Le ministère de la Santé a dévoilé ce lundi 28 actions et « grandes orientations » pour lutter contre la pénurie de médicaments en France. Cette feuille de route 2019/2022 est un « point de départ » devant aboutir au plan définitif pour septembre.
Un quart des Français ont déjà été confrontés à une pénurie de vaccins ou de médicaments, indique un récent sondage de France Assos Santé (usagers). En 2017, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a recensé 538 signalements de rupture ou tensions d'approvisionnement de médicaments d'intérêt thérapeutique majeur, contre 404 en 2013 et seulement 44 en 2008.
Certains vaccins, antibiotiques, antiparkinsoniens et anticancéreux sont touchés « par des tensions ou des ruptures » d'approvisionnement, souligne Agnès Buzyn en introduction à sa feuille de route. « Face à la distorsion entre l'offre et la demande sans cesse croissante au niveau mondial, l'ensemble de la chaîne du médicament est impactée », ajoute-t-elle. Ces dernières semaines, de fortes tensions d'approvisionnement ont concerné les corticoïdes.
Mieux signaler les ruptures
Le gouvernement veut en priorité « promouvoir la transparence et la qualité de l'information ». Neuf actions sont prévues à cet effet, dont l'ouverture en 2020 de la plateforme DP-ruptures – qui permet déjà aux pharmaciens de signaler les ruptures aux industriels – aux distributeurs, dont les grossistes-répartiteurs et les dépositaires. Les patients pourraient eux aussi signaler des indisponibilités grâce à un outil partagé (application).
De leur côté, les pharmaciens devront être en mesure de délivrer des informations fiables aux patients, en particulier la date de disponibilité du médicament manquant. En cas de pénurie, les professionnels de santé devront prévenir les patients du risque d’« iatrogénie rupture », autrement dit le remplacement aléatoire du médicament manquant par un autre. À partir du premier semestre 2020, l'ANSM sera chargée d'élaborer un bilan annuel des tensions d'approvisionnement.
Le pharmacien pourra substituer
Deuxième axe : proposer des actions de prévention et de gestion « ciblées » à chacun des acteurs du circuit du médicament. En cas de rupture de stock d’un médicament d’intérêt thérapeutique majeur, la loi de santé autorisera le pharmacien à remplacer le médicament indisponible initialement prescrit par un autre, conformément aux recommandations de l’ANSM.
Une cartographie des sites de production des anticancéreux à risque fort de pénurie sera réalisée au premier semestre 2020, avec en corollaire une réflexion sur les procédures d'achat hospitalier. Et le gouvernement se donne deux ans pour faire des propositions « concrètes » sur les antibiotiques à risque fort de pénuries.
Parfois accusés d'être les premiers responsables des ratés d'approvisionnement, les laboratoires qui commercialisent des molécules ayant déjà subi des ruptures devront élaborer un « plan de gestion des pénuries renforcé ». En février, le LEEM (Les entreprises du médicament) a déjà proposé en ce sens une « liste de médicaments d'intérêt sanitaire et stratégique », pour lesquels les mesures de gestion de pénurie seraient renforcées (stocks mobilisables, suivi précoce, identification des fournisseurs, protocole de remplacement). Lancés en mars 2019, les contrôles des distributeurs en gros (short liners), qui contribuent à la « fragmentation » des stocks, pourront être prolongés en 2020.
À l'hôpital cette fois, le gouvernement veut explorer la piste d'une création d'entrepôts globalisés au niveau des groupements hospitaliers de territoire (GHT) pour amortir les pénuries.
Pouvoir de sanction
Agnès Buzyn veut également dynamiser la coopération européenne à plusieurs niveaux. Elle entend poursuivre des discussions sur l'achat groupé, « notamment de vaccins essentiels au niveau européen ».
Elle espère aussi « renforcer » les pouvoirs de régulation de l'ANSM. « Compte tenu de la structuration des marchés, de la concentration des fabrications, l’approche de l’ANSM relative à la gestion des pénuries de médicaments doit évoluer. Il est nécessaire de développer les mesures d’anticipation et les pouvoirs de régulation de l’agence voire augmenter son pouvoir de sanction », peut-on lire. L'instauration de pénalités financières sera même expertisée dans ce cadre.
Enfin, le gouvernement planche sur la création d'une « solution publique pour organiser des approvisionnements en cas de pénurie avérée », « sollicitée de façon exceptionnelle et dérogatoire, en cas d’échec des négociations avec les laboratoires concernés ».
Enfin, quatre mesures visent à mettre en place une nouvelle gouvernance nationale. Un comité de pilotage et une task force interministérielle (pilotée par Ségur) seront créés pour assurer la concrétisation de ces mesures, associant l'ANSM, les laboratoires pharmaceutiques, les grossistes et les associations de patients.
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