Il y a sans doute un avant et un après la déflagration ChatGPT de novembre 2022. En tout cas, pour l’expert David Gruson, fondateur d’Ethik-IA, « c’est l’outil dans l’histoire informatique qui se diffuse le plus rapidement dans la santé et ce serait une erreur de croire que le secteur de l’autonomie serait moins concerné par la révolution de l’IA que les autres », a-t-il expliqué dans le cadre des récentes assises nationales des soins en Ehpad, lors d’une table ronde dédiée au numérique et à l’intelligence artificielle.
Dépistage cognitif
De fait, dans le secteur du grand âge, il existe déjà plusieurs domaines d’application des algorithmes comme la mécatronique – combinaison de la mécanique, de l'électronique et de l'informatique pour concevoir des systèmes « intelligents » – ou la robotique appliquée pour la rééducation de la marche, le maintien en autonomie ou les petits robots de stimulation neurocognitive. L’IA est même déjà utilisée en routine dans l’apprentissage automatique pour la reconnaissance d’images afin de repérer les facteurs d’émergence de troubles neurodégénératifs.
Le Dr Florian Maronnat, de l’Association des jeunes gériatres, confirme la dynamique. « Depuis le Covid, l’IA s’est bien développée pour la télé-expertise et l’analyse d’images. » Mais le praticien modère l’enthousiasme pour cette technologie qui reste « primaire » à ce stade. « L’IA analyse le poids, l’albumine et se contente de donner des conseils nutritionnels. » Mais la puissance des dispositifs, qui dépend notamment des données transmises, devrait croître rapidement. Déjà, le médecin développe un outil pour les soins primaires qui s'intègre dans un projet visant à développer un système numérique multimodal de dépistage cognitif. Ce travail a rejoint un projet porté par l'hôpital Charles Foix et Sorbonne Université avec une étude clinique en cours. L'application y est testée auprès de sujets âgés sains, atteints de troubles légers et de troubles majeurs. La solution est terminée pour la programmation mais n’est pas encore commercialisée.
Depuis le Covid, l’IA s’est bien développée pour la télé-expertise et l’analyse d’images
Dr Florian Maronnat, Association des jeunes gériatres
Révolutionner l’orthodontie ?
Dans un autre registre, DentalMonitoring, nouvelle licorne française, ambitionne de révolutionner l'orthodontie. La société propose un dispositif fondé sur l'IA permettant un suivi quasi en temps réel des patients. Le professionnel de santé filme l’intérieur de la bouche d’un résident en Ehpad, la vidéo est convertie en panoramique dentaire. Le système détecte les risques de caries et d’inflammation et déclenche une alarme le cas échéant. D’autres perspectives se dessinent avec des solutions émergentes d’IA permettant de faciliter le diagnostic en ophtalmologie ou traumatologie (mais qu’il faudra convertir à l’échelle sur le marché).
Quant à l’IA générative, elle promet d’assurer la production de comptes rendus et de synthèses médicaux (de plus en plus structurés). Docaposte – filière numérique du groupe La Poste – développe un premier cas d’usage d’IA générative souveraine en santé. Ce prototype pourrait servir au médecin (hospitalier ou en Ehpad) à générer automatiquement sa lettre de liaison, questionner le moteur d'IA sur un point précis du parcours ou rédiger une synthèse à partir des informations clés de l'historique du parcours patient.
Exosquelettes, compagnons digitaux : innovations au bénéfice des soignants
Le secteur de l’autonomie est propice aux innovations digitales permettant de faciliter l’exercice des soignants. Luca Celli, ergothérapeute, pilote le projet exosquelette dans le cadre du groupe LNA Santé qui réunit 84 établissements. Un prototype a été testé en Ehpad afin de réduire les accidents du travail des aides-soignantes, tout en maintenant les gestes de sécurité. Le principe est de décharger l’effort du dos vers les jambes. « Nous avons ciblé la toilette au lit car il n’est pas possible d’utiliser un lève-personne », raconte l’expert. À l’origine, cette technologie n’était pas adaptée aux soins mais à des métiers masculins comme la logistique lourde. Chez les soignants des Ehpad – majoritairement des femmes – il a fallu modifier le système pour l’adapter à la morphologie féminine.
Pour ses blouses blanches, Clariane (ex-Korian) a développé de son côté un compagnon digital mobile (appli Koala), testé dans des établissements pilotes (lire aussi page 19). L’objectif est de simplifier les tâches quotidiennes et administratives en facilitant le partage d’informations en temps réel, la numérisation des procédures et l’interconnexion des outils. À terme, il servira à la traçabilité des soins : transmission, signature des actes de soins ou même déclaration d’événements indésirables graves.
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