Matthieu Schnee, du CH Départemental de Vendée, décrit l’adaptation de son service d’hépato-gastro-entérologie aux bouleversements réguliers du contexte VHC : largement inspiré du travail en réseau engagé dans le milieu du VIH dans les années 1990, il a pu bâtir progressivement un parcours de soins. Ensuite s'est instauré un réseau d'échanges professionnels avec les centres hospitaliers du territoire via la télémédecine. Ensuite, l’évolution de la file active d’origine étrangère a conduit le service à inclure des moyens d’interprétariat. Il a progressivement développé son volet de recherche clinique pour accompagner l’essor de recherche intégrée autour du patient. Et depuis 2014, ils assurent les RCP qui permettent de valider l’indication des nouveaux traitements. Reste que « beaucoup de patients en F2 non sévères, qui sont à la limite de l’autorisation, nous demandent pourquoi ils ne peuvent avoir droit à ces nouvelles molécules, a-t-il indiqué. Il y a aussi l’enjeu des personnes éloignées du soin qui posent la question du dépistage et de l’accès facilité à une prise en charge ».
Dépister mieux
Éric Billaud, infectiologue au CHU de Nantes et président du Corevih Pays-de-la-Loire insiste sur les enjeux liés au dépistage : ce sont ceux du diagnostic précoce et du traitement qui va réduire l’impact de la maladie, a-t-il résumé, en rappelant notamment la réduction des cirrhoses, et de la morbimortalité liée, sous traitement. « Il y a aussi un intérêt plus global en termes de santé publique en réduisant le taux de virus circulant dans la population. Il faut que les populations les plus précaires, socialement vulnérables, usagers de drogues et migrants, accèdent à ces tests. Mais ce que l’on voit aujourd'hui, c’est un hiatus important autour du dépistage chez ces personnes par rapport à la population générale. »
Face à ces difficultés, les tests rapides d’orientation diagnostiques (Trod) présentent l’intérêt d’être faciles et rapides à utiliser, et ainsi de limiter le nombre de perdus de vue entre le test et la récupération des résultats. « Toutes ces personnes doivent bénéficier des Trod, mais selon des modalités et dans des structures qui leur soient spécifiques. Par ailleurs, le hors les murs demande de l’organisation, des ressources humaines, du temps et des moyens financiers », a-t-il reconnu. Enfin, à l’issue du diagnostic, les difficultés de ces populations (hébergement précaire, langue, isolement relationnel et social, absence de droits sociaux…) limitent leur entrée dans le soin.
Une prise en charge coordonnée et étroite
Sur le terrain, il existe pourtant des organisations efficaces pour réduire la fracture. C’est le cas du Cappa J.Prévert (Centre ambulatoire pluridisciplinaire de psychiatrie et d’addictologie), un service d’hospitalisation de jour qui fait notamment intervenir les équipes de liaisons d’addictologie et de psychiatrie dans une approche pluridisciplinaire avec d’autres professionnels comme des hépatologues, des neuropsychologues, psychomotriciens, diététiciens…
Anne Chassevent, médecin addictologue explique : « Les patients ayant des problèmes d’addiction que nous prenons en charge viennent presque tous les jours en début de traitement. Ils prennent leur traitement avec les infirmières du service. À mesure que le traitement avance, les visites sont espacées. Ils ont ainsi des consultations hebdomadaires avec l’hépatologue, bihebdomadaire avec le psychiatre, ainsi qu’une prise en charge en médiation groupale pour travailler sur leur dépendance et des suivis individuels paramédical et social. »
L’ETP en mutation
« Il faut vraiment une prise en charge conjointe et coordonnée autour de ces patients, a-t-elle reconnu, parce que ce sont des personnes complexes à prendre en charge. Il faut créer une alliance thérapeutique, qui reste compliquée avec ce type de patient ». L’éducation thérapeutique peut la renforcer. Elle l’a montré durant les années au cours desquels la bithérapie – lourdes et mal tolérées – était le seul traitement connu. Aujourd’hui, l’ETP doit continuer à évoluer. Martine Labat, infirmière en charge de l’ETP dans le service hépato-gastro-entérologie du CHU de Nantes, le confirme : « Autour des nouveaux médicaments, on peut plutôt parler d’un suivi thérapeutique. Mais il reste tout un pan d’écoute, de dialogue, de réponses aux questions… qui restent très importantes pour les patients. » Sylvie Bonneau, trésorière de SOS Hépatites Pays de la Loire propose les angles forts selon lesquels l’ETP doit désormais être déployé : « Vivre avec et vivre au-delà de la maladie en prenant en compte les risques de la fibrose, comme le cancer, créer des programmes spécifiques aux personnes toxicomanes, à celles ayant une cirrhose, les personnes en situation carcérale, à celles ayant un problème avec l’alcool. Il faut y intégrer la qualité de vie et la restauration globale de la santé. »
Laissés-pour-compte
Attention, souligne Paul Bolo, médecin généraliste libéral attaché au CSAPA, Le Triangle de Nantes : « La cohorte des patients en libéral n’est pas la même qu’en milieu hospitalier. Au sein du CSAPA, la difficulté reste l’inclusion dans le soin. Entrer dans le soin demande une stabilité sociale (un toit), administrative (la CMU), une capacité à se faire prélever et une volonté de se déplacer vers un centre de soin adapté, a-t-il résumé. Pour les prendre en charge, nous avons baissé le seuil d’acceptabilité ces dix dernières années en acceptant désormais des patients qui continuent leurs pratiques d’injection. »
Jérôme Gournay, chef du service hépato-gastro-entérologie au CHU de Nantes, suggère pour y répondre que de « nouvelles stratégies plus pertinentes et efficaces soient trouvées par les services », comme le couplage Trod-Fibroscan pour éviter de perdre de vue une personne dont l’état hépatique demande une prise en charge rapide. En attendant, des avancées comme « les salles de shoot » pour le Dr Bolo, ou comme « le tiers payant généralisé » pour le Dr Anne-Marie Prinet, conseillère régionale des Pays-de-la Loire, seront autant d’outils pour abattre toutes les barrières du recours aux soins.
À l’AP-HM, dans l’attente du procès d’un psychiatre accusé de viols
Le texte sur la fin de vie examiné à l'Assemblée à partir de fin janvier
Soumission chimique : l’Ordre des médecins réclame un meilleur remboursement des tests et des analyses de dépistage
Dans les coulisses d'un navire de l'ONG Mercy Ships