À partir du 3 avril 2023, en vertu des dispositions de l’article 33 de la loi Rist du 26 avril 2021, tout comptable public devra rejeter les rémunérations dépassant 1 170 euros bruts par 24 heures, une disposition qui risque de fragiliser nombre d’établissements. « Dans chaque région, plusieurs dizaines de services vont se retrouver en rupture totale ou partielle, faute de praticiens contractuels pour les faire fonctionner », indique Jérôme Goeminne, président du Syndicat des manageurs publics de santé (SMPS). S’il souscrit au constat partagé par l’ensemble des acteurs hospitaliers sur les dérives de l’intérim médical – qui pourrait représenter jusqu’à 1,5 milliard d’euros de dépenses par an selon la Fédération hospitalière de France – il regrette l’impréparation de la réforme et l’absence d’accompagnement des établissements par les pouvoirs publics. « Les directions hospitalières et les communautés médicales travaillent d’arrache-pied depuis plusieurs mois pour trouver des solutions et préparer des organisations différentes, car nous sommes tous favorables à l’encadrement de ces rémunérations qui avaient atteint des montants déraisonnables tant d’un point de vue éthique que budgétaire. Mais nous sommes seuls », exprime-t-il.
L'État doit « prendre ses responsabilités »
À moins de trois semaines de l’échéance, le syndicat demande donc à l’État de « prendre ses responsabilités » en annonçant les réorganisations à venir, en réquisitionnant éventuellement des renforts extérieurs, en autorisant des dérogations pour les services publics isolés, en valorisant les gardes, les astreintes et le travail le week-end ou encore en appliquant la loi Rist au secteur privé. « L’État négocie avec les fédérations privées à but lucratif et à but non lucratif une charte pour faire respecter le plafond de 1 170 euros bruts par journée. Mais nous constatons l’inverse sur le terrain », déplore Jérôme Goeminne.
Progressivité de la mise en œuvre
Le SMPS avait aussi demandé une progressivité de la mise en œuvre des nouvelles dispositions par spécialité afin d’éviter de mettre plusieurs services simultanément en difficulté au sein d’un même établissement, mais il n’a pas été entendu. « Aujourd’hui, nous proposons des plans de réorganisation dans chaque hôpital, mais ces décisions doivent être assumées collectivement. Malheureusement, chacun sait que l’annonce politique d’une fermeture – d’une maternité par exemple - est très difficile et qu’elle a toujours des répercussions sur la carrière d’un décideur. L’État peut compter sur nous, mais il doit être à nos côtés et ce, bien au-delà du 3 avril. » Car les effets de la loi Rist risquent de s’étaler dans le temps. « Nous estimons que 70 % des praticiens contractuels refusent le plafond réglementaire. Mais un certain nombre d’entre eux vont accepter de poursuivre leur activité un mois ou deux par amitié pour leurs collègues. L’été s’annonce donc très compliqué », poursuit le président du SMPS.
Inquiétude des élus locaux
Le 9 mars dernier, l’Association des petites villes de France (APVF) a également adressé un courrier à François Braun, ministre de la Santé et de la Prévention pour demander un renforcement des concertations locales à l’initiative des ARS, des possibilités temporaires de dérogation au plafond de 1 170 euros bruts, ainsi qu’un engagement des établissements privés « sur la voie d’une rémunération raisonnable de l’intérim médical ». « L’APVF, qui s’est toujours prononcée en faveur de la limitation de l’intérim hospitalier, a favorablement accueilli la loi Rist. Mais aujourd’hui nous sommes alertés sur la situation de plusieurs hôpitaux qui risquent de ne pas trouver de solutions d’ici début avril et de se retrouver confrontés à des dysfonctionnements importants pouvant conduire à des fermetures de services. D’où notre proposition d’autoriser des dérogations limitées dans le temps. Je pense par exemple à Nogent-le-Rotrou ou à Paimpol. Il faut faire preuve de souplesse dans la mise en place du dispositif », témoigne André Robert, délégué général de l’association qui en appelle également à une responsabilisation de l’ensemble des acteurs. « Beaucoup d’intérimaires travaillent à la fois dans les hôpitaux publics et privés. Si ces derniers maintiennent des niveaux élevés de rémunération, nous serons clairement confrontés à des ruptures d’accès aux soins. »
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