« Ce sera très difficile », « beaucoup d’incertitudes » : la campagne compliquée de candidats médecins

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Publié le 27/06/2024
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À trois jours du premier tour des législatives, quatre candidats médecins (issus de la majorité ou LR) ont confié au Quotidien la difficulté de faire campagne sur le terrain.

Dernière ligne droite : le scrutin approche, la pression monte, les candidats aux législatives sont sur le front. Quatre médecins en campagne, sous des étiquettes diverses, racontent la difficulté de leur tâche dans cette campagne éclair inédite, face aux menaces qui pèsent sur l’issue des résultats.

Je me bats pour expliquer que les extrêmes sont néfastes

Dr Jean-Pierre Pont (Renaissance, Pas-de-Calais)

Dans la 5e circonscription du Pas-de-Calais, le médecin généraliste et député sortant Jean-Pierre Pont (Renaissance) mesure l’ampleur du défi local. Face à un candidat RN et un socialiste soutenu par le Nouveau Front populaire, il essuie les plâtres de la dissolution. « Je me bats pour expliquer que les extrêmes sont néfastes et être au deuxième tour, mais ce sera très difficile pour moi… », concède-t-il. L’omnipraticien, qui s’était particulièrement investi sur le projet de loi fin de vie, observe que la santé ne s’impose pas dans le débat, ni national, ni local. « Je regrette que ce soit occulté. Ce dont on me parle, c’est la sécurité et le pouvoir d’achat… », raconte-t-il.

Une campagne plus violente que les autres

Dr Stéphanie Rist (Renaissance, Loiret)

Même constat difficile du côté de sa collègue, également députée sortante de la majorité, la Dr Stéphanie Rist. La rhumatologue hospitalière, candidate à sa succession dans la 1re circonscription du Loiret, confie que la santé ne s’impose pas comme un thème majeur dans cette campagne éclair. En revanche, elle souligne que le tract de son opposant du Nouveau Front populaire porte la mesure de régulation à l’installation. « L’occasion pour moi de défendre mon opposition à toute coercition », glisse-t-elle, ajoutant que « c’est une campagne plus violente que les autres, que ce soit dans les propos ou les affiches arrachées ». Quant à l’issue du scrutin, « il y a beaucoup d’incertitudes, avec des triangulaires possibles si la participation est bien de plus de 60 % », confirme l’ancienne rapporteure du budget Sécu. Mais, ajoute-t-elle, étant médecin, elle conserve une certaine distance par rapport au résultat final car elle retournerait exercer en cas d’échec.

Les électeurs n’en peuvent plus de la comédie du national

Dr Yannick Neuder (LR, Isère)

Le discours est très différent dans la 7e circonscription de l’Isère, où le Dr Yannick Neuder fait lui aussi campagne pour sa réélection, sous la bannière des Républicains en désaccord avec Éric Ciotti, et sans pacte de non-agression avec la majorité (comme c’est le cas par exemple dans les Hauts-de-Seine). Le cardiologue, qui porte un texte pour rapatrier les carabins français exilés à l’étranger reste optimiste malgré le haut score du RN dans son département. « Les électeurs n’en peuvent plus de la comédie du national, à laquelle nous avons bien contribué chez LR », recadre-t-il. Face à un candidat « illustre inconnu et parachuté » soutenu par le parti de Jordan Bardella, l’ancien vice-président de la région Auvergne Rhône-Alpes dit constater « un accueil très favorable » de sa candidature renouvelée dans son territoire où « la santé est un sujet dont on parle, notamment en raison des projets concrets que nous portons, comme un nouveau cabinet d’imagerie ou un centre de dialyse associatif ». S’il n’était pas réélu, le cardiologue affirme qu’il reprendrait son activité à temps plein.

J’avais prévu d’être candidat, mais pas tout de suite !

Dr Thomas Mesnier (Horizons, Charente)

Un autre médecin expert des questions de santé – qui avait été élu député en 2017, puis finalement battu lors d’un nouveau scrutin partiel en 2023 (après invalidation de son résultat 2022 par le Conseil constitutionnel) – se représente cette année dans la 1re circonscription de Charente. « J’avais prévu d’être candidat, mais pas tout de suite ! », ironise l’urgentiste Thomas Mesnier, devenu chef de pôle aux urgences du CHU de Bordeaux. Ce dernier a pris ses distances avec les rangs macronistes, rejoignant le parti d’Édouard Philippe (Horizons), même s’il se présente sous l’étiquette de la majorité. Après une première semaine de campagne compliquée où, sur les marchés, les badauds « n’étaient pas réceptifs, encore sidérés par la dissolution », l’ambiance aurait changé quelque peu le week-end dernier. « Les citoyens viennent me parler pour me rapporter un plus grand rejet de l’extrême gauche que de l’extrême droite », narre-t-il. Ici non plus, pas vraiment de débat sur la santé, sauf « un peu sur l’accès aux soins, mais c’est le pouvoir d’achat et la peur des conflits internationaux qui dominent ».

Guillaume Garot, poil à gratter des libéraux, en campagne pour sa réélection

Dans la 1re circonscription de la Mayenne, fief du député socialiste Guillaume Garot, ce dernier a été investi sous la bannière d’union de la gauche du Nouveau Front populaire. Sur ce territoire, insiste-t-il, « le pouvoir d’achat, mais aussi la santé, sont les thèmes principaux », notamment en raison de « la difficulté d’accès aux médecins et des urgences qui ferment la nuit ». Il appartient à la gauche de « tracer le chemin d’une alternative », à la fois au RN et à la majorité présidentielle, explique-t-il. Lui qui porte, via une proposition de loi transpartisane, une régulation à l’installation des médecins libéraux (mesure reprise dans le programme d’union de la gauche), souhaite désormais que cette réforme se concrétise « à l’image de celle que négocient l’Assurance-maladie et les dentistes ». Le principe est celui d’un conventionnement sélectif : dans les zones très bien dotées, la Sécu ne conventionnerait un nouveau praticien que si un autre s’en va. « On verra dans quelle situation politique nous serons le 7 juillet, avec quelle majorité à l’Assemblée… », souffle le député sortant, loin d’être résigné mais néanmoins inquiet.


Source : lequotidiendumedecin.fr