Alors que le grand débat national touche à sa fin, les propos du Premier ministre tenus devant l'Autorité de la concurrence, visant à redonner du pouvoir d'achat aux Français, ont mis le secteur de la biologie en émoi.
La semaine dernière, Édouard Philippe avait annoncé vouloir s'attaquer aux dépenses « contraintes » – celles dont on ne peut pas se passer et dont chaque hausse injustifiée « s'apparente à un impôt caché ». « Le temps est venu de résorber quelques-uns de ces angles morts du pouvoir d'achat », a plaidé le locataire de Matignon. Il souhaite en particulier qu'un travail soit fait avec les laboratoires d’analyses médicales « pour leur permettre de baisser leurs prix, en levant des contraintes, comme celle de réaliser l’essentiel des analyses sur place ».
Rationalisation
Cette sortie a surpris la profession. Au nom des libéraux, le Syndicat des biologistes (SDB) dénonce « des annonces en trompe-l’œil » sur la baisse des prix. « Les actes de biologie médicale sont des actes remboursés par la Sécurité sociale ou les complémentaires santé, sur lesquels le reste à charge est faible ou nul. Une économie sur le coût des analyses ne se matérialisera pas en pouvoir d’achat pour les Français, mais en économie pour la Sécu », fait valoir la structure, rappelant que la profession est déjà dans une enveloppe de financement « contrainte ».
Le SDB est surtout fermement opposé à l'externalisation larga manu des analyses – actuellement, 15 % du volume des examens peuvent être transmis à d'autres laboratoires. « Si l'on passe à 30, 40 % des volumes analysés sur de grands plateaux nationaux d'analyses, on perd complètement notre modèle de proximité », s'indigne François Blanchecotte, son président.
Les hospitaliers et les jeunes mobilisés aussi
Cette « délocalisation » pourrait même poser un problème « de santé publique », craint le Syndicat des jeunes biologistes médicaux (SJBM). « Les délais de rendus d’examens sont de plusieurs jours lorsque les analyses sont faites ailleurs, or dans des cas d'urgence c'est une perte de chance pour le patient », argumente le Dr Lionel Barrand, président du SJBM, qui souhaite garantir l'accès aux examens biologiques d'urgence.
Avec les représentants des biologistes hospitaliers et des internes*, les jeunes du SJBM ont adressé une lettre à Edouard Philippe pour afficher leurs inquiétudes. Plutôt que de délocaliser la réalisation des analyses, ils proposent un « assouplissement »… de l’accréditation, afin qu’elle porte sur 100 % des sous-familles d’examens et non sur 100 % des examens.
Dans leur courrier commun à Matignon, les syndicats de biologistes alertent à nouveau sur la financiarisation croissante des laboratoires « qui a pour effet de créer des usines de biologie médicale, délétères à la proximité, et de détourner les cotisations sociales des Français et leurs impôts dans le capital de fonds d'investissement étrangers ».
* Syndicat national des biologistes des hôpitaux (SNBH), Syndicat national des médecins et biologistes des CHU (SNMB-CHU), Fédération nationale des syndicats des internes en pharmacie et biologie médicale (FNSIP-BM), Fédération nationale des syndicats de biologistes hospitaliers et hospitalo-universitaires (FNSPBHU).
À l’AP-HM, dans l’attente du procès d’un psychiatre accusé de viols
Le texte sur la fin de vie examiné à l'Assemblée à partir de fin janvier
Soumission chimique : l’Ordre des médecins réclame un meilleur remboursement des tests et des analyses de dépistage
Dans les coulisses d'un navire de l'ONG Mercy Ships