Depuis les années 2000, l’espoir d’éliminer la syphilis aux États-Unis s’éloigne de plus en plus. Et la forme congénitale a enregistré son plus haut taux depuis les trente dernières années avec 3 761 cas signalés en 2022 dans le pays. La transmission mère-enfant est estimée à 3,6 millions de dollars en espérance de vie corrigée de l'incapacité et à 309 millions de dollars de frais médicaux globaux.
Le phénomène inquiète outre-Atlantique. Contrairement à la France, où le taux d’infection maternofœtale est rarissime, le dépistage des femmes enceintes n’y est pas systématique, malgré les recommandations et les alertes des autorités sanitaires. Au point que le célèbre New England Journal of Medicine consacre une revue sur le sujet.
Actuellement, le seul agent antimicrobien sûr et efficace pour traiter la syphilis durant la grossesse est la pénicilline G injectée par voie intramusculaire. Des études de cohortes prospectives ont mis en évidence une efficacité à plus de 95 % lorsqu'une dose unique de 2,4 millions d’unités est administrée en début d’infection ; l’efficacité augmente faiblement quand les doses sont plus élevées ou plus fréquentes.
Des signes échographiques
Il n’existe aucun test pour le diagnostic de la syphilis congénitale. L’échographie est la méthode la plus couramment employée pour rechercher chez un fœtus des signes d’infection. Ils peuvent être détectés après 18 semaines de gestation, à partir du moment où le fœtus est capable de développer une réponse immunitaire. Sont notamment recensés l’hépatomégalie (dans 80 % de cas), l’anémie (33 %), la placentomégalie (27 %), l’hydramnios (12 %) et l’anasarque fœtoplacentaire non immunologique (10 %). À noter que l'absence d'anomalies à l’échographie n'exclut pas une infection congénitale. Pour les fœtus à risque, la prévalence à l’accouchement peut varier de 12 à 15 %.
Au vu de l’absence de test diagnostic chez le nouveau-né, les décisions quant au traitement reposent généralement sur une combinaison de facteurs, notamment l'identification de la syphilis chez la mère, l'évaluation du traitement maternel, l'intervalle entre le début du traitement maternel et l'accouchement (un intervalle supérieur à 30 jours est considéré comme adéquat), la comparaison des titres des tests sérologiques non tréponémiques de la mère et du nouveau-né à l'accouchement et la présence ou l'absence de signes (cliniques, biologiques et radiographiques) de syphilis chez le nouveau-né.
Majorité de cas asymptomatiques à la naissance
L’étude recense un certain nombre d’axes d’amélioration dans la prise en charge de cette maladie. À commencer par le taux élevé de cas asymptomatiques à la naissance. Entre 2014 et 2018, 55,5 % des nourrissons américains atteints de syphilis congénitale étaient asymptomatiques. Pour 2 % de ces nourrissons, le diagnostic a été établi après la période néonatale. Chez ces nouveau-nés, les manifestations peuvent survenir plusieurs jours voire plusieurs mois après la naissance.
Un traitement efficace de la syphilis périnatale repose donc sur une prise en charge rapide au cours de la grossesse. Des soins prénataux retardés ou inexistants (dans 42 % des cas de syphilis périnatale), un traitement maternel inadéquat (31 %), une identification tardive de la séroconversion maternelle au moment de la grossesse (14 %) et des soins prénataux sans dépistage de la syphilis (8 %) figurent parmi les occasions manquées les plus courantes pour la prévention. Sur les 3 761 cas de syphilis congénitale signalés en 2022, 88 % étaient imputables à l’absence de test diagnostic chez les femmes enceintes infectées, à un traitement inadéquat ou les deux.
L’accès aux soins en question
La syphilis, comme de nombreuses infections sexuellement transmissibles, affecte davantage les populations ayant un accès limité aux soins de santé. Un diagnostic rapide à la naissance permettrait de réduire le fardeau du suivi pour des patients confrontés à des obstacles socio-économiques tels que le transport, la garde d'enfants ou les coûts d'assurance. La crainte de mesures juridiques ou punitives entraînant la perte de la garde des enfants constitue un frein à l’élimination de la syphilis congénitale.
L’identification et le traitement immédiat par les services d’urgence peuvent favoriser l’équité en matière de santé pour les personnes touchées de manière disproportionnée par les IST, souvent éloignés des soins. Côté médicaments, si la pénicilline G fait l’objet d’une pénurie - ce qui est actuellement le cas aux États-Unis -, l’administration doit être réservée en priorité aux femmes enceintes et aux nouveau-nés. L'amoxicilline à forte dose fait actuellement l’objet d’une étude pour le traitement pendant la grossesse.
Stafford I et al. N Engl J Med 2024;390:242-53
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