins ambulatoire médiocre, et qu’au bout du compte c’est la santé de nos patients qui en pâtisse.
Se regrouper est devenu crucial
Face à cela il est crucial pour nous de nous regrouper, d’imaginer de nouvelles structures, plus légères, plus souples, qui nous permettent de travailler avec des acteurs techniques, des infirmiers, des médecins, en harmonie avec les structures hospitalières. Nous devons nous emparer des sujets organisationnels.
En cardiologie libérale nous avons la chance de disposer déjà de structures syndicales fortes qui sont à la pointe et innovent sans cesse pour apporter aux cardiologues de terrain les outils que ce soit en matière organisationnelle, administrative ou de formation. Encore faut-il que nous prenions tous conscience de cet enjeu majeur. Notre spécialité est “périssable” et il faut que les jeunes qui nous suivent se mobilisent et viennent nous rejoindre car nous ne survivrons que si nous sommes tous regroupés et présents.
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