La désertification médicale n'inquiète pas seulement les autorités de santé et la population. Elle préoccupe aussi le ministère de l'Économie et des Finances. Au point que la Direction générale du Trésor a décidé de consacrer son bulletin mensuel d'octobre (Trésor-Eco) à cette problématique. Dans un document de 12 pages intitulé « Comment lutter contre les déserts médicaux ? », Daniel Caby (data scientist à la Cour des comptes), Jean-Denis Zafar (ingénieur polytechnicien, administrateur de l'Insee) et Victore Cluzel (rapporteur extérieur et data scientist à la Cour des comptes) préconisent d'agir sur les modalités de répartition sur le territoire. « Une adaptation temporaire et ciblée du principe de libre installation pourrait être envisagée dans les zones particulièrement sur-dotées, afin d'éviter une accumulation de l'offre là où elle est déjà très forte », écrivent-ils.
Derrière ce terme d'adaptation, se cache en réalité un conventionnement sélectif qui tait son nom. « Par exemple, l'accès à certaines zones géographiques déjà fortement dotées en médecins pourrait temporairement être conditionné à la cessation d'activité d'un médecin exerçant la même spécialité », poursuivent les experts. Cette mesure serait mise en place de façon progressive et nécessiterait « une étroite collaboration avec les médecins », « afin de ne pas risquer d'affecter l'attractivité de l'exercice libéral ».
La Cour des comptes (dont font partie deux auteurs) avait déjà proposé un « conventionnement sélectif » dans les zones surdotées en médecins (une installation pour un départ) où les nouveaux entrants n'auraient le droit de s'installer qu'en secteur I.
Postes fléchés et seconde chance aux meilleurs recalés
Jugeant « modeste » le succès des bourses à l'installation, et « contrastée » l'efficacité des incitations conventionnelles, le bulletin Trésor-Eco suggère deux autres solutions pour améliorer la démographie médicale.
« Des places fléchées vers des zones sous-denses pourraient être offertes au moment de l'entrée à l'internat », proposent les auteurs. En plus des places accessibles par les étudiants selon leur classement aux ECN, « une dimension territoriale d'exercice en zone sous-dense pourrait être ajoutée au choix de la spécialité ». « Les étudiants choisissant ces places s'installeraient, une fois leur internat terminé, dans une zone où la continuité des soins est menacée au sein de la région où ils auraient effectué leur internat. Cela permettrait de fournir une réponse rapide aux problématiques d'accès aux soins de la région de formation concernée. »
Enfin, pour inciter les nouveaux médecins à s'installer dans un territoire désertifié, les économistes souhaitent donner une seconde chance aux meilleurs étudiants recalés à l'issue de la première année. Ceux-ci pourraient ainsi se voir donner « une chance de poursuivre leur formation médicale, sous réserve, à la fin de leurs études, de s'engager à exercer pour une durée déterminée (par exemple 10 ans) dans une zone sous-dense », écrivent-ils.
Pas sûr que ces propositions déclenchent l'enthousiasme de la nouvelle génération.
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