« Très jeune, j’ai pris conscience que cette maladie – le cancer – n’épargne pas ! Et que son annonce est une bombe. Une émanation violente et dévastatrice », confie Isabelle Catherine. « Je me souviens du cancer des poumons de ma tante de cœur à 54 ans… Et de cette annonce difficile de l’arrêt des soins thérapeutiques par le cancérologue qui l’informait de son entrée en soins palliatifs. (…) Dans un cri de colère, elle lui répondait : “ça veut dire que je vais crever ?” Je me remémore également l’annonce maladroite du décès imminent de mon grand-père paternel à 58 ans : il ne lui reste plus que quelques mois à vivre ». Deux expériences fondatrices qui ont guidé ses choix professionnels à venir !
Patiente standardisée
Car depuis 2016, Isabelle Catherine intervient, au sein de Gustave-Roussy en qualité de « patiente standardisée », formée à simuler l’histoire d’un malade et à reproduire tous les signes cliniques. Elle effectue des prestations ponctuelles, dans le cadre de formations internes, à la demande des Drs Pascal Rouby, psychiatre, et François Blot, médecin réanimateur, spécialiste d’éthique médicale. Souvent prédéfinis, les scenarii sont travaillés en amont. Ainsi, avec d’autres comédiens, Isabelle Catherine interprète des saynètes autour de l’annonce en cancérologie. « On peut travailler sur quatre types d’annonce : du diagnostic de cancer, de la rechute, des dommages liés aux soins et de l’arrêt du traitement avec l’entrée en soins palliatifs. »
Les praticiens sont rétifs à prendre la place du malade sur scène
Les médecins en formation jouent leur propre rôle. « Parce que le but est d’échanger à la fin des saynètes. Et de travailler sur chacune des réalités relationnelles grâce à la pédagogie théâtrale. Et, à travers la bienveillance du groupe, le professionnel de santé prend de la distance. Ainsi, il peut se voir être », insiste Isabelle Catherine.
Par ailleurs, « les praticiens sont rétifs à prendre la place du malade sur scène », constate celle qui se fait fort d’incarner le patient. Dans sa pathologie bien sûr. Mais aussi, dans son histoire, sociale et familiale… La jeune femme se souvient d’un rôle en particulier. Celui d’une mère de trois jeunes enfants. À son chevet, un oncologue. Il est chargé d’annoncer son entrée en soins palliatifs. La mise en scène a favorisé le travail d’une relation soignant-soigné de qualité. Soit entre empathie et savoirs, scientifique et technique. Le travail théâtral a permis de décortiquer tous les freins face à l’imminence de la mort. Lever les peurs et les angoisses de part et d’autre ! Et réussir, côté soignant, à établir un lien d’écoute. Saisir que l’urgence pour cette maman face à sa mort se focalisait essentiellement sur la gestion administrative. Un rôle puissant qui a fait l’objet d’un e-learning.
Thèse sur les compétences relationnelles des médecins
C’est certes, une petite niche professionnelle. Mais pour Isabelle Catherine, c’est le parfait trait d’union entre soin et art dramatique. Et ce n’est pas le seul. Car la jeune femme, originaire de Gonesse, a d’abord tenté des études de médecine à Rennes. Puis une première année de formation en soins infirmiers. Mais la passion des planches, découverte dès l’âge de cinq ans, lui fait prendre la direction du Théâtre Le Point Comédie de Montpellier, après une formation aux cours Florent et des études théâtrales à la Sorbonne. Et sans pour autant quitter la scène (sur laquelle elle se produit plus classiquement), Isabelle Catherine, toujours perméable à la délicate problématique de l’annonce faite au patient, présente en 2021, une thèse Arts-Etudes Théâtrales sur « les compétences relationnelles des médecins développées grâce à la pédagogie théâtrale » à l’Université Paris 8 Vincennes - Saint-Denis. Ses recherches universitaires l’ont ainsi portée à l’observation des entretiens d’annonces en cancérologie à Gustave-Roussy à Villejuif et à l’Institut Régional du Cancer de Montpellier.
Soigner l’annonce
Par ce biais, la chercheuse fait le constat que si le praticien est reconnu pour ses compétences scientifiques et techniques, il est néanmoins peu formé à la communication relationnelle. La comédienne va bientôt reprendre son rôle de patiente standardisée, mais fois-ci, dans le cadre des Examens cliniques objectifs structurés (ECOS) à l’Université Paris Saclay.
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