À l’approche de la présidentielle, la question de l’accès aux soins est sur toutes les lèvres. Après le collectif réunissant associations et syndicats de professionnels de santé notamment, c’est au tour du Sénat de livrer ses réflexions sur le sujet.
La délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation a remis ce mercredi le rapport : les collectivités à l’épreuve des déserts médicaux : l’innovation territoriale en action. Les deux sénateurs rapporteurs Philippe Mouiller et Patricia Schillinger sont allés à la rencontre des acteurs locaux pour répertorier les initiatives des collectivités territoriales en matière d’accès aux soins, identifier les bonnes pratiques et essayer d’en faire émerger « une boîte à outils ».
Construire les solutions avec les professionnels de santé
Le rapport formule donc douze recommandations : sept à destination des élus locaux et cinq en direction de l’État.
Avant tout, les sénateurs soulignent l’importance de porter des projets en concertation avec les professionnels de santé. Que les projets de santé soient « partenariaux » est pour eux un prérequis à leur réussite.
« Nous avons vu des projets de maisons de santé par exemple qui restent des murs vides car ils n’ont pas été conçus avec les professionnels de santé », explique Françoise Gatel, présidente de la délégation.
Le rapport appelle également à renforcer les liens entre les universités et les collectivités territoriales. Les sénateurs recommandent également de développer les dispositifs incitatifs pour favoriser l’installation des médecins. « C’est un panel qui peut aller de la bourse pour les étudiants jusqu’au dernier échelon représenté par le salariat », explique Philippe Mouiller.
Les aides doivent aussi être personnalisées, pas seulement à destination des professionnels de santé mais aussi de leurs familles, par exemple pour aider les conjoints à trouver du travail localement, etc. Le rapport sénatorial encourage aussi les élus à « généraliser les instances locales de dialogue et de concertation dans le domaine de la santé », en multipliant les contrats locaux de santé (CLS) et en favorisant la création de CPTS notamment.
Télémédecine seulement en dernier recours
Pour chaque territoire il s’agit aussi de trouver « l’échelon local le plus pertinent », en prenant en compte deux éléments : la soutenabilité financière et le niveau d’expertise requis.
« Cela dépend des territoires, des populations, des relations intercommunales, etc », souligne M. Mouiller.
Enfin, les sénateurs évoquent la télémédecine parmi les réponses possibles, « mais seulement en dernier recours ». « C’est un outil dans la panoplie mais dans le dernier tiroir, et il ne doit pas s’agir d’une initiative isolée », estiment les rapporteurs.
Faire plus de place aux élus locaux dans les ARS
Parmi les recommandations à destination de l’État, les sénateurs, sans prendre position, estiment qu’il est indispensable de remettre sur la table le débat sur la liberté d’installation et la formation.
« 100 % des élus que nous avons rencontrés nous disent qu’il faut relancer la discussion sans tabou », précise Philippe Mouiller.
Autre réflexion à engager, celle sur les risques de compétition entre les territoires et de surenchère. « Nous avons été témoin de certaines expériences heureuses mais qui l’ont été au détriment des voisins », relate le sénateur des Deux-Sèvres.
La délégation estime en outre que les élus locaux doivent être associés à la vision stratégique nationale.
Quant à la relation et au rôle des ARS, les sénateurs recommandent d'amplifier le rôle facilitateur des agences régionales pour avoir plus de proximité avec les élus locaux. Pour que ces derniers aient un poids plus grand dans la politique menée par les ARS, les sénateurs suggèrent donc de « renforcer le poids et les fonctions des élus locaux au sein du conseil de surveillance de l’ARS, d’élargir les attributions du conseil de surveillance des ARS et d’associer les collectivités locales à la détermination des « déserts médicaux » ».
Si la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation insiste sur l’urgence de la situation, elle ne souhaite pas non plus préconiser des mesures chocs de manière irréfléchie. « Il ne suffit pas de dire : nous allons décréter l’implantation de dix médecins à tel endroit. Interdire aux gens de tomber malade serait plus efficace. C’est un sujet de société, il faut créer tout un écosystème pour que cela fonctionne », estime Françoise Gatel.
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