Le 12 octobre dernier, la Cosmap (Commission supérieure des maladies professionnelles en agriculture) a rendu un avis favorable en faveur du classement du cancer de la prostate comme maladie professionnelle pour les agriculteurs exposés aux pesticides.
Un avis qui va dans le sens des études de ces dernières années. En juin dernier, la mise à jour de l’expertise collective de l’Inserm : « Pesticides et effets sur la santé : Nouvelles données », confirmait les données de 2013. Elles montraient ainsi que le cancer de la prostate fait partie des six pathologies avec une « présomption forte » de lien entre l’exposition aux pesticides et un surrisque de développement de la maladie.
Les dernières données de la cohorte Agrican montrent également que les hommes de la cohorte sont plus touchés par le cancer de la prostate (+ 3 %). L’excès de risque atteignant même 10 % pour les éleveurs de porcs, 20 % pour les utilisateurs de pesticides sur blé ou d’insecticides sur bovins, et un doublement pour les arboriculteurs travaillant sur des récoltes de plus de 25 hectares.
Le gouvernement promet un décret
S’appuyant sur ces différentes expertises, cet avis de la Cosmap pourrait donc ouvrir la loi à une prochaine reconnaissance du cancer de la prostate en maladie professionnelle. En effet, interpellé lors des questions au gouvernement du 20 octobre par le sénateur Joël Labbé (EELV), le ministre de l’Agriculture Julien Denormandie a répondu que le gouvernement allait suivre cet avis. « Oui, je prendrai le décret permettant d’établir ce tableau de maladie professionnelle », a fait savoir le ministre.
« Les médecins ne peuvent pas encore considérer qu’ils ont un nouveau tableau de maladie professionnelle ouvert devant eux, mais s’ils ont des patients agriculteurs qui présentent un cancer de la prostate, ils peuvent d’ores et déjà se poser la question de la reconnaissance en maladie professionnelle », souligne le Dr Pierre-Michel Périnaud, généraliste et président de l’association AMLP (alerte des médecins sur les pesticides). Ce dernier espère que la sortie du décret sera rapide.
Les délais d'exposition et de prise en charge en question
Désormais, et comme l’a souligné le sénateur Labbé, les associations espèrent qu’il ne s’agira pas « d’un tableau au rabais ». Car le gouvernement doit encore arbitrer plusieurs éléments et notamment les délais d’exposition et de prise en charge à retenir.
Sur ces deux points, des désaccords subsistent. D’un côté, des associations de victimes, la Coordination rurale (CR), la Confédération paysanne et plusieurs syndicats de salariés souhaitent une reconnaissance dès cinq ans d’exposition, alors que la FNSEA (Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles) penche pour une durée d’exposition minimale d’au moins le double. Idem pour le délai de prise en charge que les premiers espèrent de 40 ans et les seconds plus courts.
« Cette question du délai de prise en charge est importante car on sait qu’avec les cancers il y a une très forte inertie. Nous espérons qu’un consensus pas trop mauvais en sortira. C’est toujours à partir de ces éléments-là qu’un tableau devient plus ou moins applicable », explique le Dr Périnaud.
Selon lui, ce qu’il est important de voir également, ce sont les tâches qui seront prises en compte. « Cela aura du sens si on considère bien toutes les tâches et pas seulement les applicateurs de pesticides, l’épandage. Par exemple, en arboriculture, il faut prendre en compte ceux qui viennent faire de la taille et sont donc amenés à toucher les arbres », précise-t-il.
Aller plus loin sur le chlordécone
Si cette reconnaissance du cancer de la prostate en maladie professionnelle pour les agriculteurs permet notamment d’avancer sur le sujet du chlordécone dans les Antilles, pour le Dr Périnaud, sur cette problématique il faudra aller plus loin.
« Le chlordécone a impacté ceux qui travaillent dans les bananeraies mais comme il ne s’élimine pas du sol, il contamine les autres aliments cultivés. Il y a donc une très forte contamination de toute la population. C’est donc un sujet à part entière et il ne faudra pas s’arrêter là », estime-t-il.
L’AMLP souhaite également que d’autres évolutions voient le jour à partir de l’expertise de l’Inserm, qui mettait à jour des liens entre pesticides et différentes pathologies.
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