Vaccins, anticancéreux, amoxicilline/acide clavulanique intraveineux, antiépileptique ou antiparkinsonien : les ruptures d’approvisionnement se suivent et s’accumulent. Au terme de 20 auditions et 70 avis recueillis par questionnaire auprès des parties prenantes (laboratoires, pharmaciens, instances de l’État comme l’ANSM ou l’INCA, associations de patients), trois mois seulement après avoir lancé une mission d’information pour détricoter les causes de ces pénuries récurrentes, les sénateurs ont dévoilé leur rapport ce matin.
Inobservances, pertes de chances, recul de la confiance
À la veille des examens du PLFSS et de la réforme du système de santé, ils jettent leur pavé dans la mare : « il y a urgence à replacer l’éthique de santé publique au cœur de la chaîne du médicament ! » prévient le vice-président de la commission des affaires sociales, Yves Daudigny. « Les pouvoirs publics mettent toujours en avant prix et sécurité du médicament, il est urgent qu’ils appuient aussi sur cette notion : sa disponibilité ». Outre que les pénuries sont humainement coûteuses, exposant les patients à d’inacceptables inobservances thérapeutiques et pertes de chances, « affectant partout largement l’exercice des soignants » il en va aussi « de la confiance en notre système de santé et de notre indépendance sanitaire » souligne-t-il.
Dix fois plus de pénuries entre 2008 et 2014
« Lorsque j’ai demandé cette mission, je ne mesurais pas l’impact d’un problème largement sous-estimé dans le débat public » alerte Jean-Pierre Decool, sénateur du Nord et rapporteur de la commission. S’il ne date pas d’hier, il s’accroît de façon inquiétante. Entre 2008 et 2014, le nombre de signalements à l’ANSM a été multiplié par 10. Décrochage record en 2017, avec 530 déclarations (+ 30 % par rapport à 2016), dont 80 concernaient des médicaments vitaux, dits d’intérêt thérapeutique majeurs (MTIM), et des ruptures de 14 semaines en moyenne. Anticancéreux, anti-infectieux, anesthésiants, médicaments du système nerveux central et dérivés du sang sont les plus touchés parmi ces produits principalement dispensés à l’hôpital. Les pharmacies de ville n’y échappent pas : 300 références — MTIM ou non — sont en moyenne en rupture chaque mois. Manque de matière première, défaillance d’une usine ou défaut de fabrication, variations non anticipées de la demande, inadéquation des quotas livrés et manque de transparence à tous les étages : côté causes, la mission sénatoriale relève « un bouquet de vulnérabilités » dans toute la chaîne d’approvisionnement en médicaments, dont la production nous échappe. 80 % des principes actifs sont aujourd’hui fabriqués en Asie, Inde et USA.
Trente propositions pour mieux gérer les pénuries
Pour mieux gérer les pénuries, relocaliser une partie de la fabrication de médicaments essentiels fait d’ailleurs partie des 30 propositions de la mission. Elle plaide aussi pour la création d’un pôle public de production et distribution de produits critiques, qui pourrait notamment être confiée au savoir-faire de la pharmacie centrale des armées, comme cela se fait en Suisse. Une plateforme centralisée et actualisée recensant ruptures et risques de pénurie, qui en retracerait aussi l’historique de production pour chaque laboratoire permettrait de mieux informer chacun et d’anticiper les manques à venir auprès des patients. En cas d’indisponibilité, pour atténuer les effets d’une pénurie, la mission suggère de prendre exemple sur le modèle québécois et également d’autoriser les pharmaciens à pouvoir substituer une spécialité par une autre : sans accord du médecin, mais dans un cadre préalablement défini et partagé par les professionnels de santé.
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