Philippe Lamoureux, directeur général des Entreprises du médicament (Leem) a tenu des propos fermes devant les sénateurs, rappelant en introduction que le secteur du médicament n’avait connu aucune croissance depuis une douzaine d’années. « Le chiffre d’affaires est stable car PLFSS après PLFSS, nous subissons des baisses de prix comprises entre 700 et 900 millions d’euros par an ». Selon lui, de nombreux facteurs expliquent les ruptures d’approvisionnement actuelles : une augmentation de la demande mondiale – notamment liée au vieillissement de la population - plus rapide que la capacité de production ; une forte concentration des fournisseurs de matières premières et d’excipients problématique en cas de difficultés sur un site ou encore des techniques de production de plus en plus complexes.
Le DG du Leem a aussi pointé, pour les regretter, quelques « spécificités françaises » : un écart de prix de 37% par rapport à l’Allemagne par exemple, « ce qui n’incite pas les industriels à investir dans notre pays. Cette situation encourage par ailleurs des exportations parallèles vers des marchés étrangers plus attractifs. »
Inflation
Sans surprise, le contexte économique actuel a aussi été présenté comme un facteur aggravant. « Nous avons connu des hausses de prix de plus de 600% sur le verre par exemple et la masse salariale a progressé de 7%. Mais, dans la mesure où nous ne pouvons pas répercuter ces augmentations, nous allons assister à des arrêts de commercialisation. Nous ne pouvons plus produire à perte », a témoigné Karine Pinon, présidente de l’Association des moyens laboratoires et industries de santé (Amlis). Le fait d’imposer des durées de stockage longues à des produits à faible valeur ajoutée a aussi été ajouté à la liste des difficultés.
Autre facteur d’inquiétude, des tensions d’approvisionnement apparaissent aussi, de manière conjoncturelle, sur des produits innovants pour trois raisons exposées par Corinne Blachier-Poisson, présidente de l’Association des groupes internationaux pour la pharmacie de recherche (Agipharm) : « Un niveau d’exigence très élevé pour les processus de fabrication ; des délais incompressibles lors du passage à l’échelle industrielle du fait notamment des validations des agences sanitaires et la multiplicité des composants qui entrent dans la fabrication d’une molécule. »
Attentes… et regrets
En termes d’attentes, Didier Véron, président du cercle de réflexion G5 Santé a rappelé l’importance de « disposer d’une liste de médicaments dits critiques à sécuriser de manière prioritaire ». Avant d’exprimer des regrets sur la mise en œuvre de l’article 65 de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2022 qui prévoit que la fixation du prix d’un médicament puisse « tenir compte de la sécurité d'approvisionnement du marché français que garantit l'implantation des sites de production ». « Dix-huit mois après l’adoption de cet article, le Comité économique des produits de santé (CEPS) vient seulement de finaliser sa doctrine d’application et elle ne concerne malheureusement que les produits nouveaux ».
Quant au choix de délocaliser la production de principes actifs de médicaments en Chine et en Inde, Laurent Borel-Giraud représentant l’association « Générique Même Médicament » a répondu à la rapporteure Laurence Cohen que « ces évolutions lentes, qui ont marqué les dernières décennies, étaient transparentes et connues des autorités ». Appelant à distinguer les activités de chimie et de pharmacie, il a également témoigné de ruptures de médicaments sur des sites français et européens.
Enfin, si Philippe Lamoureux n’a pas cherché à éluder la coresponsabilité de l’industrie dans la situation actuelle, il a appelé de ses vœux un travail commun et une approche interministérielle « pour trouver des solutions ». « Nous ne sommes pas qu’un poste de coûts. Comment construire un PLFSS en ignorant la politique industrielle ? », a-t-il conclu.
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