Christian Favart est un pionnier de la télémédecine. Depuis la fin d’année dernière, ce pharmacien a installé une station de téléconsultation au sein de son officine localisée dans le centre historique de Sens, dans l’Yonne. Les patients peuvent y consulter un généraliste sans se rendre dans un cabinet médical. Le dispositif est autorisé par l’ARS dans le cadre des expérimentations menées depuis plusieurs années en France.
À ce stade, les malades ne règlent pas leur consultation. Dans les prochaines semaines, le pharmacien espère passer au stade supérieur en disposant de terminaux permettant de prendre la carte Vitale des malades, dans le cadre de l'avenant sur la télémédecine signé fin 2018.
« En l’espace de deux mois et demi, on a traité entre 50 et 100 patients », annonce Christian Favart au « Quotidien ». Une quinzaine de médecins urgentistes assurent les téléconsultations depuis Paris, explique le pharmacien. Il a aménagé un espace fermé où trône la station de vidéoconférence : un grand écran surmonté d’une caméra, installé sur une borne et auquel sont branchés des équipements de mesure : température, tension, glycémie, taux d’oxygène dans le sang, ECG… Une caméra HD permet de visualiser un bouton, une plaie… « C’est comme un petit cabinet de médecin ! », raconte Christian Favart.
« On n’est pas là pour faire un diagnostic ! »
Le pharmacien détaille le déroulement d’une consultation : « Avant toute chose, on procède à un petit interrogatoire. On demande si le patient a un médecin traitant, s’il a tenté d’avoir un rendez-vous… »
Il évalue également la pertinence de réaliser une consultation à distance, en fonction de la situation du malade. « On peut lui suggérer d’attendre un rendez-vous avec son médecin traitant ou, au contraire, si on sent que ça ne va pas, l’orienter vers le 15. Mais on n’est pas là pour faire un diagnostic ! Généralement, on passe à la téléconsultation », explique le professionnel qui précise que c’est déjà la mission de conseil qu’il assure auprès des clients de l’officine. Les candidats à la téléconsultation sont des gens de passage, parfois des patients sans médecin traitant ou qui n’ont pas pu avoir de rendez-vous avant plusieurs jours.
Les pathologies les plus fréquemment rencontrées sont des cystites, des états grippaux, des gastroentérites… Avant d’engager la consultation, le pharmacien procède au relevé des constantes basiques grâce à l’équipement de la station, et en fonction de la nature du problème relaté par le patient. Les données sont stockées en local et accessibles à distance de manière sécurisée par le médecin.
« 5 à 10 minutes d’attente au maximum »
La mise en relation avec un généraliste est généralement rapide, pas plus de 5 à 10 minutes. « Au bout de trente secondes, les patients oublient qu’ils parlent à un écran ! », témoigne Christian Favart. Le médecin peut demander de réaliser des mesures supplémentaires en cours de consultation s’il l’estime nécessaire. « Au total, la consultation dure de 10 à 20 minutes, confie le professionnel. Plus longtemps si c’est nécessaire. Les praticiens n’hésitent pas à contacter le médecin traitant du patient s’ils l’estiment nécessaire. Ils peuvent lui envoyer un compte rendu. »
En fin de consultation, le généraliste peut établir une ordonnance. « Bien sûr, le patient est libre de se fournir dans la pharmacie de son choix », insiste Christian Favart.
Les urgences applaudissent
Que pensent les médecins de Sens de cette initiative ? « Les urgences applaudissent des deux mains, SOS Médecins aussi, parce qu’ils sont archi-débordés. Les médecins de ville avec qui j’en ai parlé sont pour les trois quarts positifs. On leur explique qu’on ne leur “pique” pas leurs patients, qu’au contraire, on peut assurer un suivi entre deux rendez-vous », explique le pharmacien.
Reste la question épineuse du remboursement des consultations par l’Assurance-maladie. L’avenant à la convention médicale prévoit une prise en charge lorsque le patient est connu du médecin, « sauf situations particulières ». Des dérogations existent : « Pour les patients ne disposant pas de médecin traitant ou dont le médecin traitant est indisponible dans le délai compatible avec leur état de santé, il pourra être fait exception au parcours de soins et à l’obligation de connaissance préalable du patient par le médecin pratiquant la consultation. »
Mais dans ce cas, la consultation doit être assurée dans le cadre d’une organisation spécifique (maison de santé, CPTS…), garantissant un suivi des soins par des professionnels de proximité. Pas sûr que la pharmacie de Christian Favart entre dans ce cadre. Le pharmacien avoue lui-même attendre des garanties sur ce point.
À l’AP-HM, dans l’attente du procès d’un psychiatre accusé de viols
Le texte sur la fin de vie examiné à l'Assemblée à partir de fin janvier
Soumission chimique : l’Ordre des médecins réclame un meilleur remboursement des tests et des analyses de dépistage
Dans les coulisses d'un navire de l'ONG Mercy Ships