Dans un « audit flash » rendu public mercredi, la Cour des comptes ausculte les raisons pour lesquelles, sept ans après la loi de modernisation du système de santé créant leur statut, le nombre d’infirmières en pratique avancée (IPA) peine à décoller.
Pour mémoire, le ministère de la Santé de l’époque s’était fixé une cible de 3 000 IPA formés ou en formation d’ici à 2022 et, à terme, 6 000 à 18 000 IPA en exercice ! Or, en 2021, seuls 581 IPA étaient diplômés et 1 366 étaient en formation. Aujourd’hui, ce nombre est estimé à 1 700, promotion 2023 comprise, encore loin des ambitions initiales.
Crainte de concurrence
Parmi les freins qui expliquent ce faible déploiement, la rue Cambon relève, au premier chef, les réticences des médecins eux-mêmes. « Lorsque les IPA sont installés en ville, les médecins refusent trop souvent, par méconnaissance ou par crainte de concurrence, d’orienter vers eux des patients atteints de pathologies chroniques, dont l’état de santé relèverait d’un suivi par ces professionnels médicaux », observent les auteurs du rapport.
Un comble, alors que le métier d’IPA, avec ses deux ans d’études supplémentaires de niveau master dans une des cinq mentions de spécialité (pathologies chroniques stabilisées, oncologie et hémato-oncologie, maladie rénale chronique, dialyse et transplantation rénale, psychiatrie et santé mentale, urgences) avait justement été pensé pour permettre de libérer du temps médical aux médecins, notamment dans le suivi des patients en ALD.
IPA à la peine, en ville comme à l’hôpital
Le modèle de financement reste un obstacle majeur à l'essor de ce nouveau métier à l'interface entre les infirmiers et les médecins. À l’arrivée, selon le rapport d'étape, les IPA ne bénéficient pas encore d'un modèle économique suffisamment rémunérateur pour « vivre de leur activité » en libéral.
Quant aux IPA exerçant en tant que salariés d’un établissement hospitalier, leur statut n'est « guère plus attrayant », avec des perspectives financières et des offres de carrières inférieures à ce qui avait été annoncé initialement. In fine, la Cour des comptes regrette la mise en oeuvre « laborieuse » de ce nouveau statut.
La Cour note cependant qu'au printemps 2023, la loi Rist a permis de progresser en octroyant un accès libre des patients à certaines IPA, hors prescription d'un médecin, et en leur ouvrant un droit de prescription dans certains cas.
Cela sera-t-il suffisant pour amorcer un réel décollage ? D'une manière générale, « les difficultés rencontrées par les IPA reflètent les limites de la conception du système de santé français, encore marqué par l'exercice isolé de la médecine de ville et la rémunération à l'acte », tacle la Cour. « Cette conception doit évoluer » alors que « l'offre de soins de ville continue à se rétracter (...) et que de nombreux patients ne bénéficient pas de médecin traitant », diagnostique-t-elle.
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